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SOS emploi en Ile-de-France

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Recruter des téléconseillers, des hotliners ou des superviseurs s'avère de plus en plus difficile, surtout en région Ile-de-France. La province fidélise mieux. Mais quand tout le monde cherche le même profil (un jeune bac + 2 avec expérience des métiers du call center), il faut trouver des moyens de gérer la pénurie. Recours à l'intérim, sites web et salaires revus à la hausse sont des pistes à creuser pour les entreprises qui ont du mal à recruter.

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C'est une jeune femme de moins de 30 ans, titulaire d'un bac + 2, habitant en région parisienne, qui a déjà une expérience des métiers du téléphone. Elle croule sous le nombre de courtisans qui ont pour noms Cegetel, Bouygues, Adecco, Manpower, Quali-Phone, H2A, etc. Cette jeune femme comme ses semblables sont les employés des centres d'appels français. Problème : ce secteur en pleine croissance est passé d'une situation de fort chômage à une période de quasi plein emploi. Résultat : les candidats aux postes de téléconseillers, hotliners ou télévendeurs sont en position de force et refusent aujourd'hui les missions mal payées, peu attractives ou difficiles d'accès géographiquement. Avec comme corollaire une tension sur le marché de l'emploi des métiers du centre d'appels, surtout ressentie à Paris et en Ile-de-France, région qui concentre une bonne majorité des call centers. Et qui affiche un taux moyen de turn-over des effectifs de l'ordre de 60 %. Mais la situation évolue : la province attire de plus en plus de sociétés, désireuses d'échapper à la pénurie de ressources humaines. « Le secteur a explosé. On en parle moins que l'Internet mais il crée énormément d'emplois. Aujourd'hui, la région parisienne est saturée et les entreprises comme Bouygues Telecom décentralisent leurs centres en province », analyse Laurent Malard, commissaire général de Reccatel, salon de recrutement dédié aux métiers des téléservices. Les atouts des villes moyennes se nomment espace, locaux agréables, loyers modérés, bref, qualité de vie. Bien sûr, les profils les plus recherchés ne sont pas aussi nombreux à Amiens ou Tours qu'à Paris, mais les ANPE locales compensent par des candidats différents, mettant à profit la méthode des "habiletés" (voir plus loin). « Les sociétés qui embauchent sont obligées d'admettre qu'il leur faut recruter des profils inexpérimentés », ajoute Laurent Malard. Elles doivent aussi se résoudre à réviser à la hausse leurs propositions salariales (voir encadré). « Les missions payées au Smic (42 F de l'heure), c'est fini. Aujourd'hui, il faut être prêt à donner 55 francs de l'heure en moyenne, et aller même jusqu'à 90 francs pour les compétences supplémentaires, langue étrangère ou maîtrise de l'informatique », affirme Valérie Vallée, responsable du département Téléaction chez Kelly Services.

L'INTÉRIM, TOUJOURS EN CROISSANCE


Obligées de pallier le manque de candidats, les entreprises dotées de centres d'appels internes ainsi que les outsourceurs doivent trouver de nouveaux canaux d'embauche. Elles ont, par exemple, de plus en plus recours aux agences d'intérim. Celles-ci n'ont pas mis longtemps à surfer sur la vague et créer des départements spécialisés : Kelly Téléaction pour Kelly Services, Adecco Téléservices chez Adecco, département télémarketing chez Hays Alpha, une spécialisation sur les métiers du télémarketing pour Onepi Marseille, etc. La forte demande a engendré une réponse appropriée des professionnels de l'intérim, qui voient dans les centres d'appels une bonne opportunité. Au point que des intervenants comme Centres d'Appels Intérim (voir page 92) vont au bout de la démarche en se consacrant exclusivement à ces professions du téléphone. Alors que ces agences étaient précédemment contactées pour pourvoir des missions de courte durée, leur prestation a évolué vers la pré-embauche. « Avant, on pouvait travailler cinq ou six fois avec un intérimaire. Aujourd'hui, il y a huit chances sur dix qu'il reste chez notre client », explique Dominique Perrier, chargée de clientèle chez Hays Alpha. Valérie Vallée de Kelly Téléaction confirme et parle de 90 % de pré-embauches. La conséquence pour les sociétés d'intérim est à double tranchant. Elles ont de plus en plus de clients mais de moins en moins de candidats à proposer. « Nous sommes dans une démarche perpétuelle de recrutement », avoue Dominique Perrier. Pour faire face, ces prestataires utilisent toute une batterie d'outils. Numéro un : le fichier. « Il faut faire vivre son fichier. D'abord en trouvant des missions aux candidats, en cohérence avec ce qu'ils viennent chercher chez nous. Mais également en ne les bloquant pas. Si un client ne réagit pas après 24 heures, on propose autre chose au postulant », détaille Laetitia Rouch, responsable du recrutement Ile-de-France chez Adecco Téléservices.

