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Olivier Genuite (ELEMENS) : « L'architecte a un rôle social à jouer ! »

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Concepteur du centre clients de la Générale des Eaux à Saint-Maurice, récompensé lors des derniers Casques d'Or, Olivier Genuite, patron du cabinet d'architecture Elemens s'est découvert une nouvelle vocation. Il a servi d'intermédiaire entre les directions et un personnel pas franchement pressé de rejoindre le centre en création. Aujourd'hui, il est fier de sa mission, qu'il veut sociale : élaborer des centres d'appels, mais aussi entendre les doléances des salariés et améliorer tant que possible leur futur cadre du travail.

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Quel est le rôle de l'architecte dans les centres d'appels ?


L'architecte a toujours eu un rôle social dans la communauté. Dans les centres d'appels aussi, nous devons avoir le souci du social. Ce rôle aujourd'hui va dans le sens de l'histoire. Les grands centres de télémarketing sont animés par un souci de rentabilité, pas de gestion sociale. Ils font appel surtout aux vacataires et aux étudiants. Alors, pas d'aménagement particulier sinon celui destiné à caser un maximum de personnes avec un minimum de budget. La VPC n'est pas non plus très généreuse dans les budgets d'aménagement. La recherche d'ergonomie se fait plus dans le domaine de relation client. Ici, les centres sont gérés en interne, et la pression syndicale fait rechercher des solutions haut de gamme.

Vous avez essayé le social sur le terrain ?


Nous avons travaillé pour les nouveaux centres de la Générale des Eaux. En province, ils n'ont pas eu de problèmes sociaux particuliers car le personnel était mis devant le fait accompli : il devait quitter l'agence pour aller travailler dans le centre d'appels ou bien la quitter tout court. Mais à Paris, cette recette n'a pas marché, la Générale a dû affronter une grève. La cause principale était la peur de ce passage du travail en agence, parfois dans un bureau individuel, vers le centre d'appels : le bruit ambiant, les conditions de travail infernales, le stress. Les gens de la Générale nous ont dit : "Continuez à travailler sur ce projet mais il n'est pas certain qu'il sorte". Nous leur avons proposé d'essayer de parler au personnel. Nous sommes allés voir les syndicats et nous leur avons expliqué, point par point, que les règles existantes de protection du cadre de travail allaient être respectées, voire dépassées dans le futur centre. Nous n'étions pas habilités à discuter les choix de leur direction, mais nous étions en mesure de faire de telle sorte que cela soit le moins pénible possible.

Que vous a apporté le travail avec des syndicats ?


Les délégués au comité d'hygiène et sécurité sont des gens qualifiés, ils ont des notions d'ergonomie, des connaissances du Code du travail. Ils nous ont apporté des choses concrètes. Par exemple, un délégué FO m'a signalé qu'il était très pénible de traîner les vingt kilos du caisson à roulettes sur une moquette épaisse jusqu'à son poste de travail. Nous avons répondu en proposant de mutualiser la documentation papier sur les postes. Maintenant, chaque opérateur dispose d'une petite valise qu'il garde dans les vestiaires, avec son nom dessus. Dans la valise, il range son casque, ses crayons, ses objets personnels. Et si un client vous demandait d'empiler les postes de travail, sans égard pour le social ? Cela arrive. Parfois on nous appelle pour cacher la misère. Eh bien, nous expliquons au client que, pour ce qu'il cherche à faire, il n'a vraiment pas besoin de nous.

Vous proposez au client de payer pour quelque chose que les fabricants de mobilier lui offrent. Quelle est votre valeur ajoutée ?


Notre rôle est de poser les bonnes questions dès le départ. De quoi avez-vous besoin ? Des caissons ou des rangements fixes ? Combien de papiers étalés sur le bureau ? Voulez-vous organiser le travail par groupes ? De combien, et pourquoi ? Enfin, voulez-vous faire différemment de ce qui a été prévu au départ ? Et quels sont les projets d'évolution du centre ? Nous démontrons à nos clients que faire des choses bien ne coûte pas plus cher que de les faire mal. Sur le mobilier, on peut toujours tirer les prix vers le bas car c'est un marché très concurrentiel. Mais sur l'éclairage ou l'isolation phonique, une mauvaise réalisation peut se solder par des mouvements du personnel, comme on l'a déjà vu. Quant aux coûts, les honoraires de l'architecte sur un chantier sont en moyenne entre 12 % et 15 %. Chez Elemens, nous travaillons pour 8 % environ, qualification du site en amont comprise. A l'opposé, les fabricants de mobilier se proposent de faire l'aménagement gratuitement. Mais notre différence, c'est que nous livrons des locaux avec l'adhésion du personnel incluse dans le tarif !

Le nouveau centre de la Générale des Eaux est-il le précurseur des centres d'appels de demain ?


Le centre de Saint-Maurice est bien fait mais il est très classique, bâti avec des ratios standards de coût, d'espace, d'informatique. Je voudrais essayer autre chose. Les postes de travail dans les centres ne sont plus attribués. Alors à quoi servent-ils ? A occuper la place et augmenter les coûts. Pourtant le téléphone sans fil existe, l'informatique mobile aussi. Essayons de construire des centres d'appels sans postes de travail fixes, sans sièges de bureau, juste des casques mobiles pour l'opérateur qui pourrait se déplacer comme bon lui semble. Quand il a besoin d'être assisté, il s'approchera du superviseur. Et quand il a besoin de s'isoler, il ira s'isoler.

Un peu futuriste, non ?


Cela va aujourd'hui dans le sens de l'histoire. Par exemple, à la GMF, il n'y a plus de superviseurs mais des assistants de production. Ils n'ont plus le rôle de Père-Fouettard. Et les chargés de clientèle dans les assurances, dans la banque, chez des constructeurs autos, sont des gens responsables et qualifiés. Ils viennent souvent des agences, avec une réelle expérience. Essayons de donner à ces opérateurs les moyens d'être autonomes, d'être valorisés dans leur travail.

 
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Alexis Nekrassov

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