DossierAllier performance et qualité de vie au travail
La qualité de l'aménagement et de l'équipement du poste de travail est essentielle à la performance des téléconseillers. Les centres de contacts l'ont bien compris et font de nombreux efforts pour adopter les innovations qui améliorent les conditions de travail des équipes.
Sommaire
- La qualité du matériel, un enjeu-clé pour les téléconseillers
- Amortir ou annuler les bruits
- Des technologies de pointe embarquées dans les micro-casques
- Les superviseurs gagent en mobilité grâce au sans fil
- Des espaces plus diversifiés
- Les positions de travail dynamiques se développent lentement...
- Ateliers et formations pour adopter les bonnes postures
1 La qualité du matériel, un enjeu-clé pour les téléconseillers
Portés par la mutation des technologies et l'élargissement de leurs missions, les centres de contacts se sont beaucoup transformés, y compris en ce qui concerne l'équipement des postes de travail des téléconseillers. Les fondamentaux n'ont pourtant pas été révolutionnés: "Les centres de contacts continuent d'accueillir un nombre important de conseillers qui sont tous au téléphone en même temps. Le métier a beaucoup évolué, mais les applications métier sont restées assez stables et les besoins de mobilité plutôt faibles", observe Jean-Baptiste Pain, directeur général Benelux, Europe du Sud, Moyen-Orient et Afrique chez Jabra, qui équipe bon nombre de centres de contacts en casques et solutions audio. Les donneurs d'ordre attendent des outsourceurs le même niveau de qualité que ceux de leurs propres centres. "On se rapproche de leurs conditions de travail. Les plateaux sont tous aux couleurs de nos clients pour que les conseillers s'identifient à la marque pour laquelle ils travaillent", poursuit Yann Barbin, directeur du site Webhelp de Caen.
L'optimisation de l'espace est pensée avec des architectes d'intérieur dès la construction: "Au-delà de l'utilisation des mètres carrés, on cherche aussi à casser les grandes travées, à intégrer des couleurs chaleureuses et à installer des espaces de convivialité pour créer des ruptures. La qualité de la lumière est aussi un élément important pour limiter la fatigue visuelle", détaille Damien Mellier, directeur des opérations Maroc chez Majorel. La configuration des lieux joue sur les schémas d'implantation. "Quand les locaux étaient plutôt carrés, on faisait beaucoup de marguerites avec un puits central et six postes de travail autour. Aujourd'hui, les plateaux sont plus rectangulaires, presque sans poteaux, ce qui permet d'optimiser davantage l'espace", note Jean-Luc Bertrand, directeur de Materic, société spécialisée dans l'aménagement d'espaces tertiaires professionnels, qui équipe des centres de contacts depuis le milieu des années 1990.
Les postes de travail sont plutôt placés en ligne et se font face, de part et d'autre d'un plateau. Dans les espaces conçus par Materic, la longueur d'un bureau atteint souvent 120 à 140 centimètres pour pouvoir être équipé d'un ou deux écrans, souvent positionnés sur des bras articulés afin de faciliter les réglages et de laisser davantage de place sur le bureau. Chaque détail a son importance: les deux écrans doivent être à la même hauteur et les claviers le plus plat possible. "Si le travail demande beaucoup de recherche, il faut passer à deux écrans. Pour les conseillers qui travaillent avec beaucoup d'applications embarquées, la puissance du processeur doit aussi être à la hauteur pour permettre de répondre rapidement", souligne Damien Mellier.
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La multiplication des écrans traduit l'évolution des outils des téléconseillers de plus en plus "augmentés": les systèmes de Robotic Process Automation (RPA) limitent les saisies, des questions en langage naturel lancent des bots qui cherchent l'information, la lecture automatique de document fait remonter les éléments nécessaires à l'analyse d'un dossier... "On s'efforce de rassembler des données issues de différents outils dans une interface unique pour que le conseiller puisse avoir une vision à 360° du dossier qu'il est en train de traiter. Cela évite le stress, la fatigue et aussi beaucoup d'erreurs", assure Claire Romezin, directrice marketing, avant-vente et expertise CRM chez Majorel.
2 Amortir ou annuler les bruits
Sur les plateaux, l'acoustique reste un point essentiel. Il faut limiter au maximum la réverbération du son sur les parois, prévoir des faux plafonds avec des dalles anti-bruit, des moquettes adaptées, des cloisons mobiles, paravents ou autres claustras installés entre les espaces. Des parements décoratifs avec des propriétés acoustiques peuvent aussi être appliqués sur les murs. "L'interprétation acoustique est différente pour chaque entreprise et selon le type de service fourni. Dans les centres de contacts, si on équipe une hotline avec des gens qui dépannent des clients, les conversations vont souvent durer une demi-heure. Les conseillers doivent être bien isolés les uns des autres pour pouvoir se concentrer", fait valoir Jean-Luc Bertrand.
