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UNE PERSONNALISATION TIMIDE SUR LE WEB

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Plus qu'un élément différenciant, la personnalisation de la relation client tend à devenir un must pour les annonceurs. Un phénomène qu'accentue le boom des réseaux sociaux. Malgré une prise de conscience réelle, les marques françaises gardent une longueur de retard.

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«Mieux une marque connaît ses clients, plus elle sera en mesure de personnaliser sa relation avec eux, et plus elle aura de chances de vendre», affirme Jean-Roch Bontemps, chef de projet à L'Echangeur. Ce centre européen des pratiques innovantes de la relation client incite les responsables d'entreprise à se projeter dans le futur et à imaginer des stratégies adaptées en leur proposant des parcours personnalisés. Les annonceurs l'ont bien compris: pour qu'un prospect devienne client, il faut attirer son attention, le séduire, le convaincre. Et pour ce faire, l'un des meilleurs arguments reste de lui parler comme à un vieil ami, de nouer avec lui une relation de complicité. C'est l'objectif de la personnalisation. Pour Corinne Brouard, du département marketing et commercial de Demos, «c'est une tendance lourde du marché, qui a commencé avec la personnalisation de l'offre de produits et de services». Depuis les années quatre-vingt-dix, l'offre est banalisée et la demande saturée, analyse-t-elle. C'est dans ce contexte que les entreprises ont découvert le marketing relationnel, passant d 'une logique produit aune logique client. » Un client dont on connaît l'état civil, l'historique, les comportements d'achat, la situation de famille et même les hobbies... Soigneusement enregistrés dans une base de données. Bien sûr, la constitution de cette base de connaissances est un travail de titan qui demande du temps, de la patience et des moyens. «Dans beaucoup d'entreprises, les services sont cloisonnés et ne partagent pas l'information client», observe Frédéric Testard, consultant marketing chez Epsilon International, spécialiste de l'e-mail marketing. Les commerciaux détiennent une pièce du puzzle, le service facturation en possède une autre et le SAV une troisième, mais ne communiquent pas. En ce sens, la personnalisation est la finalisation d'une stratégie d'entreprise, initiée par la direction générale.

Gare aux abus!

Si la personnalisation est un atout, l'excès de personnalisation peut être contre-productif En cas d'intrusion trop forte dans la vie du consommateur, ce dernier peut développer un rejet de la marque et - pire - du distributeur lui-même. Fini le «push» non ciblé et ses risques d'abus, la tendance est au «pull». Une stratégie à laquelle se prêtent les réseaux sociaux. «Sur Facebook, la marque fait le premier pas, mais le client doit quand même venir à elle, en s'inscrivant sur sa fan page par exemple», commente Jean-Roch Bontemps. Le consommateur est donc libre de lui dire oui ou non. «Même si l'audience est plus faible, le taux de conversion est plus important», poursuit le chef de projet. Une tendance qui se confirme avec le développement des applications mobiles, à laquelle les internautes s'inscrivent volontairement.

Aussi efficace, l'«appli» n'a pas le côté «polluant» de l'e-mail, et a fortiori du SMS. Les grandes marques ne s'y trompent pas: toutes lancent actuellement leurs applications, qui, pour l'heure, restent moins commerciales qu'informatives. «Nous n'en sommes qu'aux débuts de l'Internet mobile en France, selon Jean-Roch Bontemps (L'Echangeur). Les réticences du consommateur à saisir son numéro de carte de crédit sur son téléphone portable sont encore très fortes. Demain, nous passerons le cap du paiement mobile.»

