[Tribune] Relation client: ne vous trompez pas d'indicateur!
Il importe de ne pas confondre mesure d'activité et KPI pour mesurer la performance de ses équipes dédiées à la relation client, selon Patrice Orenes-Lerma, directeur marketing de Diabolocom.
Je m'abonneDans le monde de l'entreprise, les chiffres sont partout. En témoigne la mise en place, dans tous les services et à tous les niveaux de l'organisation, d'indicateurs de performance clés, ou KPI, permettant au management d'avoir une vue d'ensemble des résultats de chaque entité par rapport aux objectifs fixés.
Le service client n'échappe évidemment pas à cette logique et les données produites par le centre de contact sont mises à contribution pour quantifier le niveau de satisfaction des clients. Si les données existent, ce n'est pas pour autant chose facile. D'une part, les directions générales voient encore souvent le service client comme un coût, ce qui oblige ce dernier à se justifier et à démontrer que les moyens qui lui sont alloués produisent les résultats escomptés. D'autre part, la satisfaction client étant une notion complexe et hautement qualitative, elle est par nature beaucoup plus difficile à mesurer que des éléments factuels comme les ventes ou le nombre de vues d'une campagne marketing. C'est pourquoi les KPI doivent être choisis avec soin.
Les mesures d'activité ne sont pas des KPI
Le chiffre que tout responsable de centre de contact connaît et a constamment à l'esprit est le nombre d'appels reçus. Mais, sauf à en faire un enjeu en soi -en se donnant par exemple pour objectif explicite de le réduire- ce chiffre est neutre. C'est une mesure purement quantitative qui, certes, donne une idée de la taille du centre de contact et de sa capacité de traitement potentielle, mais qui ne dit rien de la qualité de service délivrée par ce centre. Ce qui importe vraiment, c'est de savoir si ces demandes sont traitées de manière satisfaisante pour les clients.
Des chiffres tels que le volume d'appels ou le nombre de minutes d'appels ne sont pas des KPI et ne doivent pas être considérés comme tels. Ils sont en revanche indispensables pour planifier et gérer les effectifs. Ce sont eux qui permettent au responsable du centre de s'assurer que le nombre d'agents est toujours suffisant pour absorber la charge et que le temps d'attente des appelants est réduit au minimum -ces deux dimensions étant déterminantes pour la qualité de service délivrée et perçue.
À partir des statistiques d'activité, il est possible de s'organiser pour que l'appelant moyen n'attende qu'un laps de temps limité avant de pouvoir parler à un agent. La règle 80-20 (répondre à 80% des appels dans les 20 secondes) peut être utilisée comme point de repère pour dimensionner les équipes. Mais pour une planification optimale, il faut également tenir compte des particularités de l'entreprise, de la complexité des demandes traitées et de la durée moyenne d'un appel. C'est au responsable qu'il appartient de définir les temps d'attente et délais de réponse sur les différents canaux de contact proposés, sachant qu'il existe des normes implicites plutôt exigeantes. Pour les demandes par e-mail, par exemple, le délai de réponse optimal du point de vue du client est aujourd'hui proche de 24 heures. Le chat et les réseaux sociaux appellent pour leur part des réponses très rapides, voire quasi immédiates. Avant d'ouvrir ces canaux, il est donc important de s'assurer d'avoir le nombre d'agents nécessaire pour répondre aussi vite que s'y attendent les clients.
Moins d'indicateurs, c'est mieux!
Pour une analyse efficace du service client, il faut pouvoir s'appuyer sur des données complètes et cohérentes. Or, très souvent, les données sont stockées dans des silos cloisonnés, existent en double ou en triple et diffèrent selon si elles se trouvent dans le système de téléphonie, la solution de gestion des interactions ou le CRM, pouvant alors fausser les chiffres et conduire à des analyses erronées. Les entreprises pouvant intégrer leur solution de gestion des interactions client avec leur CRM bénéficient d'un avantage certain.
Si dans le passé, les managers de centre de contact ne disposaient que de données limitées fournies par le système de téléphonie, ils peuvent désormais répondre à toutes les questions qu'ils se posent sur leur activité: quel est le nombre de problèmes résolus dès le premier contact? Combien de temps les clients attendent-ils en moyenne jusqu'à ce que leur problème soit résolu? Combien de contacts cela nécessite-t-il? Pouvoir répondre facilement à ces questions est un atout précieux pour piloter un centre de contact et maximiser sa productivité. Mais se limiter à ces indicateurs opérationnels ne répond pas à la question la plus importante: les clients sont-ils satisfaits du service qu'ils ont reçu? Il ne faut pas se tromper d'objectif: un temps de réaction exceptionnel n'est pas très utile si le client est mis en relation avec un agent qui n'a pas les compétences requises pour résoudre son problème.
Mesurer la satisfaction des clients à l'issue d'une interaction avec le service client fait désormais partie des bonnes pratiques. Attention toutefois à ne pas leur poser trop souvent les mêmes questions et à ne pas leur soumettre des questionnaires trop longs. Des enquêtes standardisées permettant de calculer des KPI donnent de bons résultats mais avant de les utiliser, il est important de s'interroger sur leur pertinence pour le marché sur lequel l'entreprise opère et sur ce qu'elle souhaite vraiment mesurer.
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Multiplier les KPI ne sert à rien si ces indicateurs ne fournissent pas des informations fiables et exploitables. Il semble primordial d'examiner chaque KPI individuellement et de se demander ce qu'il peut apprendre d'utile sur la performance et la qualité du service client. La meilleure solution est de limiter le tableau de bord à un petit nombre KPI et d'utiliser les enquêtes pour avoir le point de vue et le ressenti des clients. L'entreprise doit être capable d'expliquer clairement à quoi correspond chacun de ces indicateurs, ce qu'il apporte et quel rôle il joue dans la vue d'ensemble.
La mesure de la satisfaction client doit être une priorité
Les KPIs éclairent sur les opérations en permettant de savoir si les performances se sont améliorées ou détériorées, et comment se situe l'entreprise par rapport à ses concurrents. Ils mettent en lumière les aspects du service client qui fonctionnent et ceux qui doivent être améliorés. Ce qu'ils ne peuvent pas donner, c'est la recette du service client idéal du point de vue des clients.
Pour cela, il n'y a pas de secret: se mettre à la place de ces derniers et penser en termes de parcours client afin de concevoir une expérience globale qui, correspondant à leurs attentes ou les surpassant, emporte leur satisfaction. Il est aujourd'hui démontré qu'un niveau de satisfaction client élevé contribue à la fidélisation des clients et a, par là même, un impact significatif sur la performance financière de l'entreprise. La mesure de cette satisfaction client est donc naturellement une priorité et les KPI associés peuvent documenter les succès et être rassurants; ils doivent surtout servir à identifier les axes d'amélioration.
Patrice Orenes-Lerma est directeur marketing de Diabolocom. Diplômé de l'École nationale supérieure des Mines de Saint-Étienne et de la Sorbonne, Patrice Orenes-Lerma a débuté sa carrière dans le conseil informatique en tant que consultant senior chez Unilog Management, avant de rejoindre Ile-de-France Mobilités (anciennement le STIF) au poste de chef de projet IT. C'est en 2010 qu'il intègre Arval, une filiale de BNP Paribas, où il travaille sur les projets de transformation des filiales internationales. En 2013, il rejoint l'éditeur Bonitasoft au poste de responsable monde du programme Demand Generation. Depuis mai 2018, Patrice Orenes-Lerma est directeur marketing de Diabolocom. À ce titre, il est en charge du développement de l'activité marketing de l'entreprise.