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Zoom sur dix initiatives anti-gaspillage

Publié par Maëlle Chetal Gaillard le

Un tiers de la production alimentaire mondiale est jeté chaque année. En France, ce gâchis représente 10 millions de tonnes et 16 milliards d'euros selon l'Ademe. Les initiatives anti-gaspi se multiplient. La rédaction vous propose d'en découvrir dix, des start-up aussi bien spécialisées dans des paniers que dans les recettes et astuces de cuisine ou la valorisation des déchets alimentaires.

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Too Good To Go, "l'application d'un Français sur cinq"

"40 % de la nourriture produite dans le monde part à la poubelle. Rien qu'en France, ce sont 10 millions de tonnes de nourriture qui sont gaspillées chaque année, s'insurge Sarah Chouraqui, directrice générale de Too Good To Go France. Cela équivaut à "432 euros jetés par famille et par an." Depuis six ans, l'application met en relation des commerçants ayant des produits invendus avec les consommateurs. Géolocalisés via l'application, les utilisateurs repèrent les commerçants partenaires autour d'eux, commandent un "panier surprise" composé d'invendus du jour, payent en ligne et se présentent sur place aux heures de collecte indiquées afin de récupérer leur panier. Too Good To Go se finance en prélevant une commission sur chaque panier vendu.

"La solution Too Good To Go s'adapte à tout type de commerçant alimentaire : du boulanger ou primeur indépendant au restaurateur, en passant par la grande distribution, la restauration collective ou encore les grossistes et industriels ainsi que les hôtels, précise la directrice générale France. Aujourd'hui, ce sont près de 35 000 partenaires partout en France." Depuis son lancement en 2016, l'application dénombre 13 millions d'utilisateurs en France, "ce qui veut dire qu'un Français sur cinq a téléchargé l'application", se réjouit Sarah Chouraqui. L'implantation en France permet de sauver "50 000 paniers chaque jour."

Plus globalement, Too Good To Go a sauvé 42 millions de paniers depuis le lancement de l'application, cela correspond à 150 000 tonnes de CO2. Outre l'aspect environnemental, l'appli insiste sur l'aspect économique de son offre. Elle "propose une réduction de 66 % en moyenne sur les paniers proposés par tous les professionnels de l'alimentation, commente Sarah Chouraqui. Sachant que le prix moyen d'un panier s'élève à quatre euros sur l'application, pour une valeur de 12 euros de nourriture, un Français sauvant un panier par semaine peut économiser 416 euros par an. ".

Si l'équipe dirigeante de l'application n'observe pas de profil type parmi ses utilisateurs, elle répond aux demandes des "petits budgets notamment les étudiants, lesquels accèdent à de bons produits à petit prix, observe Sarah Chouraqui. Les "foodies" aiment faire des découvertes culinaires en explorant de nouveaux commerçants et produits et enfin, des personnes engagées contre le gaspillage alimentaire et pour le bien de la planète", se présentent comme des utilisateurs récurrents des services.

Outre ces paniers anti-gaspi, l'entreprise aspire lutter contre le gaspillage alimentaire en évitant aux particuliers une confusion sur les dates de consommation, Too Good To Go lance "le Pacte, signé par plus de 65 acteurs de la distribution alimentaire, explique Sarah Chouraqui. Nous développons et faisons apposer un pictogramme "observez, sentez, goûtez" pour sensibiliser les consommateurs sur plus de 315 millions de produits du quotidien." Présent dans 15 pays européens, au Canada et aux États-Unis, Too Good To Go veut "toucher, d'ici à 2025, 250 millions de citoyens dans le monde".

Hors Normes lie les producteurs aux consommateurs

La start-up Hors Normes lutte contre le gaspillage alimentaire en prenant la problématique à sa source. Grâce à elle, les agriculteurs et fabricants trouvent un débouché commercial pour leur production refusée par la distribution traditionnelle à cause d'une surproduction ou pour des raisons esthétiques.

