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Centres d'appels et intérim : la confiance règne

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Elles sont capables de toucher 300 candidats en dix minutes grâce aux SMS. Elles investissent en formation et proposent des bilans de compétences à leurs équipes. Les sociétés de travail temporaire sont désormais des partenaires incontournables des centres d'appels.

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Quand l'intérim va, tout va. C'est du moins ce qu'ont coutume de dire les économistes qui voient dans la bonne ou mauvaise santé de ce secteur, un baromètre pertinent de la situation économique du pays. Si l'intérim a connu une année 2003 morose, l'activité des téléservices a pour sa part tiré son épingle du jeu avec des progressions à deux chiffres, variables selon les enseignes. La plupart ont d'ailleurs surfé sur cette vague. D'abord, en jouant la spécialisation métier, ensuite en développant des plans de communication dédiés aux téléservices. « Aujourd'hui, une agence de travail temporaire apporte la même qualité de prestation qu'un cabinet de recrutement », estime Ludovic Baumgartner, responsable du développement des téléservices de Manpower. Une ambition que beaucoup partagent en déclinant de nombreuses offres de conseils et de formations périphériques au recrutement lui-même…

En période de crise, il n'y a pas de petites économies. Les grands comptes l'ont bien compris. ils “achètent“ pour des milliers d'euros d'intérim chaque année, les budgets passant entre les mains d'acheteurs internationaux. Chez Adia qui compte actuellement 300 clients actifs en téléweb services et draine un volume de 2 000 intérimaires par jour, ils représentent 50 % de l'activité. Un marché important sur lequel les coûts sont étudiés au plus près. Parmi les donneurs d'ordres, Orange ou France Télécom procèdent de la sorte. « Les grands comptes prévoient un volume annuel et sélectionnent leur partenaire par le biais d'enchères inversées », explique Katia Delmas, chef de marché téléweb services d'Adia. Une volonté d'allier volume et prix négocié qui évince les plus petites structures.

Coûts cachés, dépenses visibles !

Outre ces négociations sur les tarifs généraux, les sociétés de travail temporaire ont également pour habitude de se comparer aux CDD. Pour mesurer les coûts de revient respectifs des différents contrats et démontrer leur compétitivité. Si, avant le mois de janvier 2001, l'indemnité de fin de contrat était de 6 % pour les CDD contre 10 % pour l'intérim, la loi de modernisation sociale a changé la donne en mettant les deux contrats au même niveau. Avec une seule et même indemnité de 10 % en fin de contrat. « Une entreprise qui établit un CDD sur la base d'un coefficient de salaire chargé de 1,53 % se retrouve en fait à un prix de revient de 1,73 %, une fois intégrés les 10 % d'indemnités de congés payés et les 10 % d'indemnités de fin de contrat », calcule Philippe de Carvalho, chef d'agence Adecco.

Entre l'intérim et le CDD, comment les entreprises peuvent-elles choisir ? Dans leurs comparatifs, les sociétés d'intérim étudient les coûts cachés. Et proposent des diagnostics sur l'ensemble des coûts (fixes, variables ou cachés) à leurs clients ou prospects. Les dépenses de recrutement, de gestion et de formation, les dépenses administratives et de visite médicale… toutes sont passées au crible. Avec un objectif : montrer que le recrutement a un coût et qu'en cas de problème, le risque financier est supporté par la société de travail temporaire. « En cas de déconvenue sur un intérimaire, un arrêt maladie ou un recrutement qui achoppe, la société d'intérim paie l'addition », souligne un chef d'agence. Des paramètres à prendre en compte. Si les partenariats entre centres de contacts et sociétés d'intérim existent depuis longtemps, l'heure est à la professionnalisation. « Les qualités de sérieux et le savoir-être sont très importants dans les téléservices », souligne Catherine Senger, chargée d'affaires au sein d'une agence de téléservices de VédiorBis.

Des méthodes de formation

Les gros acteurs du marché ont mis en place des méthodes de formation afin d'accompagner les intérimaires dans les métiers de la relation client. Ainsi Manpower a créé son outil maison, baptisé “Teleskill” qui forme aux techniques d'émission et de réception d'appels. Trois journées obligatoires pour les candidats novices envoyés sur une première mission. “Tics verbaux”, “mots noirs”, et autres vocables non appropriés à une relation téléphonique de qualité sont alors identifiés, disséqués et chassés… « Souvent sur les plates-formes des clients, c'est la notion de produit qui est la plus largement abordée. Au travers de nos formations, nous mettons l'accent sur les techniques d'entretien », explique Marie-Odile Escande, responsable formation de Manpower. De fait, une réelle évolution se perçoit dans la manière dont les sociétés d'intérim abordent les métiers de la relation au téléphone. Le constat de professionnalisation est général au sein des centres internalisés. « Par le passé, nous avons été confrontés à des problèmes relatifs au manque de professionnalisme des profils. Aujourd'hui, la spécialisation des agences a eu des répercussions bénéfiques », explique Philippe Hannuna, directeur des relations clients et de la qualité chez le fournisseur d'accès internet Tiscali.

