« La télévente est devenue un canal de vente à part entière »
B to B Créée en 2003, l'activité Télévente de la direction du Courrier du Groupe La Poste pèse aujourd'hui plus d'un milliard d'euros. Et repose sur huit centres d'appels qui, progressivement, montent en gamme. Les explications du responsable Télévente.
Je m'abonneQuelle est la genèse de l'activité Télévente au sein de la direction du Courrier ? Et comment s'est-elle mise en place ?
Daniel Arandel : Le canal Télévente a été créé pour répondre aux demandes et aux attentes des clients entreprises, avec l'objectif de leur fournir une prestation rapide, souple et efficace, concernant l'ensemble des solutions courrier et colis du groupe La Poste. Des agences ont été créées en 2003, exclusivement sur le marché national, et nous nous sommes développés par paliers. Au départ, nous avons ouvert six centres d'appels, à Lyon, Marseille, Bordeaux, Rennes, Issy-les-Moulineaux et Lille. Ensuite, nous avons renforcé la région parisienne avec l'ouverture de Fontenay et le centre de Lille a été dédoublé sur Villeneuve-d'Asq et récemment sur Valenciennes. L'effectif est constitué à 95 % de personnes qui étaient à la base des postiers.
En mars dernier, la direction du Courrier a lancé le “36 34 Le Courrier Entreprises”. Pour quelles raisons ?
D. A : Nous sommes arrivés relativement tard sur le marché du centre d'appels. A partir de 2003, nous avons commencé à apprendre. Nous avons d'abord ouvert un numéro spécifiquement dédié à la vente et aux commandes des clients entreprises, le Numéro Indigo 0825 329 329. Au fil des ans, nous nous sommes professionnalisés sur les différents produits. Nous avons évolué au niveau téléphonie, technologie CRM… Même si nous avions des a priori positifs, nous avons regardé si ce canal correspondait bien aux attentes des clients. Ce qui aujourd'hui est avéré. La télévente a également fait ses preuves en termes de capacité de vente. Et, même si nous avons encore des progrès à réaliser, nous avons prouvé notre existence et notre savoir-faire. Le premier pari était donc réussi. Quelques années avant le lancement de la télévente, un numéro de service clients, le 0820 80 8000, avait été ouvert pour répondre aux demandes d'informations simples et traiter les réclamations… En 2006, il a été décidé de regrouper l'entité canal de vente et celle dédiée au service clients au sein d'un portail de services à destination des entreprises. Et, en mars 2006, après avoir réfléchi à d'autres possibilités, du type Numéro Magique, a été lancé un numéro unique, facilement mémorisable, le “36 34 Le Courrier Entreprises”.
Comment fonctionne ce portail ?
D. A : Il donne accès à tout ce que nous sommes capables de faire : de l'information simple ou à forte valeur ajoutée à la vente, en passant par de la réclamation. Pour faciliter cet accès, un SVI propose, schématiquement, quatre choix. Un choix 1, pour les commandes ou modifications, qui arrive sur les agences télévente ; un choix 2, pour l'information sur les solutions courrier ou les offres colis en France et à l'international, qui arrive également sur les agences télévente ; un choix 3, pour les autres demandes (suivi des envois, réclamations…), qui aboutit au service clients ; et enfin un choix 4, qui est le choix légal informant sur le prix, le service… Sachant qu'il existe, si nécessaire, des passerelles entre les deux entités, télévente et service clients, avec un transfert d'appel transparent pour le client. Le 36 34 est ouvert du lundi au vendredi, de 8 heures à 18 h 30 ; la partie télévente étant ouverte de 9 heures à 18 heures. Les appels destinés à la télévente arrivant entre 8 heures et 9 heures sont routés vers le service clients qui dispose, lui, de deux centres d'appels, gérés par un autre responsable, Christian Lemaire.
Comment est positionné le 36 34 en termes de structure ?
D. A : Il est rattaché à la direction de la relation client, elle-même rattachée à la direction marketing et commerciale du Courrier.
Que représente l'activité du 36 34 ?
D. A : Nous sommes actuellement sur une volumétrie de 720 000 appels entrants par an, dont 450 000 arrivent sur le canal télévente. Au niveau des campagnes d'appels sortants, nous réalisons environ 940 000 appels par an.