"Il suffit d'une bonne hydrométrie et d'une température douce pour qu'une production de champignons explose, par exemple. Les agriculteurs se retrouvent alors en manque d'acheteurs, commente Sven Ripoche, cofondateur de l'entreprise. 5 à 10 % des carottes produites sont ainsi hors calibre", il s'agit d'un manque à gagner pour les agriculteurs et une source de gaspillage alimentaire. Pour rappel, "le gaspillage alimentaire à lieu pour moitié en amont, du côté des producteurs et fabricants, explique le cofondateur, et à moitié en aval : en distribution et chez le consommateur." Hors Normes rachète les denrées des producteurs et les propose aux consommateurs à des prix "allant jusqu'à 40 % moins élevés qu'en magasins ou épiceries bios", précise Sven Ripoche.

Lancée en avril 2020, Hors Normes "collabore avec 200 agriculteurs et coopératives en France pour s'approvisionner en fruits et légumes rejetés par les circuits classiques, explique le cofondateur. La naissance de cette plateforme vient comme une "initiative à impact environnemental et sectoriel, autour de l'alimentaire. Le gaspillage alimentaire est un énorme facteur de pollution, à l'échelle globale, il provoque plus de 8 % du gaz à effet de serre".

La start-up propose six formats de paniers anti-gaspi, composés de fruits et légumes "majoritairement bios, précise Sven Ripoche. Nous recevons les fruits et légumes de nos producteurs partenaires et nous composons ensuite des paniers allant de 11,50 à 28 euros avec diverses références. Le panier de quatre kilos, affiché à 15 euros, est le plus demandé par les consommateurs." Le site compte pour l'heure 3 000 visiteurs quotidiens, 11 000 clients actifs ce qui permet de sauver quelque 30 000 paniers par mois. Les bénéficiaires sont majoritairement "des actifs, en couple autour de 30 et 35 ans avec et sans enfant, observe le cofondateur. Les motivations apparaissent plurielles : il s'agit de nourrir les enfants avec des produits de qualité, à un prix abordable. Les ressorts écologiques comme celui de réduire l'empreinte de sa propre consommation" comptent parmi les motivations des consommateurs.

Les paniers sont principalement réalisés de façon locale, proche des points de livraison même si "historiquement plus d'un quart de nos agriculteurs partenaires travaillent dans les Hauts-de-France", constate Sven Ripoche. Les paniers Hors Normes sont proposés à la livraison autour de Paris, Lyon, Marseille et Lille, l'entreprise dessert au total 150 villes via Urby, filiale du groupe La Poste.

La start-up a lancé son application mobile début octobre et comptabilise déjà plus de 4 000 téléchargements. Hors Normes développe également ses propres produits d'épicerie. "Nous nous sommes rendu compte en travaillant avec un producteur de légumineuses, qu'il n'était pas autorisé à vendre des produits avec des défauts anodins sous son nom, explique Sven Ripoche. Nous n'aurions pas pu sauver ses produits sans les mettre sous notre nom."

La restauration collective "deux fois moins émettrice de gâchis alimentaire" avec Foodles

Créée en 2015 par Michaël Ormancey et Clément Bonhomme, Foodles présente une alternative à la restauration collective traditionnelle. La start-up propose des "armoires froides connectées, capables de repérer la distribution des repas, explique Aurélien Antoine, responsable RSE. Foodles permet ainsi d'équiper les entreprises en repas ultra-frais, avec des menus élaborés en interne et des plats cuisinés par des traiteurs et livrés chaque matin." A la carte ? Pâtes aux truffes, lasagnes végétariennes, entre autres. L'initiative propose deux cartes alimentaires par semaine soit 14 plats proposés aux salariés des entreprises équipées.