Ainsi, les sociétés d'intérim contribuent, en augmentant leur niveau d'exigence, à faire évoluer l'image des métiers des centres d'appels. « Le métier des téléservices change. Les entreprises recherchent des personnes qui veulent faire de la relation client à distance leur métier », souligne Catherine Senger. Dans certains secteurs tels que la Banque, les compétences des téléconseillers sont particulièrement appréciées. « Nous constatons que les chargés de clientèle qui ont les meilleures performances dans les réseaux bancaires sont ceux qui proviennent des centres d'appels », souligne Ludovic Baumgartner. Un exemple à suivre. Si elles accroissent leur professionnalisme, les sociétés de travail temporaire drainent aussi de très nombreuses candidatures. Leurs bases de données sont de véritables mines d'or. A l'image du fichier clients d'une entreprise, elles constituent l'une des richesses de ces structures. A tel point que, pour recruter les perles rares, les entreprises passent parfois exclusivement par des sociétés d'intérim. « Orange ne recrute que par le travail temporaire.

Trois sociétés d'intérim sont référencées par l'opérateur et sur certaines zones géographiques, c'est uniquement en passant par Adia et en faisant dix-huit mois de mission que les intérimaires peuvent prétendre accéder à un CDI », souligne Katia Delmas. Pour proposer les meilleures candidatures à leurs clients, les sociétés d'intérim multiplient leurs sources. Site internet vitrine où les candidats peuvent déposer leur CV, partenariats avec des moteurs de recherche d'annonces d'emplois, annonces ANPE et annonces presse font partie des méthodes utilisées. Mais la plus efficace reste le “bouche-à-oreille”, et le parrainage. « Les intérimaires savent par quelle agence il faut passer pour travailler avec tel ou tel client et viennent nous voir pour travailler avec cette entreprise », témoigne un chargé de recrutement. Les bases de données qui recensent des milliers d'intérimaires sont mises à jour régulièrement, permettant aux entreprises de travail temporaire de proposer de nombreux CV aux centres d'appels à la recherche d'effectifs. « Notre base est mise à jour au quotidien par les internautes eux-mêmes. En fonction des critères et des compétences requises, la base fournit un pourcentage d'adéquation au poste. Au-dessous de 60 % d'adéquation, nous ne présentons pas le candidat au client », souligne Françoise Morville, directeur de secteur chez Adecco. Des méthodes et un vivier qui constituent l'une des grandes forces de l'intérim pour les centres d'appels.

Mission première, la flexibilité

Outre la richesse de leurs bases, les sociétés de travail temporaire font aussi la différence sur leur réactivité. Une entreprise attend d'une société d'intérim de pouvoir fournir en un temps record des effectifs pour faire face à des saisonnalités ou à des crises... Et la force des fichiers alliée aux outils des technologies modernes permet une réactivité sans faille. « Avec les SMS, en dix minutes, nous pouvons contacter 300 personnes et les intérimaires motivés par la mission rappellent leur contact. On n'a pas trouvé mieux hormis la transmission de pensée ! », ironise Olivier Benhaïm, chef d'agence Manpower. Autre exemple de réactivité, la campagne menée pour la collecte des impôts.

« Pour cette opération, nous avons recruté, en une semaine, 300 intérimaires en téléservices, dont 200 ont été retenus », explique Françoise Morville, d'Adecco. Des chiffres qui parlent d'eux-mêmes. Cette flexibilité, si elle fait le miel des centres internalisés, intéresse aussi les outsourceurs. Mais parler à une agence d'intérim de ses clients outsouceurs (environ 20 % du marché), et vous sentirez quelques réticences. « Ce sont de gros utilisateurs de travail temporaire. Ils connaissent bien les atouts de l'intérim et mettent une pression importante sur les prix », remarque Katia Delmas. Idem du côté de Manpower, qui évoque un niveau d'exigence important pour un salaire souvent plafonné au Smic… Des rapports en outre compliqués par un cadre juridique strict.

