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Les stratégies clients en mouvement

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Acquisition, fidélisation, rétention... À toutes les étapes de sa vie de consommateur, un client est sollicité par différentes stratégies. Les enjeux sont de taille, a fortiori sur des marchés où la concurrence fait rage. Et les moyens évoluent.

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Ces vingt dernières années, l'acquisition de nouveaux clients a été marquée par une évolution de l'offre : du “many-to-many” vers le “one-to-few”, puis vers le fameux “one-to-one” dont on parle abondamment ces derniers temps. Une évolution symboliquement résumée par Gilles Venturi, cofondateur et directeur général de Soft Computing : « Durant de nombreuses années, le client se rendait chez un fournisseur, en partie grâce aux nombreuses “invitations” que ce dernier lançait. Aujourd'hui, avec Internet, le client passe très souvent devant ce même fournisseur, mais sans pour autant effectuer un acte d'achat. Il s'agit alors de trouver de nouvelles approches de prospection pour essayer de capitaliser sur toutes les occasions de contacts entrants. »

Fabrice Marc (Accenture) :

« Les coûts d'acquisition ont augmenté ces dernières années. En contrepartie, les taux de retour sont à la hausse et le ROI devient prépondérant. »

Même si les campagnes de communication massives, qui visent à séduire une grande partie des consommateurs, ont depuis longtemps montré leurs limites, elles sont néanmoins toujours présentes. « Dans la plupart des secteurs d'activité, pour essayer d'acquérir de nouveaux clients, l'arrosage général et systématique reste une réalité en dépit des taux de retour assez faibles, tout ce qui est pris n est, en effet, plus à prendre et cette offre fonctionne encore dans un grand nombre d'industries », souligne Emmanuel Jusserand, partner responsable CRM France d'Accenture. Depuis la fin des années quatre-vingt-dix, les évolutions technologiques ont permis aux directions marketing d'obtenir de précieuses informations sur leurs consommateurs, liées aux comportements d'achats.

L'ère de la connaissance client et l'analyse des achats contribuent fortement à développer la notion de ciblage. « Les coûts d'acquisition ont augmenté durant cette décennie mais, en contrepartie, les taux de retour sont à la hausse et le retour sur investissement devient prépondérant », précise Fabrice Marc, partner CRM chez Accenture.

Les bases de données jouent un rôle essentiel en tant qu'outil de prospection. « L'enjeu autour des BDD reste capital avec, notamment, un attrait croissant des bases liées à l'e-mailing. Une attirance qui, d'ailleurs, ne se concrétise par pour autant au détriment du média papier ; il s'agit davantage de complémentarité », indique Laurent Guesquier, responsable marketing client de Kompass. En revanche, le contact physique a diminué ces dix dernières années. « Les forces de vente gèrent une partie de leur activité commerciale par courrier électronique, ce qui donne paradoxalement une valeur supplémentaire à la rencontre en face-à-face », poursuit-il.

Avec l'avènement progressif d'Internet, on assiste à une forte accélération du phénomène de connaissance client et les taux d'acquisition deviennent très variables, fluctuant de 1 à 100. « La tendance est dépasser du non-nominatif au nominatif, c'est-à-dire de la création de trafic institutionnel à la capture du client sur le plan individuel. Une tendance qui a démarré il y a dix ans, mais qui s'accentue depuis deux ans », remarque Gilles Venturi.

Globalement, face à la multiplication des contacts entrants au sens large, les entreprises n'ont pas eu d'autre choix que de mettre en place des stratégies d'acquisition sur des techniques de segmentation, aidées en cela par les progrès des suites logicielles.