Pour limiter le gaspillage alimentaire, "chaque article contient une puce. Nous suivons ainsi en temps réel la consommation de chaque frigo, un algorithme développé en interne nous informe du réapprovisionnement à fournir". En plus de limiter les risques de gaspillage, l'entreprise propose ses produits à moitié prix chaque vendredi à partir de 14 heures 30. "Nous procédons à un abattement de 50 % pour doper les ventes le week-end. Si un plat ne trouve pas acquéreur chez les salariés d'entreprises partenaires, il est envoyé à l'entrepôt logistique et distribué à une association d'aide alimentaire comme le Chainon manquant ou les Restos du coeur", explique Aurélien Antoine. Le hub logistique d'Ile de France se situe à Saint-Ouen, une implantation permettant de travailler avec le centre d'hébergement d'urgence de la ville. Depuis janvier 2022, Foodles a cédé 19 000 produits aux associations solidaires.

Foodles intervient auprès de 300 clients répartis en France de Lille à Marseille, de Strasbourg à Biarritz. Parmi eux, la société de la Tour Eiffel, Safran, Veepee, la SNCF, Media One, l'Urssaf, l'AP-HP (assistance publique - hôpitaux de Paris), l'Assemblée nationale. La start-up se développe également sur les marchés britannique et belge. "Par rapport à une restauration collective classique, le gaspillage alimentaire est divisé par deux", explique le responsable RSE.

"Les solutions Smartway ont sauvé 148 millions de produits en 10 ans"

Fondée en 2012, l'entreprise Smartway vise à limiter le gaspillage alimentaire dans la grande distribution. "En dix ans, les solutions Smartway ont permis de sauver 148 millions de produits, équivalents à une économie de 175 000 tonnes de CO2", raconte Christophe Menez, cofondateur de l'entreprise. Présents dans un millier d'hypers et supermarchés, les services Smartway répondent aux problématiques de gaspillage alimentaire dues aux produits arrivés à date de péremption et restés invendus. Smartway fournit des solutions logicielles capables de guider les équipes d'un magasin vers les produits en fin de vie. Une fois ces articles détectés, "l'intelligence artificielle de notre programme répond à la valorisation du produit en les remisant et édictant de nouvelles étiquettes", explique Christophe Menez.

En septembre 2021, la firme s'allie avec SES-imagotag et développe l'outil Smartdetection Flash Evo, capable de signaler les produits alimentaires arrivant bientôt à date grâce à une étiquette clignotante. "Les salariés se connectent sur notre application et sont guidés vers les rayons contenant probablement des produits bientôt à date, explique le cofondateur. L'intelligence artificielle propose d'abord de remiser le produit, avant de le mettre en panier anti-gaspi. " En grande surface, le gaspillage alimentaire n'est traité qu'à 3 % grâce aux paniers anti-gaspi, commente Christophe Menez. Le don alimentaire représente 10 à 15 %. La majorité du gaspillage alimentaire évité dans la grande distribution l'est grâce aux remises."

L'application à destination des professionnels intervient auprès de plusieurs enseignes, telles que Leclerc, Intermarché, Système U, Carrefour. "Auchan France généralise les solutions Smartway à l'ensemble de ses magasins, raconte Christophe Menez. En un an, Auchan a ainsi sauvé 35 millions de produits." Pour rappel, "le gaspillage alimentaire représente 1 à 2 % du chiffre d'affaires d'un magasin, soit presque l'équivalent de son profit, alerte le cofondateur de Smartway. Avec notre dispositif, nous parvenons à réduire 50 à 80 % des pertes des grandes surfaces."

Présente en France, Italie, Espagne, Portugal, Belgique, Roumanie, l'entreprise n'est qu'au début de son expansion. "Nous avons conscience que le gaspillage alimentaire constitue un problème global et ne touche pas seulement la France", poursuit le cofondateur. À l'avenir, "nous cherchons à éviter le gaspillage alimentaire en amont des chaînes de grande distribution et aider les distributeurs dès leurs prises de commandes."