Les espaces de vente sont souvent plus bruyants que les plateaux d'assistance clientèle car l'argumentation amène assez mécaniquement les conseillers à parler plus fort. Pour limiter les interférences, les postes de travail sont souvent séparés par des "cloisonnettes" plus ou moins hautes (environ 50 centimètres), qui forment un écran acoustique. Elles sont parfois vitrées en partie haute pour ne pas couper la vue des téléconseillers. Le groupe Poly (ex-Plantronics), spécialiste de l'audio, a sorti il y a trois ans une solution "Habitat Soundscaping" pour open space, qui atténue le bruit ambiant en diffusant des sons agréables (souvent des bruits de rivière) à travers des haut-parleurs. "Cette solution convient aussi aux centres de contacts. Elle a déjà été installée aux Pays-Bas et nous sommes en train de la déployer dans les autres pays", explique son directeur commercial France, Fabrice Berthelot.
3 Des technologies de pointe embarquées dans les micro-casques
Les téléconseillers utilisent des micro-casques légers mais robustes, avec une qualité audio irréprochable. Sinon c'est la qualité de la relation client qui se dégrade! Il existe une grande variété de modèles avec un ou deux écouteurs et différents styles de port en serre-tête, en contour d'oreille ou en tour de cou. Les nouvelles générations -les gammes Biz 2400 ou Engage chez Jabra, EncorePro, Blackwire ou Savi 8200 chez Poly- apportent différentes réponses aux nuisances sonores qui se créent immanquablement sur les plateaux. Certaines sont d'ordre mécanique, avec des oreillettes plus couvrantes, qui contribuent à mieux protéger du bruit ambiant. D'autres relèvent de la technologie: son binaural (à 360°, ndlr), micros directionnels, traitement du son... "Le système Digital Sound Processing (DSP) nettoie le son des différents bruits de l'environnement et de l'écho pour ne laisser passer que la voix. C'est plus confortable pour l'agent et pour le client qui appelle", ajoute Fabrice Berthelot. Les casques gèrent directement le niveau sonore: quand un bruit inattendu survient, ils limitent le volume du son pour éviter les chocs acoustiques qui entraînent des problèmes auditifs.
Les casques d'annulation complète du bruit ambiant sont rares dans les centres de contacts. "Peut-être pour une question de coût mais aussi d'isolation, qui devient trop importante. Les téléconseillers ont besoin de pouvoir communiquer avec leur environnement", admet Jean-Baptiste Pain. Des solutions évitent pourtant aux téléconseillers d'être interrompus et de se déconcentrer: sur certains casques, des indicateurs lumineux positionnés sur les oreillettes indiquent l'éventuelle indisponibilité de l'opérateur.
Face à la convergence des canaux de communication, bon nombre de micro-casques gèrent des appels qui arrivent du téléphone, du PC ou du smartphone. Les équipementiers ont aussi développé des casques sans fil ou des solutions intégrant des critères de cybersécurité ou de lutte contre le piratage, parfois exigés par les donneurs d'ordre, en particulier dans la banque mais aussi dans la téléphonie.
4 Les superviseurs gagent en mobilité grâce au sans fil
Chez les téléconseillers, le casque filaire reste le plus souvent la norme car ces matériels sont moins coûteux que le sans fil. "Le Bluetooth peut en revanche avoir du sens sur les activités télécoms ou les jouets très technologiques, qui proposent souvent un showroom avec du matériel. Le conseiller peut se déplacer pour aller chercher le produit, tout en continuant à accompagner son client", note Elisabeth Vrignaud, responsable formation, RSE et diversité de Comdata France. Certains secteurs, notamment la banque, sont particulièrement friands de solutions sans fil. "On se retrouve vite avec une centaine d'utilisateurs sur un même plateau, ce qui oblige à traiter des questions de densité. Les développements logiciels permettent aujourd'hui d'adapter les produits à leur environnement et de les utiliser en mode normal et/ou dense, en fonction de l'utilisation du Wi-Fi et des besoins de la norme DECT de téléphonie sans fil numérique", détaille Jean-Baptise Pain.
Les solutions sans fil sont surtout l'apanage des superviseurs, qui ont besoin de se déplacer. Placés en bout de plateau sur des positions un peu élevées, ils ont une vue complète de leur équipe, sont facilement repérables et peuvent réagir rapidement lorsqu'ils sont sollicités par leur équipe. Sitel équipe progressivement ses team managers d'un kit de mobilité composé d'une tablette Dell et d'un casque Jabra pour qu'ils puissent débriefer les échanges et favoriser le coaching en proximité.
