5 clés pour déployer le Customer effort score
Efforts inutiles, irritants quotidiens, petites frustrations, malentendus... c'est en passant au crible tous les hiatus propres à plomber l'expérience client que le CES se démarque des indicateurs traditionnels. Encore faut-il activer les bonnes pratiques pour le déployer avec succès.
Au lieu de vouloir à tout prix "enchanter" vos clients, si vous minimisiez déjà leurs efforts dans leur relation avec votre marque? Né du constat qu'il est plus rentable, en termes de fidélisation, de faire bien et simple tout au long du parcours client, plutôt que de vouloir en faire trop en surpassant les attentes des consommateurs, le Customer effort score (CES) fait partie de ces nouveaux indicateurs qui révolutionnent l'univers actuel de la relation client.
Car depuis la publication, en 2010, d'un article de la Harvard Business Review qui plaçait le CES en tête des indicateurs prédictifs d'un achat renouvelé ou d'un montant plus important, devant le taux de satisfaction et le NPS (Net promoter score), les sociétés françaises sont toujours plus nombreuses à se pencher sur cet indice. Son intérêt premier? "Être corrélé à 100% à l'expérience client, en passant au crible tous les moments de vérité qui déclenchent l'adhésion, le retrait ou la frustration", explique Lidia Boutaghane, consultante stratégie client chez Clientaucoeur.
Dès lors, on comprend pourquoi l'AFRC, Association française de la relation client, a réalisé dès 2013 son premier baromètre sur l'effort client! L'édition 2015 a démontré que 60% des Français trouvent le parcours client plus simple qu'en 2014. Et quid de vos clients? Tour d'horizon des bonnes pratiques à adopter pour déployer avec succès un tel indicateur, aussi stratégique que complexe.
1 - Cartographier de A à Z le parcours client
Tous les experts sont formels: le CES doit s'intégrer dans une démarche de connaissance et de compréhension totale du parcours client. Et pour cause: "Mesurer l'effort induit par la souscription d'un crédit immobilier n'apporte pas grand-chose, si l'on n'est pas capable de savoir d'où vient exactement ledit effort: de la collecte des pièces demandées? Du manque de clarté des explications fournies par le conseiller? C'est pourquoi la connaissance des parcours est essentielle! Elle pourra être obtenue par une étude ad hoc, par observations ou entretiens, en recourant, le cas échéant, au web analytics", explique Patrice Mazoyer, président de Colorado Groupe, cabinet de conseil en relation client.
Cette cartographie approfondie du parcours client peut, d'ailleurs, provenir des clients eux-mêmes! "En effet, solliciter un panel de consommateurs peut aider à la conduite d'une telle démarche, bien plus complexe qu'il n'y paraît, estime Pierre Faure, COO France du cabinet GN Research, ce qui donne une vision plus neutre d'un tel parcours, qui prend d'abord en compte la perception et le vécu des clients."
2- Mesurer des éléments précis du parcours
Vous l'aurez compris, l'étude de l'effort est intrinsèquement liée à celle du parcours client. "D'où la nécessité d'axer son analyse sur des éléments précis du parcours plutôt que sur une perception uniquement globale mesurée à un moment arbitraire. Cela génère, in fine, des insights précis", explique Patrice Mazoyer (Colorado Group). S'il est recommandé d'introduire, d'entrée de jeu, une question globale concernant le CES pour avoir un ressenti global sur l'effort, reste à décliner l'analyse via des questions précises sur chaque étape-clé du parcours client (accéder à tel service, comprendre tel tarif, payer en ligne, etc.).
"Il convient de cibler en priorité les moments critiques mis en évidence lors d'enquêtes de satisfaction existantes ou au regard des infos disponibles en interne sur la connaissance client", poursuit Lidia Boutaghane (Clientaucoeur). Une telle priorisation des champs d'étude varie, bien entendu, selon la complexité du parcours et les moyens à disposition de l'entreprise pour mesurer, in fine, toutes les étapes sans se cantonner à l'analyse d'une ou deux interactions. "Plus une entreprise aura des clients en nombre, plus elle aura la possibilité de les solliciter séparément - selon leur profil - sur tel ou tel point de contact, sans avoir à mobiliser un grand nombre d'entre eux sur plusieurs interactions", indique David Galiana, spécialiste de l'expérience client chez Myfeelback.
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3- Interroger les clients à chaud
N'imaginez même pas déployer le CES sans satisfaire un prérequis et pas des moindres: capter la voix de vos clients très peu de temps après l'interaction à analyser! "En effet, la collecte de l'effort client repose sur son ressenti à chaud, d'où la nécessité de l'interroger en temps réel sur l'étape du parcours qu'il vient d'effectuer", indique Pierre Faure (GN Research).