Que ce soit pour les réseaux sociaux ou pour les applications mobiles, en matière de personnalisation, les Français font part d'un véritable blocage des mentalités. «Sur les réseaux sociaux, ils ont peur d 'être "tracés "par les annonceurs ou que leurs adresses soient vendues», explique Frédéric Testard. Les annonceurs font aussi part de réticences. Nombreux sont ceux qui sont simplement en mode d'observation et ne savent pas comment utiliser ces réseaux et applications au sein de leur stratégie. Les marques ont aussi peur d'écorner leur image en faisant la promotion d'offres sur le Web. Le problème réside dans un manque de retour d'expérience et trouve aussi des origines plus profondes. Corinne Brouard (Demos) pointe du doigt un frein culturel. «Comme le disait Jean-Paul Sartre, l'enfer, c'est les autres. Cette vision des choses est très française», poursuit-elle. Les Anglo-Saxons font part d'une approche beaucoup plus empathique. Résultat, les marques françaises sont largement en retard par rapport aux marques américaines. L'exemple le plus frappant étant Twitter: des millions de comptes sont ouverts aux Etats-Unis alors que moins de 150 000 le sont en France. De toute évidence, le Web n'est pas encore exploité au maximum de ses possibilités dans notre pays.

Des risques de dérives?

Une question se pose alors: jusqu'où les marques peuvent-elles aller dans cette logique de connaissance et de personnalisation? Y a-t-il un risque de dérive? Encore nombreux il y a deux ans, en pleine heure de gloire de l'e-mailing, les abus se font de plus en plus rares. «C'est au consommateur de veiller au grain et de protester lorsqu'il reçoit des e-mails ou des SMS abusivement intrusifs», estime Jean-Roch Bontemps (L'Echangeur). De son côté, Frédéric Testard (Epsilon International) met en garde contre les possibilités de ciblage comportemental, où des réseaux de sites se partagent des informations à l'insu des internautes. Cette technique de publicité consiste à personnaliser les contenus promotionnels en fonction du comportement des internautes (notamment de l'historique des pages visitées, des recherches effectuées sur les sites, des produits mis en panier et/ou achetés en ligne...), pour ainsi identifier précisément leurs centres d'intérêt. «Dans ce cas, nous basculons dans l'hyperpersonnalisation», précise-t-il. Car à abuser de la poule aux oeufs d'or, les annonceurs pourraient bien finir par la tuer. . . Comme ils l'ont fait, il y a quelque temps, avec l'e-mail.

CANNELLE LINGERIE
Une communication personnalisée pour chaque cliente

L'enseigne de lingerie féminine Cannelle s'est dotée de nouveaux outils pour mieux répondre aux besoins de ses clientes.

«C'est votre anniversaire, Cannelle vous réserve une offre spéciale...» Désormais, chez Cannelle, chaque cliente est unique. C'est, du moins, le message que cherche à faire passer l'enseigne de lingerie féminine du groupe Mulliez, qui vient de mettre en place un nouveau programme de fidélité avec le concours d'Inbox, spécialiste du traitement des données à des fins marketing et commerciales. L'enseigne a adapté l'ensemble de ses mailings au profil de ses clientes, qu'elle informe, par e-mail ou courrier postal, des nouveautés et des offres qui leur sont réservées. Les nouvelles clientes, par exemple, sont accueillies à l'aide d'une offre de bienvenue qui les incite à revenir en magasin. «Auparavant, nous n'avions pas de connaissance suffisamment approfondie de notre clientèle», confie Régine Advielle, responsable de l'image chez Cannelle Lingerie. Avec un programme de fidélité pesant environ 60 % du chiffre d'affaires et auquel adhèrent plus de deux clientes sur trois, l'enseigne était à la recherche d'un accompagnement sur ses outils de fidélisation, mais aussi d'un hébergement de ses bases de données marketing.