Trouver le mouton à cinq pattes

Comment découvrir le mouton à cinq pattes ? Les agences d'intérim y parviennent parfois. Pour preuve, citons une agence qui a recruté, pour une PME française vendant de la vanille en Allemagne, un intérimaire avec un BTS chimie, parlant couramment la langue de Goethe ! « Les demandes non honorées représentent dans ces métiers un taux de 15 à 25 % », estime Françoise Morville. Certaines agences proposent, outre une spécialisation dans les téléservices, des sous-familles par métier telles que la Banque-Assurance.

Autre valeur sûre, les profils bilingues, de plus en plus recherchés. « Nous travaillons souvent par l'intermédiaire de la presse spécialisée pour drainer des candidatures bilingues », souligne Mathilde Claus, responsable de l'activité Centres d'Appels au sein d'Hays Personnel Intérim. En la matière, le support du Fusac, un journal gratuit de petites annonces pour les étudiants et touristes anglophones, est souvent cité. Néanmoins, la majorité des besoins d'intérimaires en téléservices concerne des missions relativement simples nécessitant des profils peu qualifiés. Mises à jour de fichiers, prise de rendez vous… les attentes sont souvent similaires, mais se démocratisent. « Les téléservices intéressent aussi les PME. Ces dernières ont des besoins sur des missions classiques, par exemple pour qualifier leurs fichiers commerciaux », note Philippe de Carvalho.

Parmi les autres préoccupations des centres d'appels, la capacité à enrichir les équipes et à mélanger les profils revient souvent. En la matière, l'intérim peut aussi s'avérer d'un grand secours. « Des personnes en réinsertion, intégrées dans les centres d'appels, se révèlent en général plus combatives. On leur propose fréquemment de les intégrer en CDI, souligne Katia Delmas. Nous tentons de faire comprendre à nos clients qu'il faut lever certains préjugés et élargir les critères de recrutement. » De fait, les dispositifs utilisés par les sociétés d'intérim concernant la réinsertion et le travail des handicapés représentent souvent un tremplin.

Le parcours de Ghislain Kordo, actuellement manager au sein du centre de contacts de Qualicontact, une société de télémarketing, en est un exemple. Ce licencié en sciences économiques enchaîne les missions d'intérim avant qu'Adia lui propose un contrat de mission formation et insertion (CMFI). Grâce à cette formation, il rencontre son employeur actuel. Samira, 25 ans, a également suivi cette formation. Elle témoigne : « Après une période de chômage, je me suis orientée vers l'intérim et j'ai suivi une formation de téléopératrice. Aujourd'hui, je suis télévendeuse par intérim au sein du centre d'appels du Crédit Agricole, à Amiens ». Pour Samira, l'intérim est un choix. Elle explique y trouver une liberté qui la séduit. Aussi, dans de nombreux cas, les salariés passés en formation se révèlent des éléments motivés et moteurs sur les plateaux.

Et le turn-over ?


Il ne suffit pas de trouver la perle rare, encore faut-il la fidéliser. « Le turn-over avant six mois d'ancienneté coûte cher à l'entreprise. Un junior va être moins productif qu'un senior qui va prendre 12 à 14 appels par heure », estime Ludovic Baumgartner. Le mal endémique des cen-tres de contacts touche aussi les sociétés de travail temporaire. Certains bassins d'emploi sont en effet particulièrement touchés. D'où l'importance pour les centres d'appels de fidéliser leurs effectifs, y compris les intérimaires. « Nous recherchons des intérimaires qui vont être attachés à la marque et non des chasseurs de missions », remarque Nicolas Renou, manager opérationnel au sein du centre de contacts de Tiscali. Le centre du FAI italien peut en effet passer de 400 à 2 000 appels par jour durant les périodes de promotion. L'entreprise diversifie ses prestataires et a recours à deux sociétés d'intérim, une collaboration multiple usitée par la plupart des centres de contacts. « A une époque, nous redoutions de former les intérimaires dans nos structures et à nos techniques de vente et de les voir partir, alors que nous avions investi sur eux », ajoute Nicolas Renou.

