DossierLes éditeurs affûtent leurs technologies au service de la relation client
1 - Mettre la technologie au service de l'engagement client
Rassembler les données éparses, contextualiser les offres, améliorer la performance... Les solutions logicielles évoluent vers une plus grande flexibilité et une conception de plus en plus holistique.
Face à des consommateurs de plus en plus exigeants et aux parcours imprévisibles, mieux vaut s'armer d'outils efficaces et cohérents pour acquérir ou sécuriser une vision client à 360°. Beaucoup de solutions proposées par les grands éditeurs, le plus souvent basées sur l'intelligence artificielle (IA), permettent de développer l'écoute multicanale, valoriser les interactions avec les clients et les fidéliser, gagner en agilité...
En France, 76% des professionnels de la vente considèrent que la gestion des opérations commerciales est de plus en plus importante et que la prise de décisions basées sur les données devient clé, rapporte le Focus sur les ventes 2020 publié mi-octobre par Salesforce. "Pourtant, seules 3% des données des entreprises sont utilisées à bon escient parce qu'elles restent silotées, difficiles à réconcilier et à rendre actionnables, explique Guillaume Aurine, directeur marketing produit France chez Salesforce. Une transformation digitale réussie doit miser sur l'excellence opérationnelle autour de l'écosystème, du client et des services connectés. 90 % des projets échouent car les deux premières briques n'ont pas été assez prises en compte."
Intelligence artificielle mais connectée client
Le premier défi consiste déjà à rassembler en un même lieu l'ensemble de la donnée sur les clients existants, les signaux que les individus laissent sur les propriétés de la marque ou ailleurs. "L'IA et le machine learning développent dans ce grand data lake une intelligence connectée et branchée sur la donnée client. Le collaborateur en contact avec le client ou le prospect peut alors recommander la prochaine meilleure interaction, en ligne ou sur le point de vente", témoigne Emmanuel Obadia, vice-président marketing chez Oracle Marketing Cloud Product.
L'éditeur déploie depuis peu chez ses clients des customer data platforms (CDP): "Ces plateformes très en vogue nettoient et analysent toutes les données et dégagent des éléments pour construire une segmentation beaucoup plus fine et intelligente, par exemple pour réengager le client en fonction de son niveau de loyauté, proposer une offre en fonction du contexte, promouvoir des ventes associées, cibler les dépenses médias...", ajoute-t-il.
Des solutions cloud et des plateformes de plus en plus intégrées concentrent les différents outils au coeur du réacteur. Chez Salesforce, la technologie d'intelligence artificielle Einstein réunit plus de 60 fonctionnalités et Expérience Cloud, l'outil de collaboration lancé à l'automne, a relié quatre technologies pour associer les clients, les partenaires et les employés.
Dynamics 365, l'outil de CRM de Microsoft, gère l'expérience client avec des modules dédiés aux différents métiers de l'entreprise, qui permettent aussi d'aller au-devant des besoins clients. Sa version Customer Insight anticipe les comportements et crée des propositions personnalisées en traitant et en analysant les données quel que soit l'endroit où elles se situent. Pegasystems prône une architecture "center-out", qui met les logiques métier au centre de l'architecture de l'entreprise. "En analysant chaque parcours client et cas d'usage, le client est exposé de manière uniforme à tous les canaux de communication et on transforme vraiment l'entreprise", affirme Sylvain Harault, directeur solutions senior Europe de l'Ouest.
Le framework transversal d'Adobe propose des contenus en fonction des cas d'usage, audite la qualité des process en place, alerte sur les anomalies... "Ce type d'assistant à la performance et à la pertinence va prendre de plus en plus d'importance, au fur et à mesure que le monde de la relation client va s'inspirer du monde industriel", estime Grégoire Pauty, Principal Strategist Business Innovation Design chez Adobe EMEA.
Pas encore mature en France, le workforce management améliore la performance tout en embarquant les collaborateurs dans la transformation. "Notre portail Webstation mesure l'impact positif d'un coaching ciblé sur une partie des effectifs ou dans des domaines pertinents, simplifie la planification des plages de travail... Les employés élaborent leur emploi du temps tout en respectant les exigences et les besoins de l'entreprise", note Guillaume Thuard, directeur marketing de Nice System pour l'Europe de l'Ouest et du Sud.