“L'intégration des canaux doit être améliorée”

Interview
Antoine Dumas, p-dg d'Acemis Conseil. d'Acemis Conseil.
Quelles ont été les grandes évolutions des techniques d'acquisition clients ces dernières années ?
Récemment les techniques d'acquisition ont été bouleversées par le développement de la Business Intelligence (Bl) qui a permis d'améliorer le ciblage des actions marketing. Le temps des grandes campagnes de communication peu ciblées a vécu en raison des taux de retour très faibles et ce, même si ces campagnes sont toujours aussi présentes, ce qui paraît paradoxal. La Bl a permis d'améliorer progressivement le ciblage, et donc de minorer le nombre d'envois par campagne (ou le nombre de contacts) et, en conséquence, de rendre plus performants les taux de rendement. L'autre grand phénomène, encore plus récent, se caractérise par la capacité des entreprises à transformer leurs propres clients en prescripteurs. Au-delà de la qualité intrinsèque du produit, la qualité du service déployé par l'entreprise va entraîner le client dans un rôle de prescripteur auprès d'un autre consommateur. Cette prescription peut même être considérée comme un canal à part entière. Enfin, l'intégration d'Internet dans la vie quotidienne a permis aux entreprises de mieux suivre les phases d'intérêt des clients grâce aux diverses solutions de collecte d'information sur ce média.
Que pensez-vous du rôle des canaux dans le processus d'acquisition ?
Même si rien ne remplace à ce jour la qualité du face-à-face, qui reste une constante, la relation à distance a pris une part très importante dans le volume des relations et dans le processus d'acquisition. En outre, on assiste à un certain rééquilibrage des canaux : après l'époque du courrier et du fax, la part du téléphone commence à plafonner au profit d'Internet, de l'email, du SMS ou du chat. Cependant, l'intégration des canaux doit être considérablement améliorée. On s'aperçoit en effet que la marge de progression reste très importante. Les entreprises connaissent souvent très bien leurs clients, mais les méthodes d'approche et d'acquisition des consommateurs ne sont pas mises en pratique, en raison d'un i manque d'organisation et de moyens financiers.
La marge de progression sur l'optimisation du panier moyen des clients est-elle importante ?
Par optimisation, il faut entendre augmenter le panier moyen, mais aussi minorer le coût de la relation avec le client. Il est donc nécessaire de savoir justement si cela “vaut le coût” d'entretenir une relation avec lui. L'optimisation passe également par la faculté des téléconseillers à non seulement gérer une durée de conversation moyenne en ayant les yeux rivés sur un compteur, mais aussi à varier leurs objectifs, la durée de conversation, afin de développer une interactivité avec les clients en fonction de leur valeur. Force est de reconnaître que l'on est loin de ce constat idéal ! Enfin, une optimisation du panier moyen passe par une bonne écoute du client, afin d'être capable de comprendre ses désirs et ses besoins.
Propos recueillis par J. P.

Tribal et viral se propagent

Autre grande tendance liée au développement du Web (notamment dans sa “version” 2.0) : le consommateur devient un élément aussi bien prescripteur que destructeur d'une marque. « Le phénomène de prescription s'est considérablement développé au fil des ans avec l'impact grandissant du Web et ses possibilités de communication », confirme Gilles Venturi. La valorisation ou la dévalorisation des produits/services auprès de clients potentiels sont étudiées de très près par les entreprises. On assiste ainsi, par exemple, à la création de blogs par centres d'intérêts pour lancer des communautés dans lesquelles les personnes parrainent leurs relations. Par ailleurs, la tendance aujourd'hui - ou du moins la volonté affichée par les directions marketing et services clients -, est de connaître les types de canaux, de médias et de messages à utiliser en fonction du profil des consommateurs. « Certaines industries sont plus ou moins en avance sur ces sujets, mais il est très difficile d'affirmer que la réussite est au rendez-vous en raison de la grande complexité de ces initiatives », constate Emmanuel Jusserand. Autre paramètre-clé : la maturité du marché. Acquérir les clients sur un marché nouveau et vierge d'une concurrence farouche est, bien sûr, facile. Mais si le marché est saturé, l'acquisition pure fait alors place à des problématiques de fidélisation, d'optimisation et de rétention.

