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Relation client : le service public entre dans la danse

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Directive européenne, avènement des nouvelles technologies, poids électoral d'usagers de plus en plus attentifs aux services rendus par les collectivités locales. Les services publics sont en route vers la e-administration et l'optimisation de leurs flux d'information. En ligne de mire la satisfaction des usagers et la rationalisation des coûts. Enquête sur les dispositifs mis en œuvre et leurs enjeux.

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Le service public change. Les nom-breux projets qui s'amorcent ici et là le montrent. Avec des villes qui se dotent de centres de contacts dits “citoyens”, des administrations qui dématérialisent leurs flux d'information et une place toujours plus importante dévolue aux technologies de l'information et de la communication, l'image d'Epinal d'une administration poussiéreuse a fait long feu. Pour preuve, la deuxième édition du Forum européen de l'administration électronique (FEAE), qui s'est tenue à Paris les 15 et 16 décembre 2004, faisait notamment l'inventaire des “bonnes pratiques” issues du secteur privé dont pouvait s'inspirer l'administration. «Dans la sphère publique au niveau européen, on peut identifier cinq points essentiels : le souci des gouvernements locaux de répondre aux demandes des citoyens, une pression forte sur l'efficacité opérationnelle des systèmes d'information, sur la sécurité des réseaux convergés, sur les services rendus par la collectivité et sur la mobilité des solutions », analyse Pierre Créau, P-dg du fournisseur de solutions NextiraOne en France. L'entreprise revendique une forte connaissance des systèmes de communication des collectivités puisque actuellement, selon son président, 65 % des conseils régionaux seraient clients de l'entreprise. Ainsi, les centres de contacts traitant des différents médias font florès dans le service public, souvent relayés par de vastes campagnes de communication. Récemment, le point unique d'accès au renseignement administratif, le 39 39, a même fait les frais de son succès, avec pas moins de 100 000 appels reçus le premier jour ! « Les demandes d'informations des collectivités seront traitées par des centres de contacts multimédia avec des bases de données très performantes permettant de donner des réponses complètes et rapides et d'orienter l'appelant vers l'interlocuteur adéquat », souligne Pierre Créau. Et, partout en France, les villes et les régions se mobilisent pour améliorer leurs systèmes d'information. « Il s'agit d'un défi que partagent plusieurs pays en Europe et qui consiste à améliorer la communication avec le citoyen, à accroître l'efficacité pour les utilisateurs et à maximiser le retour sur investissement », explique Gabriel Karam, responsable du développement de la zone Europe de l'Ouest d'Alcatel. Si les projets qui se créent vont dans le sens d'une relation simplifiée avec l'usager, les incitations à cette modernisation de l'administration et de ses systèmes d'information s'inscrivent dans une logique européenne (voir encadré p.12). Le but ? Moderniser les outils et les rendre compatibles à l'échelle des vingt-cinq.

