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L'expérience client dans le monde se décline en multiculturel et avec saveur

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L'expérience client dans le monde se décline en multiculturel et avec saveur

Si l'expérience client est une préoccupation de plus en plus partagée, elle s'exprime différemment sur chacun des continents ou zones géographiques. Tour d'horizon des standards spécifiques à chaque pays et des innovations qui pourraient dépasser leurs frontières d'origine.

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La qualité de l'expérience client n'est pas seulement un élément clé de la performance business. Elle est aussi un marqueur culturel fort, qui traduit la considération que la marque porte à ses clients et les moyens qu'elle met en oeuvre pour les satisfaire. Aux États-Unis, la relation commerciale est basée sur la confiance et la qualité du service. Le Japon a inventé le concept d'Omotenashi, assez difficile à traduire, qui exprime une extrême hospitalité et la politesse due au client, accueilli comme un invité de marque lors de ses expériences shopping, pour un voyage ou dans ses démarches administratives. La Chine ne cesse de nous surprendre par son appétence pour les technologies. Les restaurants français ou italiens laissent des souvenirs mémorables chez les touristes du monde entier...

La dernière livraison de l'étude X Index de BETC Fullsix, réalisée avec OpinionWay et dont les résultats ont été révélés en mars 2021(1), met en lumière quelques spécificités nationales: 14% des Français et 15% des Américains sont particulièrement attentifs à ce que les marques tiennent leurs engagements au point d'en faire un des trois critères les plus discriminants de leur expérience client. Peut-être par un effet collatéral de la crise sanitaire et de la distanciation qui s'est souvent insérée dans la relation commerciale, l'attention et l'efficacité des vendeurs ont en revanche disparu des critères discriminants en Chine comme aux États-Unis. "La crise a réorienté les fondamentaux autour des valeurs et plus seulement autour d'éléments financiers ou marketing. Dans un monde partout de plus en plus digital, il faut pouvoir repenser le design, les contenus et les interactions pour pouvoir surprendre le client", avance Stéphanie Lafontaine, Lead Experience Design chez Accenture Interactive.

L'expérience XXL réussit à l'Asie

Les espaces commerciaux asiatiques traduisent déjà cette ambition. Dans le Department Store Ginza Six, ouvert à Tokyo en 2017, l'oeil du visiteur est attiré par des suspensions gigantesques d'artistes contemporains dans l'atrium ou des expositions d'oeuvres d'art digitales, par le théâtre nô du sous-sol et le jardin suspendu du dernier étage, ou encore le gigantesque espace culturel que proposent Tsutaya Books et Starbucks. Si le Miyashita Park abrite à son sommet un espace en plein air pour pratiquer différents sports urbains, des boutiques de luxe côtoient les marques de streetwear au niveau de la rue. Le projet Toranoman Azabudai, encore en construction, se déploiera quant à lui sur un quartier entier avec des appartements de luxe avec des balades commerciales qui créeront une sorte de jardin de Babylone contemporain.

Cette ouverture à d'autres secteurs comme l'hôtellerie, l'immobilier de bureau, le sport ou le divertissement est aussi explorée aux États-Unis où des malls cherchent à se réinventer sous des formes hybrides. Dans de nombreuses villes, ces symboles du mode de vie américain et de la consommation de masse ont commencé à péricliter à partir de la crise financière de 2008, concurrencés par l'e-commerce mais, sans doute aussi, du fait d'une expérience client trop pauvre ou datée. Pour permettre à ses clients de s'orienter plus facilement dans ses magasins -et d'y perdre trop de temps-, Walmart a conçu avec Fitch une application qui les guide vers le produit recherché, permet de vérifier son prix puis de passer en caisse en présentant son smartphone.

Les États-Unis toujours au centre d'expériences détonantes

Les consommateurs américains restent attachés à l'innovation et les grandes marques continuent de déployer dans ce pays leurs expériences les plus détonantes et désormais phygitales. Dans le concept de magasin connecté "House of Innovation", que Nike a inauguré en 2019 sur la 5e avenue à New York avant de le déployer à Shanghai puis Paris, le client est invité à utiliser l'application mobile Nike App pour demander les produits qu'il récupérera en cabine d'essayage, peut concevoir des modèles personnalisés, payer sur des tablettes tactiles...

Ce pays est aussi plus avancé que d'autres sur la personnalisation. Avant un lancement mondial en septembre 2021, c'est sur son e-shop américain qu'Yves Saint Laurent a lancé les préréservations de son offre Rouge sur mesure, basée sur le boîtier connecté Perso issu du Tech Incubateur de L'Oréal. En combinant trois cartouches du nuancier YSL, l'utilisatrice peut créer des milliers de teintes de rouge à lèvres personnalisées et les tester en selfie sur son smartphone via l'application associée.