Aujourd'hui, vous réalisez donc davantage d'appels sortants que d'appels entrants.
D. A : Effectivement. Cette situation est liée à la notoriété du 36 34, qui ne date que de mars dernier. Nous sommes encore en pleine phase de lancement. Le canal centres d'appels étant assez récent, les entreprises n'ont pas encore toutes le réflexe 36 34. Aujourd'hui, le portail repose sur un centre d'appels, mais demain, il pourra évoluer vers la notion de centre de contacts, en gérant d'autres types de flux que le téléphone. Donc, nous devons absolument développer sa notoriété.
Quels types de produits vendez-vous par téléphone ?
D. A : Nous sommes en quelque sorte un “hypermarché” pour les entreprises. Nous vendons tous les produits et solutions du Groupe La Poste : du simple prêt-à-poster en passant par de la PNA, de la location de fichiers, de la data prospection, de la data fidélisation, des prestations du type Maileva, du colis, des produits Chronopost… Tout ce qui peut se vendre par téléphone, nous le vendons. Nous avons des conseillers clientèle armés pour répondre à toutes les demandes des clients. Avec ce positionnement d'hypermarché pour les entreprises, nous devons avoir des collaborateurs capables de réagir vite, de proposer le bon produit, la bonne solution aux clients.
Quel est le profil de votre clientèle ?
D. A : L'éventail de notre clientèle est assez large. Avec un numéro d'accueil tel que le 36 34, nous devons être capables, en appels entrants, de répondre à toutes les entreprises : du professionnel, type artisan ou commerçant, à la grande entreprise, en passant par les PME.
Comment avez-vous dimensionné vos plateaux ?
D. A : Dans un premier temps, nous nous sommes basés sur un portefeuille clients de x entreprises qu'un téléconseiller était capable de gérer ; cela nous a donné une référence. Depuis, nous avons évolué en nous basant sur le nombre d'entreprises par région. Chaque agence télévente est, en effet, responsable d'une zone géographique. Sous le SVI, il existe d'ailleurs une fonction de routage géographique en fonction du lieu d'appel. Car il est important qu'un client qui appelle, par exemple, de Saint-Étienne tombe sur l'agence de Lyon parce que c'est elle qui a la meilleure connaissance de la région. Aujourd'hui, chaque plateau totalise un effectif compris entre 95 et 120 personnes, avec une force de frappe commerciale sur le territoire national d'environ 300 télévendeurs. Avec une organisation classique : en front office, pour vendre, des conseillers clientèle – le nouveau nom des télévendeurs depuis novembre dernier, en remplacement de “conseillers directs” –, puis des superviseurs qui les managent, des responsables d'agence et, au dessus, des directeurs des ventes-télévente. Chaque plateau compte également des personnes qui s'occupent de la technique, de la formation…Compte tenu de la largeur de notre gamme et de son évolution, nous devons disposer d'un certain nombre de fonctions support pour aider nos conseillers clientèle à mieux vendre, à monter en compétences à la fois sur la partie relation au téléphone et sur la partie produits et solutions.
D'où viennent ces conseillers clientèle ?
D. A : Une partie d'entre eux est issue des agences de télémarketing qui existaient auparavant au sein de la direction du Courrier. Leurs téléopérateurs qui, à la base, faisaient de la qualification de fichiers et de la prise de rendez-vous, ont été formés à une meilleure pratique de la relation téléphonique et de la vente. D'autres conseillers étaient précédemment des vendeurs terrain ou des assistants commerciaux, venant aussi du canal face-àface. D'autres sont venus de divers horizons, tels que la production…
Quelle politique avez-vous adoptée sur le plan de la formation ?
