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CHOUCHOUTER SES MEILLEURS CLIENTS, TOUT UN ART...

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Les clients à forte valeur font l'objet des plus grandes attentions de la part des enseignes: statut, services premium, animations, etc. A l'heure où la fidélité est de plus en plus volatile et où la relation client devient un argument de vente, certaines marques prennent le parti de considérer tous leurs clients comme des VIP.

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@ ©fotolia/ld

80 % du chiffre d'affaires d'une entreprise sont réalisés par 20 % de ses clients, selon la loi de Pareto Loi empirique inspirée par les observations de l'économiste et sociologue Vilfredo Pareto, aussi appelée loi des 80/20 . Dans un contexte de concurrence accrue par la crise économique et une offre pléthorique sur Internet, la loi de l'économiste italien revient en force. Fidéliser les meilleurs clients devient un enjeu commercial et financier stratégique. En la matière, pas de recette miracle. Il y a bien les programmes de fidélisation, mais... ils sont tellement légions - 84 % des grandes marques en proposent, selon Vertone - que leurs bénéficiaires ne se sentent plus vraiment privilégiés. D'ailleurs, quel client doit être particulièrement choyé? Dans certaines entreprises, le privilège est calculé en fonction du montant des achats. Après ses cartes Sephora White (au premier passage en caisse) et Sephora Black (dès le quatrième achat) , Sephora délivre, à partir d'un certain montant, une carte gold. Même chose au Club Med, avec la création, en 2009 , du programme Great Members qui, outre les «statuts» turquoise et silver, attribue un statut gold au foyer ayant au moins passé 180 jours en village ou dépensé 32000 euros au cours des trois dernières années. Pourtant, si l'on en croit le sondage réalisé par Init/ Easy Panel Sondage Init/Easy Panel - avril. 2011 , les programmes fondés sur le montant des achats trouvent leurs limites. 83 % des Français souhaitent que leur fréquence d'achat soit prise en compte et que leur ancienneté soit récompensée chaque année. Chez les VADistes, depuis l'origine, c'est le critère qui prévaut. Chez France Loisirs, par exemple, au bout de trois ans, la carte de l'adhérent (3 millions en France) change de couleur (du bleu à l'or) et bénéficie ainsi d'avantages spécifiques: réductions supplémentaires, offres commerciales particulières et ligne téléphonique dédiée.

Qu'il soit déterminé en fonction de son ancienneté ou de son niveau de dépenses, le bon client n'attend pas tant des avantages transactionnels que des services, à l'image de la Carte One de la Fnac , lancée en 2009 . Ses 50 000 membres bénéficient d'un accueil privilégié: conseils en magasin, caisses réservées, numéro de téléphone dédié, soirées privées pour éviter la foule ou découvrir des produits en avant-première...

Certaines enseignes ont toutefois décidé de ne privilégier ni le montant des achats ni l'historique des clients. Elles s'attachent à leur réserver le même traitement, voire à tous les considérer comme des VIP une démarche largement inspirée de l'univers du luxe (voir encadré page 30). Vente Privée, le site web de déstockage, explique ainsi que tous ses membres - 14 millions en Europe - bénéficient d'une attention privilégiée. « Au-delà de sept jours de délai légal de rétraction, nous reprenons le produit. Nous considérons que le client a, par essence, raison, et que nous lui faisons confiance », explique Laurent Tupin, directeur de la relation avec les membres.