La dimension technologique d'un secteur contribue également à modifier les rapports qu'une entreprise va devoir entretenir avec les consommateurs pour les convaincre de devenir clients. Autrement dit, l'acquisition sur un marché dans lequel les produits évoluent rapidement se différencie de celle d'un marché pour lequel cette évolution est beaucoup plus lente. Le secteur des solutions software des années quatre-vingt avait comme problématique essentielle la mise en place du service informatique. Dans 95% des cas, le développement était fait en interne. « Le directeur informatique passait alors son temps sur le hardware. Avec le développement de la notion de middleware, l'intérêt s'est progressivement déplacé vers la partie applicative, explique Jean-Marc Kuhlmann, vice-président Europe de l'Ouest et Afrique du Nord de Pivotai. Dès lors, les logiciel ont pu se développer. En parallèle, les services informatiques se sont rapprochés de la direction générale en tenant compte des problématiques de concurrence et de profitabilité. Et, bien avant les solutions CRM, sont apparus les outils de Business Intelligence qui ont grandement facilité les techniques d'acquisition. »

Retrouvez les précédentes enquêtes sur notre site internet RelationClientmag.fr

Fidéliser autrement

Il est couramment admis que conserver un client coûte dix fois moins cher que d'en acquérir un nouveau. C'est pourquoi il est primordial pour les entreprises de bâtir une relation client durable et cohérente. « Pour obtenir de bons résultats, les cycles de conquête sont de plus en plus coûteux et complexes », confirme Nicolas Zunz, coprésident de Publicis Dialog. Et la fidélisation devient omniprésente tout au long du cycle de vie du consommateur. « Son but est prioritairement de faire monter le client en puissance au fil de ce cycle », explique Andréa Micheaux, directrice associée d'AID. Et le Web a renforcé l'importance de la prise en compte de la “life time value” (valeur vie client). « Il a permis de libérer les programmes de fidélisation de certaines contraintes financières », insiste Nicolas Zunz. En même temps, Internet a engendré la nécessité de développer une cohérence entre la communication on et off line.

Pour fidéliser, programmes et cartes sont certes utiles, mais la qualité de l'offre reste le premier élément indispensable aux marques pour conserver leurs consommateurs. « Il existe des services et produits, ou même des ergonomies de produits, intrinsèquement fidélisants », précise Éric Falque, responsable mondial de l'activité CRM chez Bearing-Point.

Le professionnalisme du service clients intervient aussi comme facteur fidélisant. Aujourd'hui, les consommateurs attendent des marques un dialogue personnalisé. De plus, ils se mettent en quête de transparence et de sincérité. Le traitement de leur demande dans des délais appropriés constitue également un facteur de valorisation d'une entreprise par rapport à ses concurrents. « Aujourd'hui, on se trouve dans une dynamique de marketing relationnel. C'est le client qui va déclencher le contact commercial », souligne Serge Hauser, directeur général de The CRM Company. Pour autant, la fidélisation n'en reste pas moins un moyen de générer du chiffre d'affaires et, bien sûr, de rentabiliser les efforts d'acquisition client. Promotions, points fidélité, avantages exclusifs..., l'entreprise donne, mais attend également en retour. De la reconnaissance, puisque ce type de programme entend être un élément de différenciation dans un monde hyper concurrentiel, mais aussi une multiplication des actes d'achat. Aucune action en faveur de la fidélité des individus ne se veut totalement désintéressée. Le retour sur investissement fait l'objet de calculs poussés. Les modèles faisant preuve d'une faiblesse dans ce domaine sont d'ailleurs rapidement révisés.

Et, pour s'assurer des gains importants, mieux vaut bien étudier la population à laquelle on souhaite faire des largesses. En effet, une attention particulière est portée aux plus gros consommateurs. Une segmentation de la base de données assure de traiter de façon différenciée les clients au plus fort potentiel.

La panopolie idéale pour optimiser le panier moyen

- Un entrepôt de données ou une BDD marketing.
- Un outil de data mining.
- Un outil de gestion de campagnes marketing qui s'appuie sur un référentiel client unique afin d'orchestrer le choix des canaux à utiliser.

Au secours de la banalité

Les programmes de fidélité souffrent d'une forte tendance à la banalisation. Offres de Noël, célébration des anniversaires, newsletters, mise en place de mécanismes promotionnels... sont autant d'actes peu innovants. Néanmoins, séduire le client dans l'espoir de le retenir et de le faire consommer davantage étant un enjeu de taille, les moyens utilisés se sont transformés et sophistiqués. D'abord, les entreprises se fixent comme objectif de devancer les attentes clients. Et, plus les approches sont pertinentes, moins les destinataires ressentent la pression. La segmentation intervient alors dans l'objectif de prévoir le comportement à adopter pour contenter chaque catégorie de clients.