D. A : Sur chacun de nos centres, nous avons mis en place une fonction “d'entraîneur télévente” et, depuis début 2006, un poste de formateur télévente. L'entraîneur a pour mission de faire monter en compétences les superviseurs et le formateur de faire de la formation continue auprès de tous les télévendeurs, sur les nouveaux produits, les nouveaux process… De plus, au niveau national, nous avons mis en place un “passeport de vente”, qui est une organisation, adaptée du canal face-à-face, permettant d'avoir le parcours de vente de nos télévendeurs. C'est le parcours d'initialisation et de formation de chacun d'entre eux : avant de vendre, ils doivent être formés à la culture de l'entreprise, maîtriser l'outil CRM, l'outil téléphonique, la façon de parler et, enfin, les produits. Ceci nous permet de voir la capacité de notre force de vente sur ces différents sujets. Au niveau national, nous disposons d'un autre outil, mis en place également en 2006, “Cap Compétences”, qui nous permet d'avoir un cadre sur les missions et le rôle de chacun par fonction. Et de les évaluer par rapport à leur cadre et leur fonction. Par exemple, les télévendeurs ont trois niveaux d'excellence à atteindre et, en face, des critères. Par rapport à chaque critère, nous savons à quel niveau ils se situent. Ce qui nous permet ensuite de mettre en place des formations plus spécifiques pour une catégorie de télévendeurs donnée et d'évaluer leur professionnalisme. L'objectif étant de les accompagner, de les aider pour qu'ils montent en compétences et qu'ils apprennent.
Les conseillers clientèle bénéficient-ils d'incentives ?
D. A : Ils ont des commissionnements plus des primes qui peuvent varier en fonction des challenges mis en place, soit au niveau national soit au niveau local. Le local est très important. Personnellement, si je représente le canal Télévente au niveau national, je m'appuie essentiellement sur les six directeurs des ventes-télévente, qui sont les patrons des agences et les responsables du chiffre d'affaires dont ils sont en charge. Au niveau national, nous avons un rôle d'animation, nous devons donner de nouvelles visions, exercer de la veille pour fixer une orientation. Et nous coordonnons différentes actions pour que chaque solution soit bien mise en place sur chaque centre d'appels après que les process ont été vus en amont.
Les appels entrants et les appels sortants sont-ils traités par les mêmes conseillers ?
D. A : Globalement, nous évitons de créer des spécialisations, d'avoir des conseillers clientèle qui ne traitent qu'un produit. En appels entrants, ils doivent être capables de tout vendre. En revanche, dans le cadre des campagnes d'appels sortants, nous les professionnalisons sur une gamme ou une autre. Au niveau pratique, il existe des roulements. Par exemple, une semaine en entrant, suivie de deux semaines en sortant. Et ainsi de suite. Mais cela varie selon les centres.
Quels sont les principaux indicateurs de vos centres d'appels ?
D. A : Aujourd'hui, en termes de temps de communication, la moyenne nationale se situe entre sept et huit minutes. On peut penser que c'est beaucoup. Mais, par rapport à des centres d'appels type service clients qui fournissent de l'information simple et où l'on est plutôt sur des durées de deux ou trois minutes, nous, nous sommes sur du conseil, souvent à forte valeur ajoutée, sur de la vente de solutions. Nous avons un objectif minimum de 95 % de taux d'efficacité au niveau national ; nous sommes largement à 96 %. Le taux de décrochés, après avoir passé le serveur vocal, est en moyenne de 16 secondes. Quels choix avez-vous effectués au niveau technologique ? D. A : Quand les centres d'appels télévente ont été créés, nous nous sommes appuyés sur les technologies existant au sein des agences télémarketing. Ensuite, quand nous nous sommes rendu compte que la télévente était un vrai canal, nous avons souhaité construire de bonnes fondations. Globalement, nous avons tout revu en mai 2005, avec NextiraOne pour la maîtrise d'oeuvre de la partie téléphonie. Nous avons fait un appel d'offres et choisi Genesys, qui présentait également l'avantage de bien fonctionner avec le CRM, sur base Siebel, qui était en développement en interne pour la direction du Courrier et commun à tous les canaux (face-à-face, télévente et service clients). Nous avons directement installé un CTI, compte tenu de notre priorité de traitement des appels entrants. Même si nous sommes arrivés tardivement sur le marché, nous sommes aujourd'hui équipés d'une solution semi-centralisée au niveau de la téléphonie. Elle le sera complètement fin 2007 puisque nous allons vers du tout IP. En 2007, nous déploierons la partie appels sortants en mode progressif, un autre module de la solution Genesys. Cette solution nous permet de voir, au niveau national, l'activité de toutes nos équipes en local : les appels reçus, perdus… Cela réduit la distance entre la structure nationale et le local. Ce qui est d'autant plus important que c'est le local qui fait tout ! 2007 va également nous permettre de voir si l'on peut commencer à traiter des SMS. La base, c'était d'installer de bonnes fondations avec Genesys pour pouvoir ensuite développer, les uns après les autres, des modules, pour se diriger plus tard vers des centres de contacts.
