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LES ENSEIGNES DE DISTRIBUTION MISENT SUR LE CROSS CANAL

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Internet qui cannibaliserait le point de vente... Plus personne n'y croit vraiment. Aujourd'hui, les acteurs du commerce - distributeurs traditionnels et e-marchands - ne jurent plus que par le cross canal. Une nouvelle stratégie sur laquelle le cabinet de conseil BearingPoint a interrogé les principaux concernés.

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> CD, livres, vêtements, chaussures, lunettes, meubles, assurances... Aujourd'hui, tout se vend sur Internet. Pour autant, le Web n'a pas fait d'ombre à la distribution traditionnelle. Au contraire, l'expérience des dernières années a montré que les deux canaux sont complémentaires. Signe des temps, toutes les enseignes de la distribution traditionnelle se tournent vers l'e-commerce et certains pure players du Web marchand ouvrent des points de vente physiques. C'est le phénomène étudié par le cabinet de conseil BearingPoint dans sa troisième étude Retail*, réalisée en partenariat avec l'hebdomadaire LSA. Elle confrme que les différents canaux ne sont plus étanches. Les enseignes se mettent à l'heure du cross canal, car elles ont conscience que la maturité des consommateurs, qui échangent toutes sortes d'informations et d'avis critiques via le Web 2.0, impacte directement leurs ventes. D'ailleurs, 90 % des distributeurs interrogés constatent que les clients sont devenus plus exigeants, 81 % qu'ils sont aussi plus volatils et 7 2 % qu'ils sont plus friands de conseils. Pour Frédéric Caumont, manager chez BearingPoint et rapporteur de l'étude, il y a, dans ce phénomène, une opportunité pour les distributeurs, à condition qu'ils redeviennent maîtres du jeu: « Les distributeurs ne doivent plus subir, mais orienter le parcours client et réunir les conditions permettant au consommateur d'être à un clic, un mot, un mètre de l'achat. »

Des canaux poreux

Le cabinet BearingPoint a aussi interrogé les professionnels de la distribution sur les interactions entre les canaux. Il en ressort que 40 % des visites en magasin sont préparées en amont. Dans un cas sur trois, cette pré-étude se fait par la consultation de sites (comparatifs de prix, blogs, etc.). Le reste du temps, le client lit un catalogue ou sollicite l'avis de ses proches. Réciproquement, le point de vente devient le lieu de préparation de nombreux achats en ligne: le consommateur se rend en magasin pour voir, toucher ou essayer les produits qu'il achètera ensuite sur Internet.

BearingPoint s'est ensuite intéressé à efficacité comparée du Web et du magasin sur chacune des six étapes d'un parcours client: avant-vente conseil, avant-vente promotions, achat, suivi de dossiers, réclamation et collecte de données. Cette analyse révèle d'importantes disparités sectorielles. Dans la grande distribution alimentaire, par exemple, Internet apparaît comme un canal aussi efficace que le point de vente physique en avant-vente conseil et pour la collecte de données, et serait même considéré comme plus efficace pour les promotions et le suivi des dossiers. A contrario, dans le secteur de l'optique, le Web est perçu comme un canal moins efficace que le point de vente pour l'achat, le suivi de dossiers, les réclamations et la collecte de données. Pour Frédéric Caumont, « l'avantage concurrentiel doit venir de la juste combinaison des canaux entre eux ». L'étude propose quatre parcours client types - déterminés à partir de critères comme affinité du client à un canal, ses contraintes, son implication, les circonstances de l'achat - afin que chacun définisse le modèle qui correspond le mieux à son activité, et bâtisse sa propre stratégie cross canal (lire notre encadré page 8) .

Former les vendeurs

Au chapitre des recommandations, BearingPoint insiste également sur le rôle crucial des vendeurs, dont la mission consiste à transformer l'échange en vente. Pour 93 % des professionnels interrogés, le développement du cross canal a fait évoluer le rôle des vendeurs. Pour 80 % d'entre eux, ils devraient consacrer davantage de temps à la relation client et, d'ailleurs, recevoir une formation ad hoc. En parallèle, le point de vente se transforme et devient le lieu de convergence des canaux, avec l'introduction d'outils comme les bornes interactives ou les applications embarquées sur smartphones. Le magasin est aussi un point de distribution, avec le développement des services «clic & collect» , permettant aux clients de commander sur Internet et de venir retirer leurs achats chez un commerçant de proximité. Avec, au final, une double mission pour les vendeurs qui doivent, selon Frédéric Caumont, assumer deux fonctions: « une mission de conseil et de vente en magasin et une mission de contributeurs sur Internet ». Car le vrai risque du cross canal reste de perdre le client au moment où il change de canal. Une telle rupture dans le parcours client peut émaner des échanges qui ont lieu sur les réseaux sociaux ou sur les forums. « Les enseignes ne maîtrisent pas pleinement les informations qui circulent, même si elles s'efforcent, elles aussi, d'investir les blogs et les forums », commente Frédéric Caumont. Le «social commerce» - association du commerce électronique et des communautés virtuelles - a donc de beaux jours devant lui... Aux enseignes d'en tirer parti en guidant habilement le parcours client sans que ce dernier se sente agressé ou - pire manipulé.