"Phenix sauve 150 000 repas par jour"

La start-up Phenix part du constat de ses fondateurs Baptiste Corval et Jean Moreau pour qui "trop de produits alimentaires en fin de parcours partent en destruction". Ensemble, ils décident de généraliser la solidarité et le don alimentaire d'invendus aux associations caritatives. À son lancement "en 2014, Phenix connecte et digitalise l'aide alimentaire via une plateforme entre professionnels [supermarchés, industriels et producteurs] et les associations", précise Jean Moreau. "Une sorte de Veepee en B2B : en quelques clics, un magasin donne ses invendus à une aide alimentaire plutôt que de les jeter. Nous intervenons ainsi dans les hypers et supermarchés de 6 000 à 10 000 m2".

En 2019, la start-up évolue et lance son application B2C pour proposer des "paniers surprises" à ses utilisateurs provenant des enseignes partenaires. L'acheteur ne connaît pas le détail de son panier mais dispose de plusieurs filtres (produits bios, halal, casher, notamment). "Le produit arrivant à J-2, J-1 est d'abord proposé en rayon à un tarif réduit, s'il ne trouve pas acquéreur, il est associé à un panier anti-gaspi disponible sur l'application, précise Jean Moreau. Avant ce type d'initiatives, les produits étaient sortis du rayon et les enseignes payaient un prestataire pour acheminer les denrées vers la destruction. Aujourd'hui, nous proposons de baisser le volume des déchets et donc la facture de gestion des déchets organiques. À côté de cela, nos services permettent une valorisation des produits en fin de vie et une opportunité d'augmenter le chiffre d'affaires des enseignes."

L'application, téléchargée 4,5 millions de fois, bénéficie de 17 % d'utilisateurs actifs (ayant acheté des paniers deux fois dans le mois). Pour fidéliser ses clients, Phenix met en place un système de points, "plus un consommateur achète de paniers, plus il en cumule, s'il parraine un autre utilisateur, il en gagne davantage, explique le cofondateur. Arrivé à un certain seuil, l'utilisateur accède à une cagnotte pouvant financer en partie son achat." Depuis 2014, Phenix a permis de sauver 200 millions de repas, dont 10 millions grâce à ses paniers anti-gaspi. "Nous sommes malheureusement portés par le contexte inflationniste", constate le dirigeant. Hormis une base d'acheteurs "à 75 % féminine, de 25 à 45 ans, nous constatons ces derniers mois une diversification de nos acheteurs avec des profils de personnes plus âgées, retraités et des étudiants."

Phenix propose véritablement une application pour les courses du quotidien, centrée sur "le mass market [la grande distribution]. L'essentiel des paniers proposés provient ainsi des enseignes Franprix, Leclerc, Biocoop, Intermarché, Super U." Leur prix, fixé à cinq euros en moyenne, permet aux utilisateurs du service "d'économiser jusqu'à 200 euros par mois", promet Jean Moreau. La start-up a d'ailleurs "l'intention d'accélérer ses partenariats avec la grande distribution. De tels paniers bénéficient à la fois aux utilisateurs ruraux et urbains et s'écoulent à hauteur de 99 %." L'application prend une commission de 83 centimes d'euros sur chacun des paniers vendus. Grâce à ses 16 500 commerçants partenaires, "Phenix sauve chaque jour, 150 000 repas dont 15 000 grâce à l'application", dénombre le cofondateur.

Willy anti-gaspi : la plateforme des produits en surstock ou mal étiquetés

Le site Willy anti-gaspi propose des produits alimentaires et non alimentaires comportant des dates de durabilité courtes. Ces produits proviennent de surstocks ou présentent un problème d'emballage et d'étiquetage. L'acteur digital propose plus de 500 références de produits à des prix réduits de 25 à 50 % par rapport aux tarifs originels. Cette initiative de lutte contre le gaspillage naît début 2021. "Nous lançons alors le site internet Good marché pour rendre les produits bios accessibles à tous, explique Clément Méry, cofondateur de Willy anti-gaspi. Notre entrepôt localisé à Saint-Ouen regroupait alors beaucoup de produits à DDM courtes [date de durabilité minimale]. Mon associé et moi avons alors l'idée de lancer notre site antigaspi.co". Créé en février 2022 le site évolue pour Willy anti-gaspi, "un clin d'oeil au film Sauver Willy", commente Clément Méry, cofondateur.

