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[Tribune] Expérience utilisateur : vers une personnalisation globalisée

Publié par Jérôme Pouponnot le - mis à jour à
[Tribune] Expérience utilisateur : vers une personnalisation globalisée

Le client a changé. Derrière le poncif, comme souvent, se cache une réalité inébranlable. Finie la proposition descendante d'une offre vers la demande ; la logique d'interaction client - entreprise est désormais un canal ouvert, en réciprocité constante. La frontière qui séparait le client de l'entreprise est révolue et laisse place à une nouvelle configuration des rôles.

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Par Touria Elmourabit, Responsable Support Activité SAGE chez Prodware

Le client a changé, donc, mais comment ? Il n'est plus cet interlocuteur récepteur d'une proposition et en validant la pertinence avec une réponse dichotomique : oui, non, j'achète, je n'achète pas. Il donne son avis, exprime ses attentes, revient sur son expérience. L'entreprise se nourrit de toutes ces données, en analyse le contenu, et développe une réponse appropriée en répartissant son action tantôt sur le groupe, tantôt sur l'individu. Cela permet de mesurer cette chose qui n'est contradictoire qu'en apparence : tout le monde se ressemble, personne n'est pareil.

Uniformité protéiforme

Auparavant, on considérait qu'une marque avait des clients. Maintenant, même si elle en a des millions dans le monde entier, on parle de "son" client - et ce passage du pluriel au singulier, donc à la singularisation, change tout.

Les modalités de contact entre une marque et, donc, son client n'ont jamais été aussi nombreuses. Téléphone, e-mail, canaux numériques divers, points de vente... dans le contexte d'un achat, d'une sollicitation d'une aide ou d'un dépannage via le SAV, l'interaction est constante. Or, elles sont toutes étudiées, analysées, disséquées, dans une ambition à double incidence : l'amélioration de la proposition pour la marque, celle de l'expérience pour le client. Car cette démultiplication des occurrences se traduit, dans les faits, par un volume colossal de données traitées. Elles deviennent, en quelque sorte, la traduction arithmétique de la nouvelle frontière, plus fine, plus poreuse, plus interactive entre client et entreprise.

Mais il ne faudrait pas confondre la quantité phénoménale de données recueillies et la standardisation de toute démarche pour satisfaire la majorité. Ce serait là une interprétation grossière d'une réalité beaucoup plus délicate. Le volume est une dimension essentielle de toute analyse, mais elle n'en est qu'une partie. La quantité apporte une notion d'attente globale, dégage une tendance majoritaire, mais la véritable évolution récente des attentes des clients se situe sur des valeurs plus sensibles.

En résumé : plus d'interactions, donc plus de données. Plus de données, donc une perception plus juste et plus stable de la tendance générale. Mais aussi plus de données, donc plus de valeurs qualitatives qui permettent des pas de côté par rapport à l'ensemble. Des racines bien alimentées donnent toujours un tronc solide, mais aussi des branches toniques. La masse d'un côté, l'exception de l'autre, les deux traitées par la qualité et la quantité des données reçues. La convergence des attentes se retrouve autour du principe de personnalisation des expériences client. C'est ainsi à la fois une uniformisation quand on regarde la masse (de plus en plus de clients attendent la même chose) et une singularisation quand on observe l'individu (chacun attend une expérience personnalisée pour lui).

Marque employeur - service client - collaborateurs : le triumvirat du succès

L'expérience personnalisée, ce n'est pas seulement un concept marketing à affirmer haut et fort à grand renfort de chartes, plaquettes de présentation et autres supports de communication. C'est avant tout le résultat d'un processus qui embarque avec lui l'ensemble de l'entreprise. C'est l'aboutissement d'une réflexion qui part de la stratégie de l'entreprise, ruisselle vers l'ensemble des équipes, se faufile jusque dans la moindre interaction entre un collaborateur et un client, puis remonte par le même chemin ou d'autres en sens inverse, jusqu'à la direction de l'entreprise et ses décisions stratégiques. La finalité de ce processus réside dans l'effacement de la notion de source et de destination, et la création d'un mouvement perpétuel (après tout, ce n'est pas de la physique) qui s'autoalimente.

La stratégie de l'entreprise est le socle, c'est incontestable. Ce n'est pas parce qu'il y a débat entre l'oeuf et la poule que l'on doute du fait que l'un des deux eût forcément précédé l'autre. Elle constitue le pilier, la force initiale qui impulse l'envie d'en savoir plus sur ses clients, le besoin de calibrer une offre cohérente, qui correspond aux valeurs fortes qu'elle aura définies. C'est le premier étage de la fusée. Ce qu'apporte le retour client élevé au rang de fournisseur majeur d'enseignements, c'est à la fois la validation (ou invalidation) abrupte de cette stratégie (la note froide et sans nuance : est-ce que notre discours résonne en vous - oui / non), mais aussi la partie plus sensible, plus fine (le commentaire). Qui douterait de l'utilité des deux ? C'est le deuxième étage de la fusée.

Pour enrober ces deux premières dimensions, on retrouve, comme souvent, les collaborateurs. Ils sont la clé de voûte de l'ensemble du dispositif entre les clients et la stratégie de l'entreprise, et vice versa. Ils pilotent, appliquent, redirigent les flux, les interprètent, déclinent la stratégie dans le ton qu'ils emploient, le vocabulaire qu'ils utilisent, les solutions qu'ils proposent. Bref, ce sont à la fois les employés de Houston restés au sol, les astronautes qui pilotent la fusée, et l'atmosphère qui crée une condition environnementale déterminante sur son envol.

Ça fait beaucoup, c'est sûr, mais qui a dit que la donnée était le remplaçant de l'humain ? Vous connaissez beaucoup de services clients totalement gérés par une machine, qui soient à la fois performants sur le volume et pertinents sur le spécifique ? Du reste, ils ne sont pas les seuls à avoir un rôle multiple et hybride dans cette démarche. C'est aussi le cas... des clients. Ces derniers sont demandeurs et demandés, ils sont à la fois les destinataires de toute la démarche d'amélioration de l'offre de l'entreprise et les principaux guides (une fois le socle posé) de l'évolution de celle-ci.

C'est dans cette étrange confusion des rôles que se détermine la nouvelle réalité de l'expérience client. Celui-ci n'en est définitivement plus un, et pourtant il ne l'a jamais été autant. L'ère est au paradoxe, à l'hybridation, à la masse et au sensible. Le véritable confort ne résiderait-il pas dans l'acceptation d'une forme de lâcher prise, dans l'affirmation d'un soi multiple, variable en fonction des instants, des interlocuteurs, des contextes ? C'est en outre un constat applicable à chaque partie prenante de ce schéma interactionnel : entreprise, collaborateur, client, le protéiforme est aussi leur point commun. Cette diversité, c'est ce qui les rassemble.

 
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