Pour bien cantonner la mesure à l'objet de l'interaction, misez sur un questionnaire concis et efficace. "Car l'idée est bien de démultiplier l'exercice sur chaque point de contact problématique, un travail colossal", souligne Lidia Boutaghane, en rappelant l'intérêt de s'appuyer sur un cabinet pour mener à bien un tel projet.
Zoom: Transdev mise sur le CES pour la ligne Rhônexpress
Déployer le Customer effort score pour offrir à ses clients un service simplifié, fluide et instantané est le défi relevé par l'opérateur de transport Transdev via son programme T.ex (Transdev Expérience Client), lancé en 2014 avec l'appui du cabinet Colorado. "L'étude de l'effort s'est imposée comme le point d'orgue de ce programme, rappelle Marielle Villamaux, directrice commerciale de l'entreprise. Avec le CES, tous les irritants quotidiens ressentis par les passagers sont analysés sur le plan rationnel - ponctualité, disponibilité de l'information... - et émotionnel."
Mais pour implémenter une telle étude, encore faut-il convaincre, en amont, les clients institutionnels, donneurs d'ordre en matière de service de transport, dont le standard numéro un reste les enquêtes de satisfaction. Pour Rhônexpress, liaison ferroviaire reliant la Part-Dieu à l'aéroport Saint-Exupéry, Transdev fait valoir la pertinence du CES en testant avec succès la méthodologie. "Certes, l'étude de satisfaction affichait 95% de client satisfaits, et notre système de gestion des réclamations "Listen" révélait un taux bas, mais nos équipes souhaitaient creuser ces résultats via le score d'effort", note Marielle Villamaux.
L'entreprise a testé plusieurs approches avant de choisir la plus contributive au plan d'action et d'amélioration : des micromesures répétées sur des événements ciblés et un questionnaire simple, personnalisé par cible client et mis en place "à chaud". Dès mai 2015, le groupe conduit pas moins de 340 interviews en face à face aux stations du réseau. "L'étude a identifié sur la cible des clients occasionnels des efforts autour du "moment en station de départ", ce qui a amélioré le parcours via des tableaux d'information positionnés sur le cheminement vers la station, un accès aux quais facilité et la mise en avant de l'information multimodale en stations de départ."
4- Bétonner la méthode de calcul
Si l'étude de l'effort est pertinente, c'est parce qu'elle capte, en partie, les dimensions d'expérience client, dont elle est l'une des composantes-clés. "Bien plus riche et complet que le NPS, le CES induit donc un degré d'investissement fort en termes de mise en oeuvre, ne serait-ce que dans le déploiement du mode de calcul", confie Pierre Faure (GN Research).
Certes, une telle mesure paraît, à première vue, aisée, avec une question simple à poser du type: "quel niveau d'effort avez-vous dû déployer pour que votre demande soit traitée?" ou encore "à combien évaluez-vous l'effort que vous avez fourni pour valider votre commande?". "Le client est, alors, invité à répondre via une échelle de notation allant de 1, pour un niveau d'effort faible, à 5 pour un niveau d'effort élevé. L'idée est ensuite d'établir une moyenne sur toutes les réponses obtenues", développe David Galiana (Myfeelback).
Mais, dans la pratique, ce scénario se révèle plus complexe! "En effet, au-delà de l'intensité de l'effort, encore faut-il analyser la nature de l'effort mobilisé par le client pour faire affaire avec vous", avertit Pierre Faure, en rappelant qu'il existe au moins quatre catégories d'effort. À savoir: l'effort cognitif (la somme d'énergie mentale nécessaire pour faire un achat, une réservation, une sélection, etc.), temporel (combien de temps cela prend-il?), physique (quelle énergie physique doit être dépensée?) et émotionnel (les émotions positives et négatives ressenties). GN Research ajoute d'autres critères comme l'effort financier. Aussi, pour mener votre étude jusqu'à son terme, vous devrez analyser, le cas échéant, chacune de ces composantes sur chaque point de contact identifié.
5- Passer à l'action
Un des gros points forts du CES est qu'il aide à prendre rapidement des décisions opérationnelles en alertant sur tel ou tel parcours en place. Car une fois l'étude d'effort terminée, vous pourrez détecter directement "les étapes qui sont fluides - entre 1 et 2 - celles qui nécessitent un effort léger à significatif entre 2 et 3 - et celles demandant un effort important à très important - entre 3 et 5. Ainsi, l'entreprise sait immédiatement sur quels processus agir", poursuit David Galiana.
Vous l'aurez compris, contrairement au classique baromètre de satisfaction, le CES est une mesure bien plus "parlante", et donc plus apte à l'action, "et ce en nourrissant à court terme les plans d'action de simplification de la vie du client et en aidant à les prioriser", complète Patrice Mazoyer (Colorado Group). Grâce à ces actions correctives, vous pourrez proposer un nouveau parcours propre à rehausser la perception relative d'effort et, ainsi, booster la fidélisation client.
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