L'acteur 100 % digital et dédié à la lutte contre le gaspillage alimentaire part du constat de l'énorme gâchis réalisé quotidiennement en France, par les producteurs et les industriels. L'équipe de Willy anti-gaspi récupère les stocks invendus des marques et des producteurs pour les proposer ensuite à la vente en ligne. Ces denrées achetées sont ensuite livrées partout en métropole. Willy anti-gaspi bénéficie d'un partenariat avec Colissimo et Mondial Relay, en plus de son drive accessible à l'entrepôt de stockage des marchandises, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis).

Le site offre la possibilité de choisir les produits sauvés du gaspillage. Outre les produits unitaires à ajouter à son panier, le consommateur peut acheter un panier élaboré par la structure à la composition détaillée sur le site. Des offres thématiques sont ainsi proposées à la vente : paniers petits dej', apéro, cuisine du monde, entre autres, composés de plusieurs produits. Le consommateur sait dès la réservation du panier ce qui s'y trouve. "Nous ne faisons pas de panier mystère, poursuit Clément Méry. Nous voulons faire découvrir de bons produits, bios pour la plupart et fabriqués en France à nos clients."

Le panier moyen des consommateurs s'élève à 44 euros. "Le taux de repeat se situe aux alentours de 45 %, précise Clément Méry. Près de la moitié des acheteurs réitèrent l'expérience". Lancé en février 2022, le site compte "une communauté de 6 000 personnes, dont 2 500 clients actifs répartis sur le territoire français dont la moitié vit en dehors d'Ile de France et des grandes villes". L'initiative répond à une problématique d'abord économique en proposant des produits moins chers que dans le commerce, puis géographique, grâce à un réseau de livraison étendue.

Le site Willy anti-gaspi compte quelque 70 marques pour plus de 500 références produits. Des marques connues des consommateurs (Knorr, Bjorg, Artisans du Monde) se placent comme des "repères pour les clients", lorsque d'autres marques moins connues, correspondent à "des petites pépites françaises". "D'ici la fin d'année, nous proposerons plus de 800 références de produits." Le site travaille en ce moment sur plusieurs axes de développement : se tourner vers le frais et s'exporter à travers l'Europe. "Le fléau du gaspillage alimentaire ne se limite pas à la France, il concerne le monde entier, conclut Clément Méry. À l'avenir, il y aura probablement des opportunités et des combats à mener sur la lutte contre le gaspillage à l'échelle européenne."

Laissez-vous guider dans votre cuisine avec KitchenPal

L'application mobile KitchenPal propose à ses utilisateurs de gérer leurs stocks, de préparer leur liste de courses et de leur fournir des idées de recettes. Le projet, lancé il y a sept ans, part du constat de Mathieu Theaudiere, cofondateur de l'application. Étudiant, il "avait cette question récurrente de savoir quoi manger avec les denrées à disposition dans son frigo et ne parvenait pas à accommoder ses ingrédients". De là, un projet se développe pour devenir KitchenPal. Cette application gratuite propose davantage de modalités dans sa version payante, comme celle de scanner plus de produits. "KitchenPal prend tout l'écosystème de la cuisine, résume Mathieu Theaudiere. Pour nous le gaspillage alimentaire n'est pas seulement un problème de liste de courses ou de bonne connaissance des produits, c'est aussi la manière dont nous consommons au quotidien."

Concrètement comment cela marche ? L'utilisateur est invité à scanner l'ensemble de ses produits ou de les rentrer manuellement sur une liste. L'application "exporte ces données pour bâtir la cuisine virtuelle du consommateur et ainsi aider les particuliers à savoir ce qui s'y trouve, précise Mathieu Theaudiere. Une fois les informations prises en compte, l'application comprend la façon dont l'utilisateur consomme et l'aide à mieux faire ses courses. Une fois en magasin, un coup d'oeil suffit à l'utilisateur pour savoir s'il doit racheter un produit ou non."