En termes de modes de contact nouveaux, le mobile, utilisé à bon escient, constitue un outil à la fois novateur et intéressant de communication sortante. En outre, les blogs, forums et autres espaces de communication ont largement influencé les outils de fidélisation. Ils poussent à créer un sentiment de satisfaction vis-à-vis de l'expérience client. Cette nouvelle forme de “bouche à oreille”, ces réseaux obligent les marques à insister davantage sur la qualité de leur lien avec les clients et, surtout, les invitent à engager une relation de confiance avec eux. En ce sens, le marketing viral a trouvé ses adeptes. « Dans tous les cas, l'objectif consiste à engendrer une fidélité affective », insiste Andréa Micheaux.

La mise en avant de liens entre la marque et son client permet aussi de créer un nouveau paradigme de fidélisation. Il s'agit de renforcer le poids de la marque et de créer un sentiment d'appartenance à celle-ci. Les deux parties se retrouvant autour de valeurs communes. D'un point de vue pratique, « le contrat relationnel définit ce que la marque doit ou peut apporter au consommateur », estime Serge Hauser. Dans cette optique, des sites relationnels réalisés par les marques ont vu le jour afin de permettre aux consommateurs de s'exprimer et d'échanger leurs points de vue. « Les marques n'ont plus peur de la capacité d'arbitrage qu'offre le Web. La transparence est de mise », atteste Nicolas Zunz. Pendant longtemps, proposer des services comme mode de fidélisation a été l'apanage des marques de luxe. Aujourd'hui, plusieurs enseignes se montrent désireuses de ne plus placer la relation client uniquement sur un volet transactionnel. C'est le cas, par exemple, de Darty ou encore de la SNCF. « Cumuler des points ne suffit plus au consommateur. En conséquence, les marques consentent des avantages en lien avec leur activité », explique Nicolas Zunz.

Optimiser le panier moyen

Parallèlement à la démarche de fidélisation, il est toujours possible de “jouer” sur le panier moyen du client. La faculté d'augmenter ce panier moyen s'appuie avant tout sur une segmentation et des scorings très tins générés par des outils de data mining. « L'objectif est de permettre l'enrichissement de la connaissance du client. Il est donc nécessaire de capitaliser sur les appels entrants pour rebondir, sachant que les mécanismes au sein des grands comptes sont en place de manière à proposer de nouveaux services/ produits pour le consommateur », constate Gilles Venturi. Attention cependant à ne pas tomber dans la surabondance d'offres proposées qui pourraient avoir l'effet contraire de celui espéré. En parallèle, la mise en place d'alertes sur des ruptures de comportement est souvent judicieuse. Cela permet, en effet, d'anticiper les éventuels départs.

@ (C) P. Lesage

Thierry Vallaud (Socio Logiciels)

L'hyper ciblage n'est pas forcément la bonne solution.

Multiplier les canaux

Par ailleurs, dans un but d'optimisation, l'idéal ne serait-il pas de proposer à un client, via les canaux qu'il utilise le plus fréquemment, les produits qu'il achète le plus régulièrement, accompagnés de réductions adaptées? « Il est nécessaire de garder une certaine logique et de trouver des articles fédérateurs qui vont plaire au plus grand nombre. L'“hyper ciblage” n'est pas forcément la bonne solution, constate Thierry Vallaud, responsable décisionnel et data mining de Socio Logiciels. Ce n'est pas parce qu'un client a acheté un produit une fois, qu'il le fera à plusieurs reprises. Il est donc important de savoir cibler les consommateurs par leur propension à consommer. Ce procédé fonctionne plutôt bien. D'ailleurs, le one-to-one est peut-être une méthode trop intrusive... »