VISA, UNE HISTOIRE DE STATUT

Après les cartes Premier et Infinite, Visa propose maintenant la Platinum. Objectif de cette marque qui détient 80 % du marché des cartes premium? Satisfaire les 20 à 25 % de porteurs de la carte Premier qui, selon l'opérateur, regretteraient la démocratisation de leur carte. Au fi l des années, les conditions d'octroi de ce produit, créé en 1986 pour une clientèle aisée voyageant beaucoup, se sont en effet assouplies au point de compter aujourd'hui plus de 4 millions de détenteurs. Produit «moyen/haut», la Platinum cible les personnes dont les revenus mensuels atteignent entre 3 000 et 6 500 euros nets par mois et qui utilisent souvent leur carte pour des montants supérieurs à 1 500 euros mensuels. Elle donne accès à des plafonds de paiement et de retrait plus élevés et à des garanties d'assurances et d'assistance plus importantes que la Premier. Mais, le coeur de l'offre repose sur le bouquet «Carré Platinum», mélange de services, conseils et avantages dans quatre domaines (voyage, gourmet, pratique et événements) proposés par un réseau de partenaires-prestataires spécialisés. « La dimension de services est importante: nous estimons que cela fidélise les porteurs de cartes », explique Emmanuel Robert, directeur marketing de Visa. Une fois la connaissance client acquise, Visa compte envoyer des offres personnalisées.
En 2003, la marque avait déjà créé la carte Infinite, vite surnommée «carte noire» (du fait de son visuel unique quelle que soit la banque) destinée à un positionnement «éminemment statutaire» et très haut de gamme, avec une cotisation annuelle de 280 à 320 euros et seulement 140 000 détenteurs en France.

Chez Canal+ et Canalsat, les 12 millions d'abonnés bénéficient tous du même programme de fidélisation gratuit: « invitations à des spectacles, avant-premières, émissions, ou contribution aux programmes pour prolonger l'expérience de nos abonnés », détaille Olivier Le Gallo, directeur des services clients. Même philosophie du «tous VIP», mais, cette fois-ci, très axée sur la personnalisation (fondée sur la connaissance de l'historique des achats et l'écoute) , chez Nespresso. Celle qui se présente comme une marque de luxe veut proposer à chacun des membres de son Club (10 millions dans une cinquantaine de pays) , un service quasi unique. « Deux membres peuvent présenter exactement le même profil de consommation, mais entretenir une relation complètement différente avec la marque: l'un n'aura pas envie d'être accompagné ; l'autre, au contraire, sera ouvert au conseil. Nous sommes complètement à leur écoute et nous nous adaptons à chaque client», raconte Julien Morel, directeur de la relation client à distance. Chez Canal+ et Canalsat, comme chez Nespresso, on mise sur l'innovation des services offerts. La chaîne de télévision propose catch upTY enregistrement à distance, images en haute définition, accès aux chaînes sur tous les supports (PC, smartphones, tablettes). Nespresso, elle, propose de retirer en magasin une commande passée une heure plus tôt par Internet ou téléphone, un numéro vert accessible 7j/7 , 24h/24 en cas de panne de matériel, la livraison à domicile sur rendez- vous à Paris, Marseille et Lyon, sans oublier la puce de la carte de fi délité qui permet d'être instantanément reconnu en magasin. Dernière innovation en date dans sa boutique de la Madeleine à Paris: le client remplit un sac et passe sous un portique, le montant de sa commande est automatiquement calculé... Autant de services qui permettent aux clients Nespresso de gagner du temps. « Aujourd'hui, pour la clientèle premium, la vraie valeur ajoutée, c'est le gain de temps », constate Tanguy de Laubier, dg de BlueLink. C'est ce qui a motivé Parnasse, la marque d'Orange réservée à la clientèle haut de gamme, à proposer à ses VIP les services de la conciergerie privée John Paul. Pour 100 euros par mois (voir le Zoom sur page 40): le client peut obtenir conseils et réservations de voyages, restaurants, spectacles et être dépanné pour les services du quotidien (taxi, nounou, etc.).

Au final, il s'agit toujours de répondre aux besoins des consommateurs: proposer des services qui leur facilitent la vie. Et pour y parvenir, il faut aimer son métier, aimer ses clients et avoir envie de leur faire plaisir.