Différents profils d'utilisateurs émergent. "Nous trouvons des personnes désireuses de gérer leur cuisine et avoir une visibilité sur leurs stocks, explique Mathieu Theaudiere. Nous répondons également aux utilisateurs cherchant de nouvelles recettes et produits. De leur côté, les shoppers s'intéressent à l'optimisation de leur liste de courses." Les utilisateurs sont à "60 / 70 % des femmes âgées entre 30 et 42 ans, observe le cofondateur. Nous comptons aussi beaucoup d'étudiants à la recherche d'une optimisation de leur façon de consommer et désireux de réduire leur budget alimentaire." Avec une base de données de 50 000 recettes, l'intelligence artificielle créée ensuite plus de deux millions d'idées cuisine. Des filtres pour les régimes alimentaires particuliers et les goûts des utilisateurs sont pensés : sans crustacés, sans noix, sans alcool..."Nos recettes et combinaisons peuvent permettre d'économiser 150 à 200 d'euros par mois pour une famille de quatre personnes", assure le cofondateur de KitchenPal.

Anciennement, Icuisto, la start-up s'internationalise et mue vers KitchenPal. Elle est aujourd'hui présente en France, au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Australie. Elle totalise 500 000 téléchargements pour 4 000 utilisateurs actifs chaque jour.

Frigo Magic, "l'application d'aide à l'élaboration des dîners"

"En cuisine, nous rencontrons le même problème que dans notre dressing où nous n'avons rien à nous mettre, nous nous disons parfois que nous n'avons rien à cuisiner", plaisante Caroline Lepoutère, cheffe d'innovation et stratégie chez Frigo Magic. Née en 2015 sous l'impulsion de Sébastien Burel et du cuisinier Christophe Boisselier, l'application Frigo Magic permet de cuisiner mieux en gaspillant moins. "Le gaspillage alimentaire prend quatre formes, selon la cheffe d'innovation et stratégie : un excédent de cuisine réalisé et jeté, des fruits et légumes difficiles à cuisiner, des produits achetés mais jamais cuisinés ou des produits non cuisinés dans leur entièreté."

Frigo Magic propose des recettes, variables et modulables. "Nous tenons compte des produits frais, d'épicerie et des ustensiles à la disposition du consommateur pour répondre aux mieux à ses attentes." L'application "accompagne les entreprises de l'agroalimentaire à imaginer des produits moins sujets au gaspillage ou à travailler sur des recettes capables d'utiliser les produits dans leur entièreté", explique Caroline Lepoutère.

Frigo Magic propose 4 000 recettes élaborées par un chef cuisinier et adaptables de 21 millions façons différentes. Les recettes prennent en compte les habitudes alimentaires des utilisateurs végétariens, végétaliens, pesco-végétariens, sans porc, sans gluten ou sans lactose. L'équipe travaille à proposer "des recettes tenant compte des régimes alimentaires pour les personnes sujettes aux soucis de santé, attentes de diabète ou de la maladie de Crohn". Pour l'heure, chaque recette précise le nutri-score et l'éco-score. "Nous pensons qu'il est préférable d'attribuer un nutri-score aux recettes et ainsi répondre à une notion d'équilibre, explique Caroline Lepoutère. L'éco-score est un calcul mis en place avec l'aide de l'Ademe et permet de connaître l'impact du produit sur l'environnement."

Si l'application dénombre 2,3 millions téléchargements depuis son lancement, "elle répond d'abord aux besoins d'utilisatrices âgées de 25 à 45 ans", remarque Caroline Lepoutère. Entre 100 et 150 000 foyers utilisent la solution Frigo Magic, "elle constitue une bouée de secours à l'élaboration des dîners pour beaucoup de foyers avec enfants." Également disponible en version anglaise, l'application compte 300 000 téléchargements aux États-Unis et au Canada depuis sa mise à disposition en 2018.