De fait, les entreprises de travail temporaire se livrent à une surenchère pour parvenir à fidéliser les intérimaires. Elle prend plusieurs visages : formation, bilan de compétences, chèque-cadeau de parrainage, 1 % logement… Autant d'avantages sociaux visant à retenir les candidatures. Et l'enjeu est de taille. Le coût des ressources humaines sur un centre d'appels représentant 70 % des coûts globaux, on comprend l'importance de ces marchés pour les sociétés de travail temporaire. En augmentant le professionnalisme des profils qu'elles recrutent, en offrant toujours plus de réactivité, elles démontrent aujourd'hui qu'elles savent répondre aux attentes du marché. Lequel est en pleine évolution et toujours à la recherche de plus de flexibilité…

Interview Nicolas Diquéro, directeur associé d'Acemis, cabinet de conseil en relation client.



Quelles sont les grandes problématiques RH des centres de contacts ?


Dans certaines régions, la première des problématiques reste le recrutement. A Paris, plus encore qu'en province, les cen-tres d'appels sont nombreux et la concurrence pour le recrutement des meilleurs éléments s'avère importante. La motivation et le turn-over mal maîtrisé ne font qu'accentuer le problème. Enfin, le niveau d'exigence s'élève : la double compétence - métier et relation client - est de plus en plus souvent nécessaire. Les banques ont besoin pour leurs centres de “banquier à distance”, par exemple. Et puis le décalage entre la demande et l'offre d'emploi persiste car, du fait de leur image, les centres d'appels ont encore du mal à séduire les ressources qu'ils recherchent.

Comment se positionne l'intérim dans ce paysage ?


L'intérim peut être un des leviers pour répondre aux besoins d'un plateau. Souvent la question est posée de manière binaire sous la forme d'un pour ou contre. Ce n'est pas une manière efficace de poser le problème. En effet, il est parfois tellement difficile de recruter des gens correspondant au profil recherché qu'il serait dommage de se priver a priori d'une quelconque source de recrutement. De plus, cela peut répondre aux besoins des entreprises de diversifier les profils. En effet, une trop grande homogénéité des profils est dangereuse pour un centre, tant en termes de performance qu'en termes de gestion sociale. De ce point de vue, l'appel à toutes les formes contractuelles - l'alternance, l'intérim, les contrats aidés…- peut être un facteur d'équilibre sur un plateau

Quel type de solutions apporte l'intérim ?


Dans le cadre d'une activité à forte saisonnalité ou d'activités ponctuelles, du type campagne d'appels, l'intérim apporte une souplesse difficilement remplaçable. D'autre part et contrairement à une idée reçue, il peut également être un facteur positif en matière de motivation. Pour motiver les salariés, il faut travailler sur la diversification de leurs tâches. Par exemple, pour les centres organisés en files de compétences, un système de préqualification par le biais d'un SVI permet d'orienter vers des files simples les appels qui ne nécessitent pas un niveau de compétence important. Pour ces besoins simples et ponctuels, un intérimaire débutant peut paraître tout à fait approprié ; le personnel expérimenté, fixe ou intérimaire fidélisé, peut alors se concentrer sur des missions plus complexes et à plus fort intérêt. Attention, en revanche, à ne pas démotiver les intérimaires que l'on souhaite fidéliser !

Comment se gèrent la motivation et la fidélisation des intérimaires ?


Je ne parlerai pas ici de ceux dont la motivation légitime est de faire leurs preuves afin d'être embauchés en CDI, mais uniquement de ceux pour qui l'intérim est réellement un choix de vie. Pour ceux-là, les motivations sont globalement les mêmes que pour les personnels fixes. Pour garder les meilleurs, il faudra être capable d'accroître l'intérêt des missions. Pour préciser les choses, nous avons réalisé plusieurs enquêtes de satisfaction du personnel dans des centres d'appels qui ont toutes fait apparaître trois points négatifs : la dilution de l'intérêt du travail dans le temps, le manque de perspectives d'évolution et le manque d'initiative. Pour fidéliser, il faut donc d'abord s'attaquer à ces trois points.

Quelles sont les stratégies d'évolution professionnelle dans un centre de contacts ?


Un parcours de progression peut se faire soit par élargissement, soit par approfondissement des compétences. Dans les deux cas, la première étape consiste dans l'apprentissage du cœur de métier. Concrètement, maîtriser son cœur de métier, c'est savoir prendre en charge 80 % des demandes du centre auquel on appartient. Une fois ce cœur de métier maîtrisé, on peut proposer au téléacteur de développer progressivement le nombre de compétences qu'il maîtrise -c'est l'élargissement- ou, au contraire, le solliciter sur un nombre très restreint d'expertises pointues - c'est l'approfondissement. La mise en pratique de ces logiques bouleverse parfois l'organisation et le mode de management des plateaux, mais elles contribuent réellement à mieux motiver et fidéliser leurs équipes.

 
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Martine Fuxa

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