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DossierÉvolution des rémunérations et profils du secteur de la relation client

Publié par CHRISTINE MONTFORT le

1 - Des rémunérations portées par la montée en compétences

Si le recrutement de certains profils commence à connaître des pénuries, les salaires de la relation client peinent à décoller.

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La relation client est plus que jamais stratégique dans la gestion d'une marque et sa stratégie de fidélisation. Les entreprises n'hésitent donc plus à investir dans des profils aux compétences de plus en plus pointues, à même de déployer leurs ambitions commerciales et d'accompagner leur transformation digitale. Chacun à leur niveau, ils doivent prendre soin de clients qui disposent d'une palette de plus en plus large de points de contact, apporter les réponses les plus adaptées, déminer les points de friction... Et se montrer à la hauteur dans les moments de vérité, car la réponse apportée par ces services impacte directement l'expérience client et peut rejaillir fortement sur la réputation de la marque.

Dans ce secteur qui travaille sur l'humain, l'appétence pour le digital est désormais un prérequis, y compris pour des postes de directeur de la relation client (DRC) ou de l'expérience client, pourtant en charge de la stratégie de marque. "Dans la banque, on ne trouve presque plus de DRC à l'ancienne. Dans le e-commerce, on cherche aussi systématiquement des profils avec une bonne maîtrise des outils", observe Jacques Froissant, directeur général du cabinet Altaïde.

Les candidats accèdent généralement à ces fonctions après 10 à 15 ans d'expérience. "Ils peuvent démarrer plus tôt à condition d'être capables d'intégrer la dimension management sur des équipes de plus de 15 à 20 personnes et de résoudre tous les petits incidents informatiques, ou sur le CRM, qui bloquent les process et peuvent avoir des retombées importantes", ajoute-t-il. Plutôt orientées à la hausse, les rémunérations s'échelonnent entre 60 et 85K€ pour des profils entre 5 et 15 ans d'expérience, et de 70 à 130 K€ au-delà de 15 ans, avec une part variable de 10 à 25%(1).

Une plus grande proximité avec les fonctions logistiques

Les organisations devenant plus horizontales, les frontières entre l'administration des ventes (ADV), la relation client et la supply chain sont devenues "plus poreuses", constate Nicolas Bourgeois, consultant senior chez FED Supply: "Si la logistique est défaillante, c'est le service client qui gère les pots cassés! Les postes de directeur ADV deviennent de plus en plus des directeurs supply chain pour que toutes les parties prenantes aient un discours orienté client". D'autres facteurs expliquent les passerelles entre ces deux mondes.

Certains sont liés à l'organisation: si l'ADV et la logistique restent des services bien différenciés dans les grandes structures, ce n'est pas forcément le cas dans les entreprises plus petites, où les assistants ADV gèrent souvent la logistique. D'autres relèvent des caractéristiques métiers, auxquelles s'ajoutent des effets de conjoncture. "Une entreprise qui a du mal à trouver un assistant logistique junior pourra se tourner vers un assistant ADV avec deux ans d'expérience car le poste est assez similaire. Ces fonctions se rapprochent et travaillent parfois en binôme, alors qu'il était plus compliqué de faire le lien il y a quelques années", confirme Mounia Jafari, manager du bureau Hays de Strasbourg.

Tensions sur les assistants ADV

Avec le retour de la croissance, la fonction d'assistant ADV est de plus en plus recherchée et connaît même une pénurie de candidats. "Les entreprises cherchent toutes les mêmes profils et les candidats sont hyper sollicités. Beaucoup d'entre eux gèrent au même moment trois à quatre processus de recrutement. Les employeurs misent sur la personnalité du candidat. Ceux qui proposaient un premier poste en CDD recrutent de plus en plus directement en CDI. On voit plus de négociations sur les rémunérations, mais les candidats se décident aussi sur les avantages et le plan de carrière que propose la structure, et sur l'image de la marque qu'ils vont représenter", poursuit-elle.

Ces postes démarrent autour de 20 à 22K€ pour les juniors et évoluent rapidement à 25 ou 30K€, voire 28 à 32K€ si le candidat dispose d'une compétence linguistique. Ils vont jusqu'à 35K€ pour des gestionnaires grand compte. Les évolutions peuvent être assez rapides dès lors que les candidats présentent des compétences linguistiques ou maîtrisent les grands systèmes d'information (SAP, Divalto, Baan...).

Après deux ou trois ans d'expérience, les assistants ADV changent généralement de poste ou d'entreprise. Pour ce type de profil, prendre de nouvelles responsabilités est souvent le meilleur moyen de voir progresser la rémunération. "Ils peuvent devenir gestionnaire ADV sur des postes en lien avec la logistique, les documents douaniers ou un grand compte, gérer de l'import-export... Ils peuvent aussi évoluer vers des fonctions de responsable ADV ou de responsable service client", précise Sarah Muller, consultante principale de la division ADV du bureau Hays de Strasbourg. Les spécialisations sectorielles sont recherchées et définissent en grande partie les contours de la fonction. Dans les évolutions de carrière, certaines cartes de visite ouvrent davantage de portes que d'autres. "La compétence e-commerce est recherchée car elle mène vers des profils capables de répondre à la promesse de la marque. Quand on recrute un ADV qui a travaillé pour Amazon, on sait que l'on va avoir affaire à quelqu'un de précis", note Nicolas Bourgeois.