FORMATION RÉMUNÉRÉE AU SMIC


Deuxième outil : la formation. C'est une prestation incontournable pour les débutants, que toutes les sociétés d'intérim aujourd'hui proposent. Ainsi, chez Kelly Téléaction, elle dure trois jours, rémunérée au Smic. « Nous avons de plus en plus de gens qui viennent de la vente et de l'hôtellerie restauration. Ils ne veulent plus être debout toute la journée et n'ont pas une mauvaise image de la téléphonie », raconte Valérie Vallée. Chez Onepi Marseille, on travaille avec un outil d'évaluation des compétences télémarketing mis au point avec la chambre de commerce. « Nous faisons passer un test et un bilan de compétences. Cela nous permet de construire un graphique que l'on met en rapport avec celui qui recense les attentes des clients », détaille Cécile Faraut, responsable d'agence. Pour Myriam Goldstein, chargée de recrutement chez Hays Alpha, la formation est un investissement nécessaire : « C'est obligatoire compte tenu de la situation du marché. Les clients ne veulent pas de débutants ». Troisième approche pour trouver les candidats : varier les canaux. Les petites annonces presse sont toujours un must, même si leur rendement n'a plus rien à voir avec ce qu'il pouvait être quelques années auparavant. « Il y a deux ans, en passant une petite annonce à 600 francs dans Le Figaro, on recevait 150 à 200 appels. La moitié était éliminée pour des problèmes d'élocution et de présentation. Sur le nombre restant, une moitié ne venait pas. Au final, on retenait une vingtaine de candidats. Aujourd'hui, la même annonce génère deux recrutements ! », raconte Thierry Leduc, directeur associé d'AS Com, société d'outsourcing. Dans le hit-parade des titres cités, on trouve d'abord Le Figaro, suivi de A Nous Paris (le gratuit de la RATP), puis Le Parisien. L'Etudiant et Rebondir sont également mentionnés. En province, c'est bien entendu la PQR (presse quotidienne régionale) qui est privilégiée. Le Web est aussi de plus en plus utilisé par les agences. Média jeune, réactif et rapide, moins onéreux que les annonces papier, il commence à devenir un incontournable du recrutement. D'ailleurs, des sites spécialisés aux métiers du centre d'appels apparaissent (voir plus loin). Les sociétés d'intérim commencent par placer des annonces sur leurs propres sites. Puis elles pianotent sur cadresemploi.fr (pour les postes d'encadrement), emailjob.com (avec lequel Hays Alpha a signé un accord de partenariat sur l'année 2001), keljob.fr, monster.fr, stepstone.fr, etc. Mais certains mettent un bémol sur l'utilité de l'Internet en matière d'embauche : « Ça marche pour les cadres. Pour les autres postes, on trouve surtout des candidats qui ont expérimenté ces métiers mais veulent en sortir », tempère Laetitia Rouch.

LA RUÉE VERS LA PROVINCE


Une fois épuisés tous ces outils de recrutement, reste le vieux mais efficace bouche-à-oreille. « On commence à être connu sur le créneau du télémarketing », se félicite ainsi Dominique Perrier d'Hays Alpha, qui capitalise sur les journées portes ouvertes organisées tous les mois par la société d'intérim. « Nous encourageons les candidats à nous rappeler après la mission pour avoir des retours. Cela nous permet de faire un suivi des candidats qu'ils apprécient beaucoup », ajoute Myriam Goldstein. « La cooptation joue beaucoup dans le milieu. Si on est bon, ça se sait », remarque Laetitia Rouch d'Adecco Téléservices. Même avis pour Stéphane Bouille, recruteur chez Onepi Marseille : « A cause du turn-over, les téléacteurs se rencontrent sur les plates-formes et discutent de leurs employeurs », explique-t-il. Enfin, les agences d'intérim écument les salons comme celui de l'Etudiant, Reccatel ou le SeCA. De leur côté, les outsourceurs ont eux aussi bien du mal à pourvoir tous leurs postes. Même en s'aidant des ressources en intérim, il leur faut déployer d'autres stratégies de recrutement pour mettre des agents derrière les téléphones. Tous lorgnent vers la province, et ouvrent des centres en région pour compenser la pénurie parisienne. L'outsourceur et courtier en télécoms Coriolis Télécom, par exemple, dispose d'un plateau de 200 positions à Paris et d'un autre de même taille à Amiens. « A Paris, il y a trop de centres d'appels. Tout le monde veut avoir le sien. La situation est très différente à Amiens. Dans une région sinistrée au niveau emploi, quand on arrive avec 200 postes, on ne rencontre pas de problème majeur de recrutement », raconte Alain Versigny, responsable de la gestion des ressources humaines. Aller chercher la main d'oeuvre où elle se trouve, c'est-à-dire hors de la région parisienne, c'est une stratégie qui commence à se répandre dans l'univers des outsourceurs. Bertelsmann Services a choisi pour sa part de s'installer dans les régions du Nord et de l'Est.