LE TRAITEMENT TELEPHONIQUE: VIP AUSSI

Si l'on croit l'Observatoire des Services Clients Viséo Conseil/BVA, 75 % des Français seraient prêts à quitter une entreprise si le service les décevait. Et 77 % considèrent que la qualité du service client contacté pourrait les influencer dans leur décision d'achat ou de rachat. C'est pourquoi le téléphone - canal de la relation client à distance utilisé par 80 % des consommateurs - fait l'objet de soins particuliers. Les clients premium de certaines enseignes bénéficient ainsi d'un service spécifique: un numéro de téléphone dédié ou un routage «intelligent» vers des téléconseillers haut de gamme et une accessibilité plus grande: plages horaires élargies, taux de décrocher maximum et temps d'attente minimum. L'accueil est également personnalisé et tourné vers l'écoute: le téléacteur dispose d'un temps de traitement plus long, et en général, d'une plus grande latitude pour résoudre le souci de son interlocuteur. Il peut, notamment, utiliser une grille de gestes commerciaux en réparation d'un préjudice. Si le téléconseiller ne peut satisfaire immédiatement la demande, il propose au client de le rappeler et s'assure de la résolution de son problème par un suivi quotidien de son dossier, en tenant le client informé via un canal défi ni avec lui (mail, SMS, appel). Le client VIP a ainsi un interlocuteur unique dédié. En cas de réclamation écrite, le téléconseiller appelle le consommateur pour vérifier qu'il a bien compris la nature de sa demande... «Une fois le problème résolu, le conseiller doit expliquer au client que, compte tenu de son attachement à la marque, il a bénéficié d'un traitement spécifique...», conseille Eric Hénaff, responsable de l'amélioration continue de Sitel. Dans ce process, le client premium n'a, en effet, pas toujours conscience d'être un VIP!

LE CLIENT PREMIUM À L'ÉTRANGER

«Aujourd'hui, il y a une telle diversité de l'offre et une telle concurrence, que les enseignes chouchoutent même les clients qui ne dépensent pas beaucoup», constate Patrick Russo, directeur de la communication et de la stratégie des marques de LaSer, maison mère de 5One, qui travaille sur la segmentation et la fidélisation en France et à l'étranger (États-Unis, Grande- Bretagne, Afrique du Sud). À l'étranger, l'une des tendances consiste à récompenser le nombre de passages en caisse, signe d'une affinité entre le consommateur et l'enseigne. Certes, il existe toujours une reconnaissance des meilleurs clients, liée au montant d'achat, comme le fait le grand magasin Saks à New York (cartes Saksfirst Premier, Elite, Platinum, Diamond). «Les deux démarches ne sont pas antinomiques, précise Patrick Russo. Les clients choisissent Saks parce qu'ils ont déjà une affinité avec le magasin!» À une segmentation fondée sur le montant des dépenses, des enseignes prennent aussi en compte le mode de vie. En Afrique du Sud, la chaîne de magasins WoolWorths, équivalent de Monoprix en France, a identifié, sous l'impulsion de LaSer 5One, une petite dizaine de «lifestyles»: la jeune maman dynamique qui ne veut pas s'embêter avec les courses, le jeune citadin qui sort beaucoup et aime les nouvelles technologies... Cette segmentation permet à l'enseigne d'animer son offre et ses services en fonction de la cible. Elle a ainsi identifié qu'il lui fallait étoffer son rayon bébés/enfants avec de nouveaux produits et services et créer un catalogue destiné aux jeunes parents. Le succès était au rendez-vous puisque le chiffre d'affaires a augmenté.

CE QUI FAIT LE LUXE, C'EST L'INDIVIDUALISATION

François-Xavier Poels, président fondateur d'Approche sur mesure, outsourceur, spécialiste de la relation client pour les marques de luxe.
«Dans le luxe, il y a trois grandes familles: l'horlogerie et la joaillerie, la mode et la maroquinerie, et la cosmétique. Les marques utilisent peu la segmentation: la plupart n'ont pas de politique ciblée en fonction des clients. Ce n'est pas leur philosophie: les marques considèrent tous leurs clients comme des VIP... y compris le consommateur qui achètera, une seule fois dans sa vie, un de leurs produits! Quand j'ai commencé dans l'outsourcing, en 1998, il n'était pas imaginable d'utiliser le téléphone pour des appels sortants: c'était considéré comme un moyen de communication vulgaire. Les mentalités évoluent. Aujourd'hui, l'outsourcing permet de faire de l'extrême personnalisation, en coordination avec la boutique. Par exemple, quand un nouveau modèle de montres est sur le point de sortir, nous appelons les collectionneurs et en général, nos interlocuteurs nous remercient et nous demandent de leur mettre le produit de côté... Autrefois, c'était le vendeur du magasin qui contactait directement ses meilleurs clients. Aujourd'hui, nous avons les moyens de passer davantage d'appels et, notamment, de gérer les lignes d'attente. En réalité, ce qui fait le luxe, c'est la personnalisation et l'individualisation.»

 
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FLORENCE GUERNALEC

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