Quel usage allez-vous faire des SMS ?
D. A : La notion de SMS est intéressante surtout pour le suivi de la relation client : indiquer si la commande a bien été prise en compte, dans quel délai le client va être livré… Nous verrons par la suite une utilisation commerciale.
Et qu'en est-il de la gestion des e-mails ?
D. A : Aujourd'hui, nous traitons le message électronique, mais d'une manière qui n'est pas aussi structurée que dans un centre de contacts. Dans nos centres d'appels, il existe des boîtes mails fonctionnelles, mais qui ne sont pas traitées par le flux Genesys. Par exemple, on ne peut pas sortir de statistiques. C'est ce que nous devrons mettre en place pour maîtriser le flux, le quantifier et mieux le structurer.
Que représente la télévente au sein de l'activité Courrier ?
D. A : Nous représentons au niveau national 10 % du chiffre d'affaires de la direction du Courrier (11 244 ME en 2005, ndlr).
Quels sont aujourd'hui vos objectifs ?
D. A : Notre première mission est de répondre à nos clients, de les satisfaire, de leur apporter les meilleures solutions, de fonctionner comme de vrais partenaires et de les aider à développer leur activité. Ensuite, bien sûr, nous avons des objectifs de chiffre d'affaires à atteindre par mois avec un nombre de contrats. Aujourd'hui, un télévendeur signe, en moyenne, près de 4,5 contrats par jour. Au-delà, nous avons l'ambition de rattraper notre retard en termes de centre d'appels ; ce que nous sommes en train de faire aujourd'hui. Nous croyons vraiment à ce canal de vente et nous avons envie de développer aussi bien les outils, que les compétences de nos collaborateurs. Personnellement, j'ai la conviction que les centres d'appels connaissent un nouveau souffle, que la fonction de conseiller clientèle est de plus en plus valorisée. Parce que ce sont les conseillers qui sont en charge du frontoffice, qui portent sur leurs épaules l'image de l'entreprise. C'est pourquoi nous sommes très exigeants. Mais nos exigences d'aujourd'hui seront les standards de demain.
Biographie
Daniel Arandel 33 ans, diplômé de l'IPA, Institut des Professions des Affaires et du Commerce d'Annecy. 1996 : chef de projet dans le groupe Giproduction “Secteur de l'hôtellerie de plein air”, pour lequel il met en place un service de marketing opérationnel. 2001 : responsable d'agence marketing direct dans l'Est de la France au sein de la Direction Courrier du Groupe La Poste. Développement et réorganisation d'agences télémarketing et initialisation de la télévente. 2003 : rejoint le siège en région parisienne en tant que “MOA Support et Projets Centres d'Appels” pour participer au déploiement national des centres d'appels Télévente et à la mise en place de nouvelles solutions téléphoniques. 2006 : nommé responsable Télévente au sein de la direction marketing et commerciale du Courrier.
La Télévente de La Poste
La Directio n Courrie r de la Poste D CA 2005 : 11 242 ME (+ 3,4 % / 2004). 58 % du CA 2005 du groupe La Poste (19,3 MdE). D Répartition du CA Courrier 2005 : Correspondance, 55,5 % ; Publicité adressée, 15,3 % ; Lettre recommandée, 7,3 % ; Courrier international, 6,8 % ; Presse, 6,4 % ; Services, 5,4 % ; Publicité non adressée, 3,3 %. D Part des entreprises dans le CA 2005 : 85 %. Le ca nal télévente D 8 centres d'appels en France. D 300 conseillers clientèle. D Six directeurs des ventes - télévente : Thierry Chalayer, Chrystèle Conesa, Fabienne Decultot, Anne Denis, Philippe Gérard, Alexandre Hannequin.