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COMMENT LUTTER CONTRE L'ABSENTEISME

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Véritable fléau des centres de contacts, l'absentéisme a des conséquences immédiates sur l'accueil des clients. Pour l'endiguer, il est nécessaire d'associer la prévention à la répression.

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@ Fotolia / Harald Richter

> «L'unité de mesure, dans les centres de contacts, étant la minute de travail, la moindre absence met le service en sous-capacité de production et a aussitôt un impact négatif sur les clients», lance Corinne Leclair, directrice générale déléguée du Groupe Arpège Acapela, spécialiste de la formation en relation client. L'absentéisme fait partie des «bêtes noires» des centres d'appels, au même titre que les conflits sociaux.

Il faut dire que dans certains centres (les Franciliens en particulier) , l'absentéisme serait un véritable fléau, mais difficile à quantifier, tant le sujet est tabou. Certes, les bases de calcul du taux d'absentéisme diffèrent d'un acteur à l'autre. Certains tiennent compte des congés maternité (ce qui, dans des centres de contacts à forte population féminine, peut faire flamber le taux d'absentéisme), d'autres pas... Néanmoins, tous les acteurs s'accordent à dire que le taux d'absentéisme serait plus élevé dans le secteur de la relation client que dans la moyenne des entreprises françaises... Dans notre pays, il serait de 7,5 % en moyenne, selon une enquête réalisée en 2009 par l'Observatoire des performances de l'entreprise Cegos. Dans les centres d'appels, il se situerait autour de 8 % à 10 % en province et grimperait aux alentours de 15 à 20 % en Ile-de-France, d'après des intéressés. Pourtant, l'absentéisme n'est pas une fatalité. Suivre certaines consignes peut permettre de l'endiguer efficacement.

1 IDENTIFIER LES CAUSES D'ABSENCE

« En règle générale, les managers s'intéressent moins aux causes de l'absentéisme qu'aux problèmes qui en découlent », observe Antoine Dumas, directeur associé chez Acemis, cabinet conseil spécialisé dans la relation client. Les causes de l'absentéisme sont multiples. On ne tiendra pas compte des congés «incompressibles», comme la maternité ou la longue maladie, pour lesquels il est relativement aisé de trouver une solution de remplacement. A contrario, on se concentrera sur les arrêts brefs et impromptus, qui bouleversent l'organisation du service. A ce sujet, Corinne Leclair (Arpège Acapela) incite ses salariés à la transparence: « Face à un arrêt maladie justifié par un document médical, le management doit inciter ses collaborateurs à rester chez eux jusqu'à la date préconisée par le médecin. Voir un salarié revenir plus tôt, c'est s'exposer à ce qu'il soit de nouveau arrêter quelques jours plus tard, voire à ce qu'il contamine les autres. » Quant aux absences injustifiées, malheureusement fréquentes sur certains plateaux, elles témoignent parfois de soucis personnels de la personne. Pour Corinne Leclair, il est important, dans ce dernier cas, de nouer un dialogue avec le salarié: « Quand un collaborateur rencontre des difficultés personnelles, son travail doit pouvoir être pour lui une roue de secours, un élément de stabilité. Il est, alors, plus important que jamais de construire avec lui une véritable proximité. »

De son côté, Antoine Dumas (Acemis) insiste sur le décalage qui existe parfois entre la vision que le salarié se faisait du métier avant de le pratiquer et la réalité à laquelle il est confronté au quotidien. « Ce décalage peut être décelé dès le recrutement, insiste-t-il. Il nous incombe à nous, employeurs, d'être transparents sur la mission et les conditions de travail de nos futurs salariés, faute de quoi nous semons les causes d'une déception qui peut générer de l'absentéisme. »

Antoine Dumas (Acemis)

En règle générale, les managers s'intéressent moins aux causes de l'absentéisme qu'aux problèmes qui en découlent.

2 METTRE EN PLACE UNE ORGANISATION «BIS» EN CAS D'ABSENCE

Le problème de l'absentéisme, c'est qu'il est éminemment contagieux. Pour éviter un scénario «boule de neige», il est nécessaire de construire, en amont, une organisation «bis» qui évite au service d'être trop engorgé en cas de fort absentéisme. Chez BlueLink, on distingue l'absentéisme prévisionnel (inclus dans les plans de production) de l'absentéisme exceptionnel, qui déclenche une organisation spécifique du travail. Il s'agit d'un process de suivi de chaque cas individuel, mené conjointement par le management et la DRH. Concrètement, lorsqu'un salarié revient après un congé, il est reçu par son manager pour un entretien dit «de reprise», qui a pour but de définir la nature de l'absence, en vue de prendre les mesures adaptées. La recherche d'une solution individualisée se fait au cours d'entretiens avec le coordinateur RH, le médecin du travail ou l'assistante sociale, en soutien du management. « Lorsqu'un collaborateur a des problèmes de santé ou connaît des difficultés personnelles, il nous est parfois possible de prendre des mesures qui vont lui faciliter l'existence, comme un aménagement de ses horaires ou de son poste de travail, explique Marc Breiner, directeur des opérations du groupe BlueLink. C'est aussi parfois l'occasion de procéder à certains recadrages... »

@ ITtockPhoto

Les contre-visites: comment ça marche?