L'Europe du Nord revient à l'essentiel

Les Scandinaves sont passés maîtres en matière de recyclage, d'écologie et de lutte contre le gaspillage. Leboncoin est d'ailleurs inspiré du site suédois Blocket, qui permettait dès 1996 aux habitants de la région de Skåne, dans le sud du pays, d'acheter et de vendre des objets à leurs voisins. Dans cette même veine de l'économie circulaire, ReTuna Återbruksgalleria revendique d'être le premier centre commercial dédié au recyclage, ouvert en 2015 et adossé à la municipalité d'une petite ville à une heure de Stockholm. Tout ce qui y est vendu provient d'un dépôt où sont rassemblés des produits jetés, donnés ou abandonnés, qui sont ensuite recyclés ou rénovés avant d'être remis en vente dans la quinzaine de boutiques du centre commercial. Celui-ci organise aussi des événements, workshops et conférences pour sensibiliser le public à l'économie circulaire et aux enjeux environnementaux. Un centre presque comme les autres qui accueille par ailleurs un restaurant bio et des pop-up stores. Ikea va y élire domicile pour proposer des meubles de seconde main, issus d'un magasin voisin.

Les États-Unis sont en avance sur l'usage commercial ou serviciel des drones, qui répondent à la demande croissante des clients pour des services rapides, même au-delà des centres-villes. Wing (filiale d'Alphabet) a ouvert la livraison par drone dans une zone rurale de la Virginie. UPS, qui teste ces solutions depuis 2019, a lancé en janvier 2021 avec l'opérateur télécom Verizon un service qui s'appuie sur la 5G et a permis d'assurer 3800 livraisons à 77000 retraités isolés de villages de Floride. Amazon Prime Air a aussi été autorisé à lancer des tests de livraison de colis par drone.

La Chine, zone test des nouvelles propositions

La frénésie des Chinois pour la consommation se vérifie presque rituellement à chaque 11.11 organisé par Alibaba. Ce pays est aussi l'un des plus avancés sur l'expérience consommateur: "La cocréation et l'open innovation sont poussées à l'extrême. Les clients sont invités à exprimer leurs besoins ou leurs idées sur les fonctionnalités d'un produit. Dès qu'il y a suffisamment de demandes, les marques lancent un prototype, ce qui renouvelle l'offre. Sauf dans l'univers du luxe, les Chinois privilégient d'abord les marques chinoises et, pour l'instant, le marché intérieur est suffisant pour qu'elles se développent. Dès que ce pays aura besoin ou envie d'ouvrir ses portes, nous verrons arriver toute une série de marques avec de nouvelles fonctionnalités", prédit Brice Auckenthaler, cofondateur et associé chez Tilt ideas by Kéa, société de conseil en innovation stratégique.

Répondre aux attentes des consommateurs chinois n'est pas simple, même pour les marques de luxe occidentales dont ils sont pourtant friands. "Ils attendent que la marque puisse personnaliser un produit, un service ou une communication et résonner avec leur culture. Il est donc important d'intégrer les dates clés du marché et d'adapter les messages à ce calendrier, mais aussi de travailler avec des personnalités locales à côté des égéries internationales", rappelait Pablo Mauron, CEO de Digital Luxury Group China, lors d'un workshop sur "La Chine et le luxe", organisé au printemps par Tmall Luxury (Alibaba).

Les consommateurs chinois préférant souvent faire confiance à leurs pairs, ils se fient aux Key Opinion Customers (KOC), qui témoignent de leurs retours d'expérience sur les plateformes sociales. Les Key Opinion Leaders (KOL) sont très importants dans la mise en avant des produits lors des sessions de live streaming, devenues aussi importantes que l'expérience shopping physique pour bon nombre de Chinois. Quand elles parviennent à trouver les bons relais, la bonne activation sur les différentes plateformes sociales et les influenceurs qui font mouche, les grandes marques de luxe trouvent en revanche dans ce pays une clientèle (forcément) nombreuse et un relais de croissance essentiel.

Par sa capacité à tester et adopter les innovations, ce pays constitue un formidable terrain de jeu pour les solutions d'expérience client ou collaborateur, et pour les nouveaux concepts commerciaux. Beaucoup d'entre eux s'appuient sur des innovations difficilement transposables hors des frontières chinoises, notamment lorsqu'elles s'appuient sur la reconnaissance faciale, mais la technologie n'est pas le seul levier que testent les marques dans l'empire du Milieu. En janvier dernier, L'Occitane a inauguré à Hong Kong son premier concept store #MEGA (Make Earth Green Again). Le concept de magasin 100% durable se traduit dans l'aménagement de la boutique, qui privilégie le carton et le bois, la présentation des produits avec plusieurs types d'emballage, une proposition de recyclage de flacons usagés sur laquelle s'appuie d'ailleurs le programme de fidélité.