Une base de données repensée

Fin 2009, Inbox commence par étudier le comportement des clientes de l'enseigne. «Cet audit a révélé que la segmentation en vigueur chez Cannelle n'était plus adaptée au comportement de la clientèle», relate Régine Advielle. Premier dysfonctionnement: trop de données sont obsolètes. Alors qu'elle était mise à jour chaque semestre, la base de données est dorénavant actualisée chaque jour. Dès lors, l'enseigne dispose en permanence d'informations fraîches: nombre de clientes ayant acheté dans tel ou tel point de vente, taux de retour par magasin, panier moyen... Deuxième point faible, les fichiers des points de vente et la base de clientes du siège n'étaient pas unifiés: l'enseigne va y remédier. Une mine d'informations qui lui permet de réaliser des tests grandeur nature: «Par exemple, lors d'opérations de nos ventes privilèges, nous pouvons comparer le comportement des clientes qui ont reçu tel mailing à celui de celles qui n 'ont rien reçu. » Une façon fiable de mesurer l'efficacité des campagnes de marketing relationnel, d'autant que la direction de Cannelle dispose dorénavant d'un accès sécurisé à des tableaux quotidiens de pilotage d'activité, ce qui lui permet d'ajuster ses actions marketing. au jour le jour.

Encore jeune, le programme de fidélité permet à la cliente de cumuler des points lors de son passage en caisse et de bénéficier ainsi de bons d'achats. Cannelle privilégie la fréquence des passages en boutiques plutôt que le montant dépensé: «Nous préférons une cliente qui nous rend souvent visite, même si ses paniers d 'achat sont modestes, à une cliente qui vient une seule fois dépenser une somme importante. la première démontre son attachement à la marque.»

Cannelle privilégie la fréquence des passages en boutique, plutôt que le montant dépensé.

Les clès

- lancée en 1998, Cannelle lingerie, filiale du groupe mulliez, est une enseigne de lingerie féminine d'entrée de gamme - Son réseau est constitué de 130 magasins - la clientèle est âgée de 25 à 45 ans

YVES ROCHER
Des clientes choyées comme des «amies»

Chez Yves Rocher, la cliente se voit proposer une offre sur mesure, quel que soit le canal de communication qu'elle choisit. La marque innove via les réseaux sociaux, pour offrir une nouvelle personnalisation de sa relation client.

Quoi de plus facile que de connaître sa clientèle, quand on la côtoie quotidiennement dans ses propres magasins? Un atout maître, qui n'a pas échappé à Yves Rocher. Propriétaire de 4000 points de vente dans le monde, dont SSO français, et de S04 franchises en France, l'enseigne de cosmétique profite de la relation de proximité qu'elle a tissée avec ses consommatrices pour leur parler sur le ton de la complicité. «Avec une gamme de 800 produits de grande consommation (shampoings, crèmes, gels douche...), tout l'intérêt de la relation client réside dans la relance de la consommation», explique Christophe Coussen, directeur marketing client de la marque. D'où la mise en place d'une communication client fortement teintée d'affect. Bien sûr, depuis S 0 ans,Yves Rocher souhaite un joyeux anniversaire à chacune de ses clientes. En outre, les e-mailings sont tous très personnalisés: nom de la cliente, offres adaptées à son historique...

Très présente on line, l'enseigne propose également à ses clientes d'exprimer leur avis sur son site marchand, www.yves-rocher.fr. Mise en ligne en mai 2010, cette plate-forme communautaire réunit aujourd'hui plus de 6 000 commentaires de clientes. Parallèlement, le "BlogZine», alimenté par des biogueuses salariées du groupe breton, invite les clientes à réagir sur l'actualité de la marque. «Pour nous, il s 'agit d'une autre façon de personnaliser la relation avec nos clientes. Une manière de leur faire comprendre que chacune d'elles est unique», commente Christophe Coussen. Le blog enregistre une dizaine de réactions par article. Yves Rocher est aussi présent sur Facebook, via lR2Live, un service de chat créé par la société lR2tchat. En place depuis décembre 2009, le dispositif a été inauguré par Jacques Rocher, directeur du développement durable de l'entreprise, qui a défendu ses valeurs écoresponsables. Dernièrement, Yves Rocher a renouvelé l'expérience en organisant un chat sur le thème de la minceur. Les internautes pouvaient alors poser leurs questions à Claude Fromageot, directeur la recherche et du développement, et à Céline Laperdrix, docteur en biologie cellulaire.

