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Une affaire de responsabilisation

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L'absence ou l'insuffisance de programmes de formation se fait encore cruellement ressentir dans les centres de contacts. Des enjeux, tels que la maîtrise d'un turn-over encore excessif ou le passage à une approche qualitative, devraient pourtant engager plus avant les réflexions sur les vertus de la formation.

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Pour un centre de contacts, les enjeux de la formation varient en fonction du rôle et de la responsabilité que l'entreprise veut accorder au centre d'appels. « Il n'est pas concevable de traiter sur le même plan un centre d'appels qui fait de l'aiguillage premier niveau et un centre d'appels qui va répondre de façon précise à des questions pointues : les enjeux de la formation ne sont évidemment pas les mêmes », estime Jean-François Gallouin, directeur général de Metaphora. Dans le même ordre d'idée, les enjeux de la formation sont différents selon que l'entreprise internalise ou externalise son centre d'appels. Ces aspects stratégiques et tactiques ont un impact fort sur la formation. Dans le cas d'un centre d'appels qui fait de la réorientation, le dispositif de formation reste relativement léger car, pour l'entreprise, l'enjeu n'est pas premier. Deux types de formation doivent être cependant dispensés : la "manipulation" du centre d'appels à proprement parler, comme la maîtrise de la réorientation des appels ou la prise de notes sur un système d'information, et la partie métier sur la manière d'accueillir le client au téléphone. En revanche, lorsque l'entreprise met en place un centre d'appels dans lequel elle veut véritablement confier des missions aux téléconseillers, l'enjeu devient très important car elle transfère sur le centre une partie de son métier. L'entreprise joue alors sur l'image qu'elle véhicule à l'extérieur. Or, et c'est une lapalissade, la première impression laissée conditionne souvent la future relation avec le client. Les enjeux de la formation sont alors décisifs et l'entreprise doit être parfaitement précise sur les objectifs donnés au centre d'appels et sur la fonction qu'elle lui attribue. Un téléconseiller formé est en principe un téléconseiller compétent. Partant de cet axiome, la compétence lui offre des perspectives d'évolution professionnelle avec l'opportunité de s'investir plus longtemps dans la structure qui lui propose une formation adaptée. La formation se présente ainsi comme un outil tout à fait opérationnel pour lutter contre le turn-over. « Tous les téléconseillers ont été formés, reformés, voire surformés. Mais, malgré d'importants budgets délivrés, la formation n'a pas toujours été adaptée aux besoins réels, estime Corinne Juilhert-Detroyat, directeur général de Téléaction et responsable de la commission RH de l'AFRC. Or, aujourd'hui, on se rend compte que l'un des premiers points à travailler en formation est tout simplement de leur faire prendre conscience de leur compétence. » Des comportements caricaturaux sévissent encore dans les centres de contacts. Ainsi, sous couvert d'une certaine formation, le téléconseiller va répéter des scripts préétablis ne lui laissant aucune marge de manoeuvre. La formation adaptée est donc celle qui fera prendre conscience à un individu qu'il dispose d'un certain nombre de compétences qu'il peut exploiter vis-à-vis du client. Cette responsabilisation du téléconseiller est un moyen efficace de valoriser son métier. « Il s'agit avant tout de partir des compétences attendues et d'adapter les objectifs de formation correspondants », conclut Corinne Juilhert-Detroyat.

LA FORMATION VECTEUR DE QUALITÉ


Les entreprises se contentent encore souvent de mesurer l'efficacité de leur centre de contacts par des ratios quantitatifs en négligeant l'aspect qualitatif. Dans la plupart des cas, une formation très basique est dispensée aux candidats qui doivent affronter un métier stressant et parfois très répétitif. L'usure est rapide et engendre un turn-over important. « L'idée est de sensibiliser les téléconseillers à leur mission afin de ne pas s'arrêter aux seules considérations de productivité, estime Mireille Nallet, directeur de la formation et du développement chez TCM. Ils doivent être capables d'établir une véritable relation avec les clients ou futurs clients, avoir conscience que le client fait vivre l'entreprise. Lorsque le téléconseiller comprend la nuance, les résultats sont probants. » Encore faut-il que la formation initiale soit suffisante. L'enjeu est, ici, d'accompagner le centre de contacts vers des objectifs qualitatifs. « Aujourd'hui, les entreprises réalisent que fidéliser les clients est la clé de la rentabilité. Pour ce faire, elles doivent avant tout veiller à leur satisfaction et même se donner les moyens d'anticiper leurs attentes », estime Robert-Denis Moulloud, Dg et fondateur d'Obvium. Un des grands enjeux est donc d'adapter la formation pour répondre aux attentes du client. « Il y a encore dix ans, nous réalisions pour les centres d'appels des formations qui duraient quatre jours, complétées par du coaching une journée par mois pendant une année, explique Sylvie Bernier, responsable pédagogique chez Téléaction. Aujourd'hui, pour ce même client que l'on a fidélisé, nous dispensons une formation en phase d'une journée et un mois après du coaching. » L'heure est au sur-mesure car le public des téléconseillers est très hétérogène. Certains d'entre eux, compétents dans la relation clientèle, auront besoin d'être motivés et stimulés, d'autres nécessiteront un suivi plus approfondi sur les techniques de la communication téléphonique, etc. En général, le coaching est un accompagnement individuel au poste de travail ou en salle ; il est complémentaire d'une première formation de base. Si le coaching est totalement personnalisé et permet de développer les compétences en situation professionnelle, de son côté, la formation en groupe favorise les échanges d'expertises. L'objectif est donc de corréler ces deux ressources pour une gestion optimisée des compétences.