Dans les faits, la complémentarité des canaux s'avère très efficace pour augmenter un panier moyen. « Suite à l'envoi d'un courrier, on peut programmer une relance téléphonique et une autre par email. Ce mécanisme, à base de canaux qui se complètent, possède de grandes chances d'augmenter l'efficacité du message », précise Laurent Guesquier. Par ailleurs, les outils décisionnels permettent de faciliter l'utilisation des contacts entrants. Ils agissent en temps réel de manière à aider le téléopérateur à optimiser l'offre de réponse et à faire de l'up selling. Et ce, quel que soit le média par lequel le client entre en contact avec l'entreprise. Mais aussi pertinentes soient les stratégies de fidélisation, il est parfois utile de mettre en place des cellules spécialisées dans la rétention, particulièrement au sein de marchés fortement concurrentiels, tels que les télécoms et les fournisseurs d'accès à Internet.

Encore faut-il savoir repérer les profils à risques et ne pas se contenter de faire uniquement attention à ceux qui évoquent leur dissidence envers la marque. Certaines sociétés poussent l'analyse jusqu'à établir des scorings en fonction du comportement de leur consommateur. « Il s'agit de balayer l'ensemble de la base de données clients et d'extraire les clients à risques pour pouvoir ensuite mettre en place des stratégies de rétention », explique Andrea Michaux. Cette approche prend en compte des éléments comme la diminution de l'usage, l'absence prolongée de contacts... En outre, grâce à cette mesure, les entreprises sont à même de déployer des efforts de rétention pro-actifs. Un avantage qui n'est pas des moindres, puisqu'un client manifestant son envie de quitter une marque change rarement d'avis. « L'enjeu se situe dans la capacité à identifier les individus en passe de se désengager vis-à-vis des entreprises », insiste Emmanuel Richard, directeur de l'activité conseil chez Activeo. Mais repérer ces personnes demande du temps et des moyens. De fait, choisir de favoriser les consommateurs les plus rentables (dont la life time value est la plus importante) paraît raisonnable. « Les mécanismes de rétention à actionner découlent fortement de la nature du profil clients », estime Éric Falque.

Nicolas zunz (Publicis Dialog) :

« Pour obtenir de bons résultats, les cycles de conquête sont de plus en plus coûteux et complexes. »

Évaluer le coût de la rétention

Encore faut-il disposer d'une segmentation fine de sa base de données, laquelle peut fournir un certain nombre d'indicateurs sur les efforts à consentir. Tous les clients n'ont pas le même potentiel. Les entreprises doivent évaluer le coût de la rétention et le comparer aux gains futurs escomptés. Et elles se focalisent, en conséquence, sur l'abandonnisme des consommateurs qui rapportent. Certaines catégories de clients ne sont et ne seront pas suffisamment profitables à terme pour mériter une attention. Les coûts de suivi et de relation s'avèrent trop importants par rapport aux bénéfices anticipés de la relation. D'autres consommateurs ne se trouvent pas dans le cœur de cible et, du coup, ne sont pas tellement relancés. « Aucun geste n'est consenti lorsque cette clientèle décide départir », explique Emmanuel Richard.

Néanmoins, peu de sociétés se penchent sur les motifs justifiant un départ. S'il paraît évident que le prix des produits et services ou encore leur qualité sont des déterminants forts du taux de churn, d'autres facteurs sont plus difficiles à saisir. Il s'agit notamment de tous les aspects liés au relationnel et à la considération ; le défaut de qualité de service jouant un rôle de plus en plus important à toutes les étapes du cycle client. Et puis, certaines entreprises ne tentent pas de maîtriser l'abandonnisme. Il s'agit, en particulier, de celles dont le recrutement de nouveaux clients est plus facile.

“La satisfaction d'aujourd'hui génère les profits de demain”

Interview Daniel Ray, professeur de marketing et directeur de l'Institut du Capital Client, Grenoble École de Management.

Quelle distinction effectuez-vous entre fidélisation et rétention ?
Dans tous les cas, la fidélisation et la rétention sont des aspects intimement liés. En effet, l'attitude inerte de certains consommateurs constitue le lien entre ces deux paradigmes. Dans tous les cas, le renouvellement de acte d achat témoigne de la fidélité d'un client. Malgré tout, celle-ci n'alimente pas nécessairement un cercle vertueux générateur de satisfaction, et donc de profit. Et puis, certaines entreprises se leurrent et pensent à tort faire de la fidélisation alors même qu'elles conservent, avec des subterfuges, des clients dans leur portefeuille.