Fluidifier la relation


Une affaire de longue haleine qui révèle de fortes disparités au sein de l'Europe. « Dans le domaine public, des directives européennes poussent les pays vers la e-administration, avec un certain nombre de moyens pour mettre en place ces nouvelles solutions », souligne Pierre Créau. Ainsi, les budgets du public sont alloués, non seulement aux centres de contacts, mais également à des opérations périphériques comme la gestion électronique des documents. « L'Europe connaît une situation pour le moins disparate. Les Irlandais ont, par exemple, un état civil totalement virtuel quand les Allemands en sont aux balbutiements », souligne Thierry Hue, directeur marketing et grands comptes de Numway, une filiale de Safig. L'entreprise réalise des activités de traitement de documents, de numérisation et d'indexation. Elle a numérisé pas moins de 5 millions de vues de microfilms et 3 millions d'états civils anciens (plus de cent ans) en 2004... « La plupart des collectivités disposent de différentes entités dispersées et interconnectées par des réseaux informatiques et téléphoniques, d'où la nécessité d'homogénéité et de flexibilité du réseau de communication. Les solutions de communication IP participent à donner un avantage compétitif aux collectivités locales », remarque Gabriel Karam. De fait, les ramifications qui gravitent autour d'une collectivité sont nombreuses et représentent autant de points de contacts. Au sein d'une mairie, notamment, de nombreux sites cohabitent. D'où la nécessité de rationaliser les installations avec un souci constant de qualité. « Globalement, nous ressentons que, chez les acteurs de la sphère publique, les moyens sont réduits. Il n'y a pas de politique marchande au sens strict et l'on remarque une hiérarchisation différente des critères de sélection. Mettre en place les meilleurs niveaux de qualité est la clé d'entrée. Et l'aspect coût n'est pas mis en évidence de la même manière que dans le privé », témoigne Emmanuel Mignot, P-dg de l'outsourceur Teletech International. Le routage intelligent des appels entrants. Tel est l'un des enjeux majeurs de tous les centres de contacts et aussi l'une de priorités des centres de contacts “citoyens”.

Accroître l'efficacité des systèmes


A Lyon, par exemple, la ville s'est dotée d'un service de renseignement avec un numéro unique comprenant aussi un dispositif de serveur vocal. Dans son sillage, la ville de Paris a également lancé, il y a quelques mois, son numéro gratuit de renseignement. Et les exemples récents de création de centres de contacts foisonnent. Avec un objectif en ligne de mire : gagner en efficacité dans le renseignement du citoyen et mettre en relation l'appelant et le correspondant adéquat au sein de la sphère publique. Autre exemple significatif en matière de collecte des cotisations sociales. Une problématique loin d'être simple. « Au sein des Ursaff, étant donné la complexité engendrée par les diffé-rents accords de bran-ches et d'entreprises, il convient, au travers de la base de connaissances, de réaliser un premier niveau d'accueil et d'aller chercher l'expertise né-cessaire », explique Yan Paon, marketing manager de l'activité centres de contacts de NextiraOne France. Tel un leitmotiv, la plupart des projets mettent l'accent sur leurs bases de connaissances (voir exemple du 39 39 p.13). Autre point commun, le degré d'exigence souhaité par la plupart des services publics décidant l'ouverture d'un centre de contacts. Au sein du Trésor Public, notamment, la volonté de développer le service “usager-client” s'affiche clairement. La direction générale a en effet pris neuf engagements sous la forme d'une charte visant trois objectifs : “faciliter les contacts, simplifier les démarches et améliorer l'écoute des usagers”. Parmi ces mesures phares, l'administration prévoit de répondre dans un délai de quarante-huit heures à chaque appel et en moins de trente jours pour les courriers papier ou électroniques. Des communications et des engagements fermes qui augurent d'un renouveau indéniable des mentalités dans le public. « Dans le secteur privé, nous sommes le plus souvent dans des logiques d'urgence et de rentabilité. Les actions sont souvent rapides et incisives, remarque Thierry Hue. Dans les projets des collectivités locales, les études sont de longue haleine, avec un souci constant de perfection. La notion de compromis est moins acceptée dans le public que dans le privé où l'efficacité prime. Si l'importance d'un budget nécessite que les dépenses soient étalées sur trois ou quatre années, c'est l'option qui sera retenue par les donneurs d'ordres du public. »