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"Les indicateurs de l'entreprise changent et nous avons de nouvelles demandes à adresser. On souhaite que nos team managers soient davantage dans une posture d'accompagnement des conseillers et de conduite du changement, justifie Kim Neyret, directrice générale de Sitel France. Avant l'évaluation, le manager vient près du conseiller et prend quasiment la place du client pour l'aider à monter en gamme. C'est une vraie évolution car le coaching peut se dérouler au fil de l'eau. Cela suppose toutefois de demander différentes autorisations à nos clients. Certains ont des plateaux un peu fermés et il faut prévoir des accès spécifiques pour garder cet espace confiné." Ce projet sera déployé au quatrième trimestre 2019 sur les sites du groupe à Clermont-Ferrand, Wasquehal et La Rochelle.
5 Des espaces plus diversifiés
Les besoins de formation et de debrief influent aussi sur l'organisation des locaux. Les centres de contacts intègrent désormais des corners ou des salles équipées de Wi-Fi pour organiser des réunions avec un nombre plus ou moins important de collaborateurs. Ces sociétés qui ont pour la plupart une présence à l'international, peuvent avoir besoin d'outils de travail à distance incluant la vidéo. Jabra a lancé mi-août un dispositif Panacast avec une solution vidéo panoramique en 4K, qui peut être installée en mode plug & play, y compris dans des salles de réunion improvisées.
Au-delà des espaces de travail, les centres de contacts mettent en place des espaces de détente et de décompression pour les téléconseillers. À Caen, Webhelp propose entre autres des salles zen, ou des espaces avec des consoles et des jeux vidéo. "Dans nos métiers, les moments de respiration sont essentiels. Le profil des collaborateurs évolue et il faut aussi s'adapter aux nouvelles générations, qui ont un rapport différent au travail", précise Yann Barbin. Cette attention à la qualité de vie au travail est devenue centrale dans un secteur de la relation client qui veut continuer à monter en expertise et limiter le turn-over des équipes. Conserver un collaborateur passe plus que jamais par une palette de propositions!
En centre de contacts, l'élargissement des missions implique un aménagement adapté des locaux et du matériel, afin de concilier performance et sérénité.
6 Les positions de travail dynamiques se développent lentement...
Le travail du téléconseiller étant souvent statique, il est recommandé de varier de position de travail. Si les postes assis-debout, très appréciés dans le nord de l'Europe ou aux états-Unis, ne sont pas encore très ancrés dans les habitudes françaises, des postes hauts se développent et permettent par exemple de travailler ponctuellement debout sur ordinateur portable. "Certains des aménagements aujourd'hui accessibles à l'ensemble des salariés ont été pensés avec des ergonomes pour répondre à des demandes particulières ou pour maintenir dans l'emploi des salariés avec des handicaps auditifs ou moteur. On fait du sur-mesure et le partage d'expérience entre les sites permet d'adopter plus largement ces évolutions", explique Elisabeth Vrignaud, responsable formation, RSE et diversité de Comdata France.
Une plateforme mobile positionnée sur un bureau électrique, qui a permis de verticaliser le poste de travail d'une personne en fauteuil, est un dispositif léger qui peut aussi convenir aux superviseurs, qui travaillent en position haute. Les sièges, longtemps restés le parent pauvre de l'ergonomie du poste de travail, deviennent un élément important: "Des assises bas de gamme pouvaient suffire à des collaborateurs d'une vingtaine d'années restant quelques mois dans l'entreprise. Pour des conseillers de 35-40 ans qui commencent à développer des douleurs dès qu'ils sont mal assis, il faut prévoir des mousses, un appui dorsal, etc.", note Jean-Luc Bertrand, directeur de Materic, qui travaille notamment avec la société française Eurosit. Webhelp, à Caen, a opté pour des sièges Vitra.
Qualité des sièges, positions plus verticales... l'amélioration des positions de travail arrive progressivement.
7 Ateliers et formations pour adopter les bonnes postures
Dans les centres de contacts, les positions de travail anti-naturelles sont source de fatigue, de stress et autres troubles musculo-squelettiques. "Tous les ans, on met en place des ateliers avec un ergonome spécialisé dans la santé au travail. Les salariés qui travaillent sur écran apprennent les bonnes postures à adopter, à être attentifs à la couleur de l'écran, à son inclinaison", indique Yann Barbin, directeur du centre Webhelp de Caen.
"On s'est beaucoup améliorés au contact des ergonomes. Comdata a mis en place des formations pour apprendre à poser sa voix et parler moins fort, afin d'éviter de se fatiguer. On a aussi organisé des cours pour apprendre à taper avec les deux mains, ce qui améliore la posture de travail et la productivité. Nous avons aussi travaillé avec un médecin du travail pour apprendre à bien se tenir sur son siège et éviter les tensions dans les épaules", précise Elisabeth Vrignaud, responsable formation, RSE et diversité.
Les outsourceurs multiplient les ateliers pour lutter contre les troubles musculo-squelettiques.
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