En dehors des possibles visites de contrôle de l'assurance maladie, l'employeur peut solliciter un prestataire privé chargé d'opérer des contre-visites au domicile des salariés. Si elles révèlent une fraude, celles-ci peuvent engendrer la suspension du versement des indemnités complémentaires dues à l'employeur. En cas d'absences répétées et non justifiées, l'employeur peut être amené à prendre des sanctions, généralement prévues par le règlement intérieur de l'entreprise. Dans ce cas, il appartient à l'employeur de faire la preuve:
- Du caractère non justifié des absences constatées.
- Des mesures précédemment prises à l'égard du salarié pour l'informer des problèmes constatés.
- Le cas échéant, du préjudice causé à l'entreprise par ces comportements. En cas de maladie de longue durée, la situation est encore plus délicate.
Certaines conventions collectives prévoient des périodes assez longues de protection durant lesquelles l'employeur ne peut pas procéder au licenciement du salarié. « Dans certains cas, l'employeur pourra évoquer l'obligation de remplacer définitivement le salarié malade, mais ce motif ne pourra être évoqué que dans le cas de salariés hautement qualifiés », précise Valérie Jaunasse, manager chez Cegos.

3 FAVORISER L'IMPLICATION INDIVIDUELLE

Lutter contre l'absentéisme, c'est également s'efforcer de rendre les missions des téléconseillers toujours plus intéressantes. « Les tâches dans un centre de contacts sont souvent répétitives, reconnaît Laurence Chabry, manager des offres relation client chez Cegos. Il faut donc chercher à casser cette routine négative. Un des moyens est de créer du média blending, c'est-à-dire, d'alterner les fonctions au sein du service de téléphone, e-mail, courrier, SMS, etc. »

L'absentéisme est lié en grande partie à la réaction psychologique face aux conditions de travail. « Il faut encourager les initiatives qui diminuent la pression sur les salariés, en incitant à une plus grande autonomie, tant dans le discours client que du point de vue organisationnel », estime Xavier Burot, secrétaire fédéral en charge des centres d'appels de la Fédération CGT des études. Pour le responsable syndical, cette autonomie se traduit, par exemple, par « une liberté et une souplesse dans la prise de pauses, ou l'aménagement de moments de décompression et d'échange entre salariés ».

4 COMMUNIQUER SUR LE COUT DE L'ABSENTEISME ET RECOMPENSER L'ASSIDUITE

Le coût de l'absentéisme est difficile à estimer. Il se compose essentiellement des salaires payés pour un travail non fourni (la rémunération pouvant être à la charge de l'employeur selon les conventions collectives) et des surcoûts engendrés par la mise en oeuvre de solutions compensatoires. L'absentéisme grève les comptes de l'entreprise et pénalise ses salariés. C'est pourquoi certains dirigeants de centres d'appels communiquent ouvertement sur son impact financier. BlueLink a ainsi établi cinq indicateurs de performance, dont le taux de «présentéisme», et a mis en place un système de majoration ou de minoration de l'intéressement, en fonction du taux d'absentéisme. Hélène Clavé, directrice des ressources humaines de BlueLink, explique: « Il s'agit de sensibiliser nos équipes à l'impact de l'absentéisme sur le client final et le donneur d'ordres, mais aussi sur les résultats de l'entreprise et l'intéressement versé aux salariés. » Dans le même esprit, certains centres de contacts versent une prime aux salariés les plus présents. Le téléconseiller perçoit, par exemple, 120 % de sa prime s'il a eu moins de 2 jours d'absence dans le mois, 100 % s'il a été absent 2 jours. Bien entendu, il ne touche rien si la durée excède 2 jours.

Hélène Clavé (BlueLink)

Nous sensibilisons nos équipes à l'impact de l'absentéisme sur le client final et le donneur d'ordres, mais aussi sur les résultats de l'entreprise et l'intéressement versé aux salariés.

5 ENCOURAGER L'ESPRIT D'EQUIPE

La création de liens sociaux fait partie des antidotes contre l'absentéisme. Le climat humain, qui règne dans les services, joue un rôle important dans l'épanouissement des collaborateurs et donc dans leur bien-être au travail. BlueLink a créé, par exemple, de petites unités de travail capables de gérer la relation client de bout en bout. « Les collaborateurs réalisent l'importance du rôle qui pèse sur leurs épaules. C'est un facteur de responsabilisation, mais aussi de motivation », analyse Hélène Clavé (BlueLink). Très souvent les agents de clientèle se plaignent d'une certaine confusion sur leur rôle, sur leur fonction et sur les possibilités d'évolution. Un élément-clé selon Antoine Dumas (Acemis): « Si chaque collaborateur connaît ses fonctions, la partition qu'il doit jouer et sa marge de progression, on élimine bon nombre de facteurs de démotivation, donc d'absentéisme. » «Des collaborateurs heureux font des clients heureux» dit l'adage. Il y a sans doute une part de vrai.

@ Fotolia / endostock

Le rôle de la médecine du travail

Si l'on omet le cas particulier des personnes soumises à une surveillance médicale particulière, les salariés doivent également bénéficier d'un examen par le médecin du travail, dans un délai de huit jours après leur retour au bureau, notamment dans les cas suivants:
- Après une absence d'au moins 21 jours à la suite d'une maladie ou d'un accident non professionnel.
- En cas d'absences répétées pour raisons de santé.
Le médecin du travail peut donc, sur demande de l'employeur, procéder à l'examen d'un salarié fréquemment absent pour vérifier son aptitude au poste qu'il occupe et, le cas échéant, proposer d'éventuelles mesures d'adaptation.

 
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JÉRÔME POUPONNOT

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