Satisfaire l'usager, un enjeu majeur


« L'une des principales sources de revenus des collectivités provient de la taxe professionnelle versée par les entreprises. Ainsi, les communes et les collectivités locales sont en compétition et se doivent d'investir pour accroître leur compétitivité », analyse Gabriel Karam. Un enjeu économique qui donne un éclairage supplémentaire à cette compétition sur les services, présente aujourd'hui au sein des collectivités. « La notion de client et l'analyse de sa valeur ne sont pas présentes de la même manière dans le public; le client n'étant pas ramené à sa valeur potentielle», remarque Emmanuel Mignot. Si les directives de Bruxelles ont participé à l'accélération des projets de modernisation, l'impact d'image auprès des électeurs motive également fortement les pouvoirs publics. « L'une des préoccupations des collectivités, gérées par des élus, est de satisfaire les électeurs. La création de centres d'appels citoyens est donc devenue un enjeu important. De plus, lors d'alertes pour des problèmes de fuites de gaz, d'alertes industrielles, de risques de tremblements de terre... par exemple, la responsabilité des collectivités locales et des élus entraîne une forte volonté d'être capable de prévenir les citoyens », analyse Pierre Créau. Parallèlement, la tendance aux agents déportés est forte, à l'instar des “points Poste” dans les zones rurales qui permettent à un commerçant de proximité d'accomplir les missions de service public dévolues habituellement aux agences postales. Autant de préoccupations tournées vers le citoyen et visant à une plus grande proximité. Et tous les choix sont politiques, à l'image de celui de la structure du centre de contacts. « Les centres d'appels formels sont dédiés à 100% à la structure mise en place, et les centres d'appels informels sont gérés en temps partagés par des agents par ailleurs dévolus à d'autres missions. De manière générale, lorsque le niveau d'expertise devient très pointu, on retrouve des structures privilégiant l'informel », explique Pierre Créau.

Vers un nouvel ordre relationnel…


D'ores et déjà, les usagers sont de plus en plus considérés comme des clients. Si le message est clair au sein des directions à qui l'enjeu, entre autres électoral, d'une qualité de service irréprochable n'aura pas échappé, la déclinaison au sein des agents dédiés à ces missions de services, reste plus ardue. « Pendant longtemps, les collectivités n'ont pas considéré que leur système de communication était stratégique. Désormais, avec les évolutions vers le multimédia, nous allons assister à un saut complet de nombre de collectivités et à une amélioration significative des services rendus en Europe dans les années à venir », conclut Pierre Créau. Des évolutions rapides qui devraient changer radicalement l'accès aux systèmes d'information des services publics et leur image auprès du public…

Etude de cas : Tarbes et Cannes : deux approches différentes


Au sein de la mairie de Tarbes, le choix s'est porté sur un centre d'appels informel. Au bout du fil, l'un des 250 salariés de la mairie, tous habilités à traiter les appels, en fonction des compétences et des disponibilités de chacun. « Cela permet une grande flexibilité », note Yann Paon, marketing manager de l'activité centres de contacts de NextiraOne France, maître d'œuvre du projet. Autre problématique autre choix, du côté de Cannes où la Ville a récemment opté pour l'installation d'un centre de contacts formel et multimédia. Le principe ? Les appelants disposent d'un numéro unique et les personnels du centre se consacrent uniquement à cette activité, en tant qu'agents salariés. « La base de connaissances dont dispose les téléconseillers permet d'identifier les personnes compétentes pour répondre aux questions formulées », explique Yann Paon. Le dispositif est, de plus, couplé avec un Intranet permettant aux citoyens de suivre leurs dossiers. « En général, au sein des mairies, nous travaillons avec différents interlocuteurs, les responsables informatiques, le directeur général des services pour les mairies de plus de 10 000 habitants, ainsi que les intégrateurs de solution de gestion de base de données », explique Yann Paon. Des interlocuteurs multiples et travaillant de concert sur ces projets transversaux.

Juridique : Une administration en voie de réforme


Une directive européenne bientôt retranscrite et un vaste projet hexagonal. Tels sont les fers de lance de la réforme de l'administration en cours. C'est la directive européenne du 17 novembre 2003 qui définit les conditions de réutilisation des informations produites par le secteur public. Ces informations concernent les centres de contacts mis en place au sein du secteur public. A savoir, les règles d'une réutilisation à l'initiative du secteur public ou privé seront transposées dans le droit français prochainement sous la forme d'une ordonnance. Quant au projet français de réforme de l'Etat, il porte un nom de code : ADELE (ADministration ELEctronique). Au total, l'Etat a décidé d'affecter, via ce projet, 1,8 milliard d'euros à l'administration électronique sur la période de 2004 à 2007, l'objectif étant de faire réaliser des gains de productivité à l'administration. Au total, les projets concernent près de 200 téléservices publics et 7 000 sites internet.