Simplifier les process
Combinée à l'IA et à l'analyse de la voix dans les outils de l'entreprise ou sur les interfaces conversationnelles, la robotique fait remonter les fiches client, va chercher les bonnes informations dans le CRM, actualise les informations dans toutes les applications... Le virtual coaching ou virtual telling facilite les interactions à distance. "Salesforce meeting s'intègre dans Zoom, récupère et rapatrie les informations d'une réunion pour mettre à jour le CRM de l'entreprise. Il est important de rendre les applications collaboratives et connectées pour que tout le monde utilise les informations collectées", fait valoir Guillaume Aurine.
La réalité mixte évite que les pannes ne perturbent trop longtemps l'expérience client. "Pour la gestion des chaînes de production, un logiciel fait appel à un dépanneur qui travaille à distance et montre au collaborateur l'endroit où il faut intervenir ou valide un nouvel équipement à distance", détaille Sophie Pietremont, directrice de l'entité Business Applications de Microsoft France.
Des technologies "low code" voire "no code" gèrent les différentes étapes des parcours clients sur un centre de contact ou au sein d'une application web. "Grâce au design thinking, on décrit un parcours tel qu'on souhaiterait qu'il soit vécu par le client, on maintient le contexte quand le parcours a été interrompu... Les parcours deviennent simples et fluides pour l'utilisateur. Les process sont centralisés et cohérents pour l'entreprise", assure Sylvain Harault. Les services clients proactifs peuvent même donner la main aux équipes métiers pour modifier les règles de leurs outils ou adapter les process d'une application en fonction de l'évolution des besoins. Plus besoin de retourner vers l'IT pour changer un script ou modifier un seuil d'approbation!
Ces applications low code sont aussi utiles pour fluidifier les échanges au sein d'une entreprise: "Microsoft Power Platform étire les outils de vente pour créer des liens entre un ancien et un nouveau système ou entre une maison mère et sa filiale qui ne travaillent pas sur les mêmes outils. L'application récupère par exemple les informations dans SAP en Allemagne et les intègre dans Dynamics en France", poursuit Sophie Pietremont.
Personnaliser les réponses à l'ère du "BtoMe"
À l'ère de l'hyper-personnalisation et du temps réel, les frontières entre BtoC et BtoB deviennent floues. "Le client veut surtout du BtoMe, affirme Emmanuel Obadia chez Oracle. Différentes briques permettent de sonder en temps réel le parcours du visiteur sur un site web, lancer des alertes et de l'AB Testing pour offrir en temps réel une expérience et un contenu les plus personnalisés." Avec Customer Empathy Advisor, solution basée sur l'analyse prédictive en temps réel, Pegasystems met en place des jeux de rétention spécifiques à un client, active le type de récompense auquel celui-ci sera le plus sensible. La fonctionnalité Value Finder permet à l'éditeur d'adresser des messages personnalisés aux clients les moins engagés: "Après une première action non mercantile, on recalcule le niveau d'empathie du client. Le taux de transformation est meilleur car l'offre est plus pertinente", constate Sylvain Harault.
Capter l'attention du client de manière simple reste un enjeu de taille. "Il faut pouvoir apporter en ligne autant d'émotions que dans le commerce physique car c'est un seul et même acte d'achat, note Grégoire Pauty d'Adobe. Dans les achats en ligne, la qualité du visuel compte pour 20% de la décision d'achat. Dès que l'on pousse le rapport à l'image, on peut rendre une expérience de commerce plus immersive. Un jour, on pourra sans doute passer de la vue au toucher, par exemple si les utilisateurs sont équipés du même type de gants que ceux qui existent déjà dans les jeux vidéo."
Aux États-Unis, des vestiaires avec des cabines en réalité mixte permettent déjà de répondre aux besoins ultra-personnalisés des clients. Les technologies n'ont en effet pas fini de révolutionner le monde de la relation client. L'arrivée de la 5G va permettre de faire exploser l'IoT et les échanges avec les interfaces conversationnelles. Une analyse plus poussée de la voix permettra de trier les priorités ou de mieux orienter un client vers un conseiller dans un centre d'appels. "On regarde de très près la blockchain, qui est un sujet très important pour lutter contre la contrefaçon dans le luxe ou sur la sécurité des pièces détachées dans l'aérien. Il n'est pas sûr que tout le monde soit prêt à passer à ce système, qu'il faut réussir à rendre simple", note Guillaume Aurine. Surtout depuis que la crise sanitaire a rebattu les priorités. Le marché est clairement en train de se recentrer sur l'engagement client!