Quatre parcours client: à vous de choisir le vôtre!

- Le parcours «sensoriel» convient lorsque le client est fortement impliqué dans l'achat et que le produit est simple. L'exemple typique est celui du parfum. Dans ce cas, BearingPoint préconise de mettre en scène le produit, en théâtralisant le point de vente et en soignant le design et l'esthétique du site web.
- Le parcours «assisté» fonctionne quand le client est fortement impliqué dans l'achat et que le produit est complexe et/ou technique: les lunettes de vue, par exemple. Dans ce cas, le distributeur gagne à s'appuyer sur sa force de vente présente en magasin (experts produits et conseillers clients), dont les compétences seront également valorisées sur le site internet.
- Le parcours «opportuniste» est basé sur une implication faible du client et une simplicité du produit. C'est le territoire des produits de très grande consommation: produits d'hygiène ou d'entretien, par exemple. Le distributeur doit alors mettre en avant la meilleure offre: prix compétitif, passage en caisse rapide, borne interactive et site internet pratique.
- Le parcours «informatif» correspond à une implication faible du client et à une complexité forte du produit. L'exemple type est celui de l'achat d'outillage à haute valeur ajoutée. La stratégie consiste à capitaliser sur l'information produit (fiches techniques, conseils, études), disponible en point de vente et sur Internet, avec intervention des vendeurs sur les blogs et forums.

Méthodologie

Cette enquête quantitative et qualitative a été réalisée en deux parties au cours des 2e et 3e trimestres 2009 et du 1er trimestre 2010. Elle a été menée en France, sur le terrain, par BearingPoint, auprès de plus de 100 professionnels du point de vente (dont de nombreux responsables de points de vente) issus de différents secteurs d'activité, qui ont été interrogés sur la réalité du concept de cross canal. Puis, BearingPoint s'est entretenu avec une quinzaine de décideurs de la distribution traditionnelle ou du Web marchand, lors d'entretiens en face-à-face.

Réactions

CHRISTIAN PIMONT, P-dg de Celio International
«Sur Internet, il est plus facile de valoriser l'innovation»

Pour le président de Celio, « les marques ne peuvent pas passer à côté de l'Internet. Il est impératif de créer une relation entre le magasin et le site. » Toute la difficulté étant de coordonner les deux discours: « Lorsque la marque s'exprime à travers deux canaux, elle doit dire la même chose. » C'est pourquoi le positionnement de Celio est identique dans les points de vente et sur le site web. Dans les deux cas, la marque se positionne comme celle qui réinterprète les tendances pour les rendre accessibles au plus grand nombre. La politique de prix est rigoureusement la même, seule change la manière de scénariser l'offre. « Il est beaucoup plus facile de présenter une innovation produit sur Internet qu'en magasin, univers bruyant qui ne se prête guère à la lecture », illustre Christian Pimont. En revanche, le point de vente dispose d'atouts indéniables, comme le salon d'essayage et le conseil du vendeur. « Chaque canal a donc son rôle à jouer au service d'un discours unique et cohérent », conclut le distributeur.

JEAN-PIERRE CHAMPION, P-dg de The Phone House
«Le consommateur veut s'informer sur Internet et finir son achat en magasin, le tout sans jamais perdre de temps»

Chez The Phone House, les ventes en ligne (ou celles issues du «clic & collect» ou du «clic & shop») pèsent de 15 à 20 % du chiffre d'affaires. C'est dire si l'approche cross canal est stratégique aux yeux de Jean-Pierre Champion, président-directeur général de l'enseigne de téléphonie. Pour lui, « c'est même la seule voie d'avenir dans ce secteur. Le point de vente reste irremplaçable pour voir le produit, le toucher et l'essayer, argumente-t-il. Mais le client a changé: il aime s'informer sur Internet et retirer son produit en magasin, le tout sans jamais perdre de temps. » Certes, ce mode de consommation a un coût: « Même s'il mixe les modes organisationnels (succursales, franchises...), le réseau physique ne suffit plus. Internet s'impose par sa souplesse - ce canal est disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 - et parce qu'il permet de faire la soudure entre les différents types de points de vente en complétant leurs stocks. »

 
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Véronique Méot

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