Etude de cas : « Insee Contact travaille, en quelque sorte, à sa perte »


Le service Insee Contact, réparti sur trois plateaux géographiques à Rouen, Strasbourg et Paris, compte une trentaine d'agents. Parallèlement à cette structure, cinq agents s'occupent du back-office et gèrent les questions restées sans réponse en agissant sur le contenu éditorial des sites ainsi qu'en veillant à la qualité de la base archive évaluée par sondage. « Le service a été constitué pour prendre en compte les contacts que l'on a sur les quatre médias - le téléphone, le courriel, le fax et le courrier - et a été créé pour répondre aux demandes d'informations statistiques », explique Jean-Patrick Bernard, chef du département Insee Info Service. Et les demandes sont nombreuses. Cent mille appels par an et 15 000 à 20 000 courriels annuels. « Notre objectif est de rendre autonomes les appelants en les renvoyant sur les sites de l'Insee et sur les 24 directions régionales qui disposent de leur propre production d'information », explique Jean-Patrick Bernard. Une fonction d'aiguillage qui provoque un effet “système” et engendre l'amélioration des contenus des sites. « Cette autonomie, que l'on souhaite développer, nous permet de limiter les contacts téléphoniques et les courriels. En quelque sorte, le service travaille à sa perte », analyse Jean-Patrick Bernard. Ayant remarqué que la majeure partie des appels concerne des demandes de valeurs d'indices, Insee Contact décide de mettre en avant ces valeurs sur le site et propose un abonnement automatique par mail. Résultat ? « Nous avons 30 % d'appels en moins, notamment grâce à la création du service Insee Contact. La possibilité de recevoir les appels dans les directions régionales a parallèlement été fermée », répond Jean-Patrick Bernard. Quant aux effectifs, ils sont passés de deux cent cinquante agents répondant aux demandes en temps partagé à une cellule d'une trentaine d'agents, à temps plein, au sein d'Insee Contact. Un choix de l'internalisation qui reste très culturel, de l'avis de Jean-Patrick Bernard. Et une organisation qui aura engendré des gains en matière de formation des agents et d'homogénéité des réponses fournies.

Zoom : SVP, un service né des besoins de l'administration


Vous souvenez-vous ? Les grands standards à fiches où SVP recueillait les appels lors des grandes campagnes étatiques ou encore pour de nombreuses émissions de télévision découvrant les vertus de l'interactivité. Il s'agit bien là de l'ancêtre même des centres de contacts en France. Si l'entreprise, fondée en 1935, a bien sûr évolué, elle reste gravée dans les esprits telle une marque de fabrique, associée au petit écran et au service public. « Historiquement, notre structure s'est faite connaître sur des missions de service public », souligne Caroline Ratte, directeur général de SVP Multi- Info. Et l'entreprise a créé notamment en 1995, le service d'informations “Info-Emploi”, à la demande du ministre du Travail. Actuellement, avec 6 000 clients et 11 000 utilisateurs, SVP Multi-Info se positionne comme une entreprise de conseil par téléphone. Elle dispose de 150 positions et emploie 400 personnes. « De l'attribution d'un numéro de téléphone à la création d'un service, SVP Multi-Info intervient dans le cadre de services d'informations, de campagnes de communication, d'opérations de fidélisation, pour répondre par téléphone ou par Internet aux clients sur des thèmes déterminés », souligne Caroline Ratte. Dernière campagne institutionnelle en date : une vague d'information par téléphone sur le recrutement des personnels pénitenciers.

 
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Martine Fuxa

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