Le "sans contact" gagne partout du terrain

Malgré les différences culturelles, la relation avec les marques, les besoins et les comportements des consommateurs du monde entier se lissent peu à peu. Boostée par le digital, l'instantanéité est une requête largement partagée à travers le monde. "Cette attente des clients a installé une sorte d'hystérie. La technologie aide à aller plus vite mais n'est jamais une fin en soi. Dans certains cas, par exemple lors d'un sinistre, la rapidité avec laquelle l'assureur répond à un irritant ou à un moment de vérité peut faire toute la différence pour le client et sur le marché", note Brice Auckenthaler. La start-up française Luko promettait déjà de gérer en deux heures les sinistres simples, grâce à une évaluation réalisée en vidéo ou via des envois de photos. Le partenariat noué avec l'acteur de paiement mobile Lydia a permis d'aller plus loin puisque le remboursement est devenu instantané, ce qu'aucun assureur traditionnel n'est en mesure de proposer.

Le paiement sans contact progresse aussi partout et pas seulement du fait de la pandémie. Dans beaucoup de pays, utiliser son mobile pour régler permet de contourner l'absence de carte bancaire. Des gouvernements le favorisent pour éviter la corruption avec le cash... Toutes sortes d'expériences se développent: Nestlé a lancé des machines à café commandées par smartphone en Russie et en Chine pour anticiper le retour au bureau. Au Japon, où les distributeurs automatiques de boissons sont omniprésents, Coca Cola a lancé un nouveau programme de fidélité Coke ON, dans lequel le client paie en flashant son mobile sur le distributeur. Le mobile étant associé à une carte de fidélité, le client récupère des gratifications assez élevées et la firme des données "maison" pour mieux connaître ses consommateurs.

Des technologies plus expérimentales sont aussi testées. L'Oréal a par exemple travaillé avec l'Ircam, institut de recherche sur l'acoustique et la musique associé au Centre Pompidou, autour d'un projet alliant intelligence artificielle et neurosciences pour traduire en sons la sensualité du parfum Spicebomb Infrared de la marque Viktor&Rolf, dont les notes épicées promettent de faire monter la température du corps. En quelque sorte, ressentir les effets du parfum sans jamais le sentir... "Une plateforme e-commerce peut parfaitement intégrer du son. Disposer d'un nuancier ou d'une grammaire sonore qui exprime les nuances d'un produit peut aider l'acheteur à se rendre compte de ses qualités ou caractéristiques et donner une nouvelle dimension à l'achat en ligne", souligne Stéphanie Lafontaine.

Au moment où les sites e-commerce du monde entier cherchent à recréer l'émotion de l'expérience en magasin dans les achats en ligne, le son pourrait peut-être ouvrir quelques perspectives!

(1) BETC Fullsix a déployé le X Index dans cinq pays (Chine, France, Inde, Royaume-Uni et États-Unis) et interrogé 28 000 clients sur plus de 250 marques

Du bon usage des plateformes chinoises

Rien à voir entre nos réseaux sociaux occidentaux, pour la plupart interdits en Chine, et les différentes plateformes qui permettent aux Chinois de s'informer, de se distraire, de commander un repas ou un produit de luxe. Les marques qui veulent se lancer sur ce marché de près de 1,5 milliard de consommateurs doivent apprendre à composer avec leurs spécificités et, surtout, à bien les intégrer dans leur tunnel de conversion pour proposer aux consommateurs chinois une expérience client à la hauteur de leurs attentes et de leurs habitudes. Weibo, la plateforme de micro-blogging qui permet aux Chinois d'être au courant de l'actualité locale ou internationale, est important pour faire des annonces, tandis que WeChat sert plutôt de canal de marketing direct pour envoyer des notifications, y compris avec des messages assez sophistiqués ou des histoires à part entière car on s'adresse à des audiences assez captives.

Sur Xiaohongshu ou RED, qui a explosé ses deux dernières années et dont l'audience est à 80% féminine, les internautes laissent des avis sur leur expérience avec une marque ou un produit. Douyin, alternative chinoise à TikTok, est devenu stratégique car il relaie les contenus avec des célébrités locales qui résonnent auprès d'une population très jeune. La plateforme Tmall d'Alibaba couvre de son côté l'intégralité du parcours consommateur.



 
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