LE MIX PARIS/RÉGIONS, UN CAS DE FIGURE COURANT


Le choix de Bertelsmann Services s'est effectué sur la base de deux critères majeurs : le taux local de chômage, important pour les deux zones concernées, et le vivier universitaire. « Lens, Nancy, Metz : ces endroits ont souffert de la fermeture des mines et des industries lainières, ainsi que de l'arrêt de la sidérurgie. De plus, il y avait peu d'implantations de call centers et ce sont des régions assez centrales d'un point de vue européen », explique Philippe Clogenson, directeur général développement. Cette volonté délibérée d'aller à la rencontre des candidats semble payer : Bertelsmann Services trouve assez facilement les profils recherchés pour ses services clients, à savoir les sempiternels bac + 2 et plus. Transcom, filiale du groupe suédois Kinnevik AB, est elle aussi adepte du mix Paris/province. Près de 400 personnes travaillent à Vélizy (Yvelines) et autant à Raon l'Etape (Vosges). Une ouverture (500 à 600 personnes) est prévue à Tulle (Corrèze) en juillet prochain. « Avec un taux de chômage de 23 %, les Vosges étaient sinistrées au niveau emploi. D'autant que l'armée a également déserté la région. Nous n'avons pas eu de problèmes à trouver des candidats », évoque Noëlle Prétot, directrice des services européens. Des partenariats avec l'ANPE, les services administratifs des conseils général et régional, les mairies et les chambres de commerce, ont donné de bons résultats en matière d'embauche. AS Com travaille beaucoup pour la presse (une cinquantaine de titres chez Emap, IDG, Vogue) et l'informatique (Sun Microsystems). Il emploie une quarantaine de personnes dans son plateau de Suresnes, et huit autres en CDI à Vélizy dédiées à Sun. Mais AS Com a ouvert un centre à Angers, il y a huit mois.

TURN-OVER DE - 15%


« Nous sous-louons des locaux et des prestations techniques auprès de Sema Group Ressources Systems, nous ne gérons que l'humain », détaille le directeur associé d'AS Com. Le recrutement des douze CDI sur le site d'Angers a été effectué par un canal unique, celui de l'ANPE. Seul le responsable du site a été "parachuté" depuis Paris. Mais un mois et demi plus tard, un responsable local était embauché. Neuf mois après cette installation en province, Thierry Leduc fait le point : « La qualité de la production est excellente, les résultats identiques voire supérieurs à Paris et le turn-over est inférieur à 15 % ». Très féminin (un homme pour douze femmes), plus âgé qu'à Paris (26 ans de moyenne), le profil-type du téléconseiller angevin est différent de celui de son homologue francilien. Séduit par cette réussite, le directeur associé d'AS Com envisage d'autres ouvertures de petites structures du type de celles d'Angers. B2S, outsourceur qui compte comme clients Oracle, Volkswagen ou Cofiroute, a ouvert un centre de 120 positions à Pau et va créer un autre plateau de 200 à 300 positions ailleurs en province. « C'est un choix délibéré qui donne de très bons résultats qualitatifs », affirme Maxime Didier, P-dg de B2S. Même les sociétés qui recrutent en interne répondent à l'appel de la province. L'opérateur télécom Kertel (groupe Pinault Printemps Redoute) avait deux sites, l'un à Paris, l'autre à Amiens. Depuis un mois, il ne travaille plus que sur Amiens avec un plateau de 90 téléconseillers. « A Paris, le recrutement était plus délicat. On a à faire à des mercenaires, des gens qui sont là pour faire un job, des artistes ou des étudiants qui ont pratiquement tous une activité à côté. Alors que nous souhaitons embaucher en CDI », précise Philippe Riveron, responsable du service clients. A Amiens, un partenariat avec l'agence de développement SiliSommes Ressources a permis de trouver les profils recherchés, à savoir Bac à Bac + 2, parlant au moins une langue étrangère, dotés d'un sens commercial et ayant acquis une expérience dans le domaine de la relation client. Des salaires corrects agrémentés d'une part variable et un service de recrutement étoffé (un DRH, un responsable du recrutement, deux recruteurs), assortis d'un effort sur la formation (interne et avec SupMédiaCom), ont abouti à un turn-over de 5 % seulement.