FORMATION DE L'ENCADREMENT : UN INCONTOURNABLE


Dans la plupart des centres de contacts, l'entreprise a instauré un encadrement de proximité représenté, dans les trois quarts des cas, par des superviseurs qui ont une approche très quantitative. Ce sont le plus souvent d'anciens téléconseillers tout à fait performants pour traiter des appels, mais qui maîtrisent mal les bases du management. Un des enjeux de la formation est donc de former les superviseurs, non seulement à ce rôle de contrôle de la productivité, mais aussi de transmission du savoir. Il s'agit de faire comprendre aux superviseurs que le contrôle ne peut s'entendre au seul sens de "flicage", mais qu'ils doivent aborder leur fonction sous l'angle de la formation, de l'aide aux téléconseillers en difficulté, etc. Un rôle finalement pédagogique qu'ils sont encore loin de maîtriser faute de formation adaptée. Le superviseur se doit également de maîtriser les techniques de communication au téléphone, ce qui n'est souvent pas le cas, l'entreprise mettant plus l'accent sur une communication produit que sur la forme, bien que cette dernière conditionne, dans 80 % des cas, la satisfaction du client. L'encadrement des centres d'appels demande une maturité professionnelle qui ne peut s'acquérir qu'après plusieurs années d'expérience. Le secteur des centres de contacts est trop récent et a vécu une croissance trop rapide pour disposer d'un potentiel suffisant de managers réellement formés et expérimentés. La professionnalisation vers laquelle tendent les centres d'appels passe aussi par celle de leurs managers. Les directeurs de centres de contacts viennent d'horizons très différents : du réseau commercial de l'entreprise, à la gestion en passant par les départements techniques. « Leur point commun est bien souvent le manque d'aptitude pour diriger un centre de contacts », constate Anne-Marie Lanchas, responsable de la formation chez CCA Solutions. Sans compter que les pressions sont fortes, que ce soit celles du marketing, qui exige la mise en place d'opérations, de la direction commerciale qui attend des ventes, ou encore de la direction générale qui veut assurer la rentabilité. Une formation adaptée est donc indispensable. Autant d'éléments pour ne pas négliger la formation des formateurs et des managers. D'une manière générale, il est temps que les entreprises considèrent la formation comme l'un des facteurs clés de succès de leur centre de contacts. Il est temps de fidéliser les téléconseillers en leur offrant des perspectives sur un métier encore trop peu valorisé.

Des surdiplômés aux compétences sous-utilisées


Selon une étude de la CFDT, initiée en 2001 et présentée en mars 2002, le niveau de diplôme influe fortement sur l'avenir professionnel envisagé dans l'entreprise. Ainsi, 45 % des salariés ayant le BEPC envisagent de rester à long terme, contre 15,4 % des salariés entre bac + 2 et bac + 4 et 1,4 % des salariés au-delà de bac + 4. Ces derniers ont, pour 34,1 %, un projet professionnel par ailleurs et 27,7 % continuent de chercher un autre emploi. Le sentiment de sous-exploitation des compétences grandit avec le niveau d'études, sentiment encore renforcé dans les centres d'appels externalisés. Cela explique que l'absence de perspectives professionnelles soit plus durement ressentie par les salariés dont les compétences sont trop peu utilisées (39 %).

Les bénéfices du tutorat


Certains responsables de centres d'appels insistent sur le développement des capacités cognitives des téléopérateurs. La dimension cognitive est en effet primordiale dans l'adaptation des téléopérateurs aux diverses évolutions de leur travail. Au-delà de leur compréhension de ces changements, il s'agit surtout d'accompagner des stratégies d'apprentissage plus individuelles. Le développement cognitif est fait d'une suite de petits apprentissages en situation qui doivent être "ancrés" pour être réellement acquis. D'autant que telle pratique adaptée à une situation nouvelle (utiliser telle base de données, faire face à des questions inhabituelles, etc.) amène quelques remises en cause des modalités concrètes de travail et de raisonnement, voire des réflexes logiques, mis en oeuvre jusque-là. D'où l'importance du tutorat, réalisé selon les centres par les managers ou par des techniciens de fonction support. Alors que le téléopérateur est quasiment toujours seul en ligne avec le client, le tutorat a pour fonction essentielle de faciliter ses apprentissages par une médiation adaptée. Source : Centres d'appels : la GRH confrontée à l'industrialisation des services, par Patrick Perrier, directeur d'études d'Entreprise et Personnel - Avril 2002.

 
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Anne-Françoise Moal

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