Si les supports clients qui gèrent les appels entrants parviennent généralement à trouver des candidats, il n'en va pas de même pour les profils qui doivent vendre au téléphone ou intervenir en support technique. "On commence à voir apparaître des tensions à Paris car beaucoup de start-up recrutent des commerciaux sédentaires. Les services clients ont vite fait de se faire piquer leurs bons éléments! Il est parfois judicieux d'installer ces équipes en région, où la pression est moins forte et où il est plus facile de conserver ses conseillers", détaille Jacques Froissant. Back Market, spécialisé dans le reconditionnement et la remise à neuf des produits, a ainsi ouvert à Bordeaux un bureau qui abrite entre autres des équipes en charge de la relation client et du coaching de ses marchands.


Savoir-être et adaptabilité

L'essor du e-commerce engendre mécaniquement une augmentation des litiges et sollicite de manière importante les services clients. Ceux-ci doivent pourtant veiller à garder une bonne qualité de service, par exemple avec des rappels à heure fixe, et adapter leurs réponses aux nouveaux standards des clients. "Plus les gens connaissent le processus logistique, plus les conseillers doivent être transparents, empathiques et force de proposition car le client attend une solution rapide, fait valoir Nicolas Bourgeois. Même dans le B to B, il est devenu normal de vouloir avoir des informations sur le parcours du colis et de bénéficier d'une relation client personnalisée". Les marketplace ont besoin de conseillers avec des compétences spécifiques pour gérer à la fois les fournisseurs et le client final. "Certaines personnes ne vont s'occuper que des fournisseurs, qui sont souvent des petits commerçants et ont besoin d'être guidés. Quand ils vendent sur la marketplace, ils s'engagent à respecter sa promesse commerciale. Dès qu'un délai n'est pas tenu, cela génère un double litige", explique-t-il.

Les entreprises les plus matures dans leur gestion de la relation client ont digitalisé leurs outils, notamment à travers des systèmes de self care et autres chatbot, et cherchent des compétences autour de la data, de l'intelligence artificielle ou de l'analyse du langage naturel. Les conseillers clients doivent s'approprier ces outils, apprendre à manier les messages écrits et vocaux liés à l'essor des SMS conversationnels et du Voice Messaging, naviguer dans les bases de données pour analyser le parcours client et apporter la réponse adaptée...

Dégagés des fonctions les plus simples et répétitives, ils répondent à des questions plus complexes, souvent en sortant des scripts préétablis, ce qui nécessite de bonnes qualités relationnelles: "Les entreprises sont très attentives au savoir-être des conseillers. Elles attendent un important niveau de qualité de la part de personnes qui doivent gérer un grand nombre d'appels, répondre aux questions ou aux soucis, et qui sont l'image de leur marque auprès des clients", rappelle Sarah Muller.

Mesurer la qualité perçue

Ces compétences sont autant de critères qui commencent à entrer dans le calcul de la rémunération: "Désormais, ces postes intègrent presque tous une part variable, à hauteur de 10 à 20% du salaire, soit des taux plus faibles que pour un commercial, où elle peut atteindre 15 à 40%. La rémunération variable est une bonne pratique car la mesure de la qualité est essentielle dans ce secteur et que l'on a besoin de mettre en place des critères de performance, souligne Fabien Lucron, directeur du développement de Primeum et conseil en rémunération variable. On mesure traditionnellement le nombre d'e-mails auxquels un conseiller a répondu et combien de dossiers ont été traités. Les indicateurs évoluent, on essaie de plus en plus d'apprécier la qualité perçue par le client final, par exemple à travers des enquêtes flash menées en fin d'appel."

Dans son Baromètre des KPI de la relation client(2), Easiware indique que les sociétés qui ont mis en place ces enquêtes de satisfaction ont un taux de réponse de 54,25 %. La preuve que lorsque les clients sont satisfaits d'une marque, ils n'hésitent pas à s'impliquer et à le faire savoir.

Les technologies gagnent aussi les magasins et changent la relation client. "Les vendeurs sont de plus en plus souvent équipés de tablettes ou de smartphones, encaissent directement les achats et peuvent vendre des produits qui ne sont pas proposés en magasin. On les forme sur des outils intuitifs avec des niveaux d'ergonomie faciles", note Jacques Froissant. Les cartes de fidélité téléchargées dans les téléphones mobiles permettent de reconnaître le client dès son entrée dans la boutique, ou d'envoyer une alerte lorsqu'il se rapproche d'une enseigne. "C'est une préoccupation de plus en plus importante, notamment pour les marques de luxe, qui essaient de développer des systèmes de fidélisation pour alerter les vendeurs sur les goûts du client, poursuit-il. Quand on va toujours dans la même boutique, le vendeur vous reconnaît. Il faut arriver à ce même résultat avec des clients qui se rendent dans différents magasins de la marque." Soit, au final, mettre l'innovation au service des fondamentaux du métier!

(1) PageGroup, Etude de rémunérations 2019

(2) Easiware / Amarc, Baromètre des KPI de la relation client, édition 2019


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