"J'APPELLE POUR LE TAF"


Reste que pour ceux qui continuent d'exploiter des centres à Paris et en région parisienne, et qui représentent toujours la majorité du parc, il faut se débrouiller pour pallier la pénurie de main d'oeuvre. « Difficile de trouver une motivation chez quelqu'un qui a déjà répondu à trente annonces », regrette Eric Toulon, assistant au responsable du recrutement chez Twinner, société de téléservices filiale d'Europ Assistance. Après les étudiants, les intermittents du spectacle et les chômeurs, c'est au tour des jeunes des "cités" de devenir un vivier pour les centres d'appels, surtout ceux qui font de l'émission d'appels. « Paris, c'est un cauchemar », avertit Thierry Leduc d'AS Com. Asséché par les start-up et les opérateurs de téléphonie mobile, le marché parisien des "jeunes bac + 2 qui s'expriment bien" s'est réduit comme une peau de chagrin. « Quand on vous contacte pour vous dire : "Bonjour, j'appelle pour le taf", c'est inenvisageable dans nos métiers », avoue Thierry Leduc. Quand Transcom est arrivé à Vélizy fin 1998, la situation de l'emploi n'était pas aussi tendue. Néanmoins, il a fallu recruter cent cinquante personnes en une semaine, ce qui ne va pas de soi. Le fait d'être situé en banlieue ne fut pas négatif. « Le recrutement est plus difficile, mais les gens sont plus disponibles », pense Noëlle Prétot, responsable des services européens. Grâce à un effort sur la politique sociale (35 heures, comité d'établissement, salaires), Transcom a réussi à garder 70 % de ses téléacteurs trois ans après l'ouverture de son centre des Yvelines. « Avec 60 % de gens d'origine étrangère, on joue aussi un rôle social. En leur apportant une formation et un savoir-faire, on participe à leur intégration sociale », estime la directrice des services européens. AS Com a choisi de travailler en étroite relation avec les écoles de comédie. Pourvus d'une bonne élocution et déjà préparés à entrer dans des rôles, ces apprentis comédiens sont un bon vivier de vacataires. Par ailleurs, l'outsourceur de Suresnes a noué un partenariat avec l'agence d'intérim Call Intérim. Celle-ci lui envoie des candidats sans expérience, impossibles à placer chez ses clients. AS Com les forme et les fait travailler pendant une période d'un à trois mois avant de les renvoyer vers Call Intérim. « On ne vit plus que là-dessus pour remplir nos missions », renchérit Thierry Leduc.