Des conseillères beauté aux petits soins

En point de vente, Yves Rocher n'est pas en reste en matière de personnalisation de relation client. Dès le premier achat, l'enseigne propose une carte de fidélité. Gratuite, elle dispose d'un verso "magique». Suivant le comportement de consommation de la cliente, la carte affiche un message personnalisé lors du passage en caisse, avec une offre adaptée aux produits achetés ce jour-là. La marque-enseigne segmente sa clientèle en fonction de critères RFM (récence fréquence montant).

Des conseillères beauté Yves Rocher accompagnent les clientes tout au long de leur parcours d'achat. En plus d'être formées à la politique produit, elles connaissent l'historique de chaque cliente et ses habitudes de consommation (via notamment les offres personnalisées qui s'affichent en caisse lors de la présentation de la carte de fidélité) . Au Mexique, au Portugal et en Italie, les conseillères beauté vont jusqu'à se déplacer au domicile des clientes.

A. M

Dès le premier achat, propose une carte de fi délité gratuite et personnalisée.

CARLSON WAGONLIT VOYAGES
Pour un voyage sur mesure

Carlson Wagonlit Voyages propose une carte de fidélité sans contact pour une approche plus personnalisée de sa relation client.

Chez Carlson Wagonlit Voyages, on ne parle pas de client fidèle mais de "client VIP». Pour porter une attention toute particulière à ses meilleurs acheteurs, la filiale du groupe Carlson Wagonlit Travel a décidé de scinder sa clientèle en deux et d'offrir un mécanisme de récompenses à deux niveaux. Ainsi, une carte de fidélité «Découverte" est proposée aux clients dès leur premier achat. Baptisé "VIP» , le second programme de fidélité est attribué, quant à lui, aux clients qui ont déjà effectué plusieurs transactions: ceux-là vont donc bénéficier d'une attention toute particulière. «la classification de chaque client est à la libre appréciation des directeurs d'agence, précise Julien Manceau, responsable de la fidélisation de la société. Nous estimons qu'ils ont un excellent aperçu de la définition du bon client.» Car, chez Carlson Wagonlit Voyages, un bon client peut être aussi bien un "gros panier" qu'un client régulier.

Une personnalisation sans contact

Pour les récompenser, qu'ils soient CSP+, familles ou hommes d'affaires, le réseau a mis en place une carte de fidélité à puce, dotée de la technologie NFC (voir ci-contre). Le choix de Carlson s'est porté sur Adelya, un prestataire spécialisé dans le sans-contact. Lors de l'ouverture de son compte, le client se voit remettre une carte à puce renfermant quantité d'informations sur son profil: identité, historique, habitudes... Dès lors, comme dans n'importe quel programme de fidélité, il cumulera des points lors de chacun de ses achats, lesquels points seront bien sûr convertibles en chèques ou en coffrets-cadeaux.

Mais la grande nouveauté de la technologie NFC réside dans cette fameuse puce: des lecteurs capables de la lire sont progressivement installés dans toutes les agences Carlson, permettant au vendeur de visualiser l'intégralité des informations clients et d'en enregistrer de nouvelles. «Cette technologie est précieuse pour analyser le profil des clients et leur faire une offre sur mesure, estime Julien Manceau. On ne fait bien évidemment pas la même proposition à un couple de retraités et à une famille nombreuse!» En juillet 2010,280 des 3 S 0 agences que compte Carlson Wagonlit Voyages étaient munies de la technologie NFC. Le groupe projette d'équiper l'ensemble de son réseau d'ici à 2011.

A.M.

Carlson a misé sur une carte à puce équipée de la technologie NFC.

La technologie NFC, pour une communication sans contact

l'acronyme NFC signifie «near field communication» (en français, «communication en champ proche»). Cette technologie de communication sans fil à courte portée et haute fréquence permet de faire transiter des informations d'un terminal à un autre, à condition qu'ils ne soient pas distants de plus de 10 centimètres. dans le cas de la carte à puce mise en place par Carlson Wagonlit Voyages, il suffi t à l'agent de voyages de passer la carte devant le lecteur pour que les informations soient lues et enregistrées.

 
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ASTRID DE MONTBEILLARD

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