Comment initier une fidélité effective ?
Il faut absolument générer un comportement de réachat. Ceci ne s'avère possible que si le consommateur développe une attitude positive vis-à-vis de la marque. Chaque entreprise doit absolument renforcer l'attachement de ses clients à ses marques. Il s'agit de créer un lien interpersonnel. Répondre aux attentes des clients, leur permettre d'échanger avec un interlocuteur unique, les impliquer grâce à la mise en place d'un club réuni pour améliorer les produits... Toutes les attentions dont la marque fait preuve sont bénéfiques pour favoriser une relation de confiance.

Finalement, quel comportement adopte un client fidèle ?
Il achète plus, et notamment consomme des produits de la marque auxquels il n'était pas habitué. En outre, comme l'entreprise le connaît bien, il devient moins onéreux de le servir promptement. Mais les gains qu'il génère ne s'arrêtent pas là. Il recommande les produits et engendre ainsi indirectement des profits. Enfin, il est “price premium”. L'entreprise peut choisir d'accroître ses tarifs, il continuera d'acheter.

Quelles difficultés rencontrent les entreprises dans la mise en place de stratégies de fidélisation ?
Les programmes doivent induire de la rentabilité rapidement. En trois mois, il faut des résultats, alors même que le relationnel se construit sur le long terme. En outre, pour que les diverses tentatives fonctionnent, elles doivent être claires et précises. Et puis, afin de conserver sa crédibilité, l'entreprise doit s'attacher à tenir ses engagements. Malgré tout, il ne faut pas qu'elle en néglige son coeur de métier. C'est basique, mais essentiel. La satisfaction d'aujourd'hui génère les profits de demain. La plupart des initiatives de fidélisation manquent d'originalité. Pour faire face à ce sentiment de banalisation, les marques peuvent s'adapter aux besoins spécifiques de leurs interlocuteurs pour gonfler leur life time value.
Propos recueillis par G. C.

Les vertus de l'écoute

Pour agir, les sociétés se contentent trop souvent d'une mesure de la satisfaction à un instant T. Pourtant, en effectuant une écoute active, elles pourraient être en mesure d'améliorer leur comportement et de saisir les points de mécontentement de leurs clients.

Parfois, la difficulté à suivre les causes de détachement des consommateurs s'explique par l'absence d'une connaissance client partagée et surtout centralisée. Recouper des informations, tenter de les comprendre, faire des analyses... constituent un pré-requis à la rétention. Pour l'ensemble des entreprises, les outils CRM doivent désormais permettre de prévoir les évolutions comportementales du client. Et le data mining a sa place dans les applications susceptibles de rendre accessible une anticipation du futur.

Au niveau des modalités, la rétention se matérialise bien souvent par la proposition d'une offre commerciale. Les entreprises partent du principe que les clients ne sont sensibles qu'aux primes. Chez certaines, des cellules entièrement dédiées à la rétention gèrent cette générosité. Toutefois, d'un conseiller à l'autre, le discours varie, même si l'entreprise tente de faire partager une culture et une compréhension communes. Il est censé coller au contexte. L'agent en contact avec le consommateur s'avère la personne la plus à même de cerner les attentes du mécontent. Pour Emmanuel Richard, « la rétention devrait être un état d'esprit constant » et non une préoccupation ponctuelle.

Elle prend parfois la forme d'un engagement à long terme. Le client peut alors se sentir enfermer dans un système qui ne lui convient pas. La banque, l'assurance, les FAI, les opérateurs de téléphonie mobile sont coutumiers de ces pratiques. « La création d'un lien difficile à rompre constitue une manière de créer une dépendance », estime Emmanuel Richard. Pour Thierry Valaud, les pratiques consistant à dresser des barrières à la sortie devraient progressivement disparaître et la concurrence devenir plus saine.

 
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Jérôme Pouponnot, Géraldine Caillet

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