SAVOIR OFFRIR UNE PERSPECTIVE DE CARRIÈRE


Catherine Milhau, directrice générale adjointe de Phone City (filiale de l'Ifop située à Alfortville, Val-de-Marne) souffre aussi de la pénurie, mais elle a « toujours réussi à mettre quelqu'un en face d'un poste de travail ». Elle parie sur la formation et l'accompagnement pour fidéliser ses téléacteurs : « C'est là que tout se joue en grande partie ; la politique d'accompagnement lors des premières missions est primordiale », estime-t-elle. Mais la meilleure stratégie de recrutement, c'est de proposer un vrai métier aux can-didats. Salaires corrects, possibilité d'évolution, plan de carrière : les métiers du téléphone tentent de sortir de leur image dévalorisée pour attirer les jeunes diplômés. « La clé, c'est de leur faire une proposition en matière de carrière. Or, même si le discours ambiant est policé, la réalité est autre. On continue de voir des manifestations de salariés mécontents. Les sociétés de télémarketing ont construit une méthode de production fondée sur des missions ponctuelles, peu valorisantes et mal payées. Ce modèle ne fonctionne plus quand vous faites du service client. On peut être productif avec des gens associés à un projet d'entreprise », assène Maxime Didier, P-dg de B2S. Mais, s'il revendique un taux de turn-over très bas, moins de 2 % en province, le P-dg de B2S reconnaît que ce plan de carrière sur dix ans est difficilement applicable à Paris : « Il y a un an déjà, j'ai été étonné d'essuyer des refus alors que j'arrivais avec des CDI sous le bras ». C'est le retour au cercle vicieux de l'embauche en centres d'appels : les employeurs sont prêts - disent-ils - à proposer un vrai métier aux candidats, mais ils se heurtent à une population qui surfe sur les propositions et fait son marché sans chercher à se caser. Les entreprises disposant de call centers internes sont encore celles qui ont le moins de difficultés à recruter. Première raison : en tant qu'utilisateurs des services des outsourcers, eux mêmes utilisateurs de l'intérim, ils délèguent le gros du travail en matière de recrutement. Deuxième explication : ils payent mieux que les prestataires. Troisième attrait : l'image de marque qu'ils véhiculent est meilleure. C'est par exemple le cas de Noos (voir page 92) qui capitalise sur sa qualité d'entreprise high tech (Internet et télévision câblée) pour attirer les candidats parisiens. Chez Bayard Presse, François Lair ne connaît pas trop, non plus, les affres de la pénurie : « Le turn-over n'est pas un vrai problème. En général, les gens évoluent dans d'autres services du groupe ». D'où l'avantage de faire partie d'une grosse structure (une cinquantaine de titres de presse et d'édition). Les mille employés de Bayard constituent de surcroît un vivier pour la cooptation. « Pour fidéliser cette population de jeunes diplômés, il faut les payer normalement, les former et leur offrir de bonnes conditions de travail. Nous sommes à 30 heures de travail par semaine », ajoute le responsable du centre d'appels (trente positions). Par ailleurs, dans les deux ans, les téléconseillers sont amenés à prendre d'autres fonctions au sein des services de Bayard. « Ce métier use vite. Après deux ou trois ans, il faut les faire bouger », reconnaît François Lair. Autrement dit, voici peut-être la meilleure recette pour séduire les candidats aux postes de téléacteur : leur faire miroiter une évolution, mais hors du centre d'appels.

Et l'encadrement ?


Les questions de recrutement sont souvent évoquées avec douleur lorsque l'on parle du personnel d'encadrement. Il est pourtant des employeurs qui affirment rencontrer moins de difficultés avec les cadres, superviseurs, chefs d'équipes ou de plateaux et responsables de centres qu'avec les téléconseillers. La promotion interne joue à plein pour les superviseurs. C'est le cas chez Phone City, AS Com, Coriolis, B2S, Noos, Transcom, Bertelsmann Services, bref, des sociétés qui investissent dans la formation interne. « Nous avons tenté l'expérience du chasseur de têtes pour un manager de centre, ce fut une catastrophe. Et en plus, c'est très cher ! », se souvient Philippe Riveron de Kertel. Néanmoins, c'est sur ces profils de cadres supérieurs que le recours aux prestataires extérieurs (cabinets de recrutement ou chasseurs de têtes) est le plus fréquent. D'autant que dans ce cas précis, la province peut se révéler plus repoussante qu'attirante : « Amiens n'attire pas vraiment les managers », ajoute le responsable du service clients de Kertel. Les agences d'intérim fournissent également ce type de profil : « cette cible est porteuse, nous avons d'ailleurs créé un département avec deux personnes dédiées à ces profils. De plus, certains nous rappellent ensuite en tant que clients », se félicite Laetitia Rouch, d'Adecco Téléservices. Une manière de renvoyer l'ascenseur quand la collaboration s'est bien passée.

Salaires : une certaine évolution


Longtemps, les employés des centres d'appel ont été mal payés. Sous la pression d'un marché de l'emploi en sous-potentiel, entreprises et outsourceurs doivent lâcher un peu de lest. Le montant des rémunérations est toujours inférieur chez les outsourceurs qu'en call centers internes. Pour Manuel Jacquinet, créateur du centre de formation Colorado, la rémunération mensuelle moyenne d'un téléacteur sur Paris et en Ile-de-France est de 8 000 francs brut. 10 000 francs pour un superviseur. Le taux horaire tourne autour de 55 à 60 francs en moyenne, avec des pointes à 90 francs pour les compétences particulières (langues étrangères, droit, informatique). Le Smic ne concernerait plus qu'une minorité de personnes, le ratio de 10 % étant le plus souvent avancé. Par ailleurs, la moyenne des salaires (8 000 francs brut) correspond à la moyenne des salaires en France pour un niveau bac + 2. Lorsqu'il aura gravi tous les échelons pour se retrouver directeur de centre, l'ex-téléacteur pourra espérer toucher de 300 000 à 450 000 francs par an, voire 700 000 francs pour un call center important. Quant à l'intérim, il coûtera grosso modo à l'entreprise le double du salaire brut moyen d'un CDI après période probatoire.

 
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Patrick Cappelli

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