Save Eat ou comment cuisiner ses ingrédients jusqu'aux fanes

Les solutions Save Eat naissent de la rencontre entre Isaure Tsassis et Dorothée Bessière en 2017, alors en formation d'ingénieur, innovation et créativité en industrie à l'université de Cranfield (Royaume-Uni). La start-up sensibilise au gaspillage alimentaire et propose de cuisiner les aliments dans leur entièreté, épluchures et fanes comprises. "Nous étions toutes les deux sensibilisées au gaspillage alimentaire, raconte Isaure Tsassis. Nous nous rendons compte que les consommateurs particuliers gaspillent trois fois plus que la grande distribution". Pour contrer cela, Save Eat vise à "remettre au goût du jour les bonnes pratiques anti-gaspi et les recettes de grands-mères". Pour ce faire, Save Eat développe une application mobile, un site internet, une newsletter et un livre de cuisine.

Save Eat permet aux consommateurs de "mieux gérer leur frigo grâce aux alertes rappelant les dates de péremption imminentes", explique Isaure Tsassis, ingénieure agroalimentaire et cofondatrice de Save Eat. L'application propose de multiples "recettes classiques et anti-gaspi. Ces dernières montrent différentes façons de cuisiner les fanes de poireaux, de carottes, le pain rassis (autrement qu'en pain perdu)", illustre la cofondatrice. Les utilisateurs scannent leurs produits et intègrent une date de péremption. Aux algorithmes ensuite de "proposer des combinaisons alimentaires innovantes avec les ingrédients à consommer en priorité", précise Isaure Tsassis. L'initiative se distingue de la concurrence en "faisant attention à ne rien gaspiller, pas même les épluchures !"

"Nos utilisateurs sont majoritairement des femmes, étudiantes et jeunes actives, désireuses de connaître des astuces anti-gaspi pour faire des économies financières, poursuit Isaure Tsassis. Suivre nos conseils c'est cuisiner plusieurs repas avec un seul et même ingrédient. Grâce à nos astuces, un ménage de quatre personnes sauve en moyenne 40 à 50 euros par mois." Depuis son lancement, il y a quatre ans, "l'application comptabilise 300 000 téléchargements dont 30 % d'utilisateurs actifs ayant recours à ses services une fois par semaine", précise la cofondatrice. Le site recense 100 à 150 000 visiteurs par mois lorsque la newsletters compte 150 000 inscrits.

La thématique du gaspillage alimentaire intéresse aussi les entreprises. Save Eat propose des prestations anti-gaspi en milieu professionnel. "Nous voulons rendre nos initiatives ludiques et participatives. Nous sensibilisons les salariés au gaspillage alimentaire en leur proposant des ateliers, des quiz et des buffets antigaspi. Nous intervenons par exemple chez Heineken, Accor, BNP, Vinci, Malakoff Humanis", explique la cofondatrice. Des collaborations avec des entreprises de régions parisienne et au-delà."Nous nous sommes rendus dans 11 magasins de Biocoop à travers la France ou chez Airbus à Toulouse."

Autre volet d'activité, la start-up signe des partenariats avec des enseignes de la grande distribution. Save Eat a notamment collaboré avec Carrefour. L'entreprise a "jalonné le parcours client en magasin avec des petites astuces et recettes anti-gaspi, explique Isaure Tsassis. Au total, une centaine de conseils étaient disposés dans les rayons, toutes comportaient un QR code permettant de retrouver l'intégralité des bonnes pratiques sur le site Save Eat." Les consommateurs pouvaient ainsi apprendre quelques astuces de conservations alimentaires tels qu'"éloigner les pommes des autres fruits pour éviter qu'elles ne mûrissent trop vite, conserver les herbes aromatiques dans un torchon humide dans le bac à légumes du réfrigérateur, ne pas mettre les oeufs au réfrigérateur sous risque de favoriser le passage des bactéries à travers la coquille à cause des chocs thermiques répétés", entre autres.

Présente dans les pays francophones, la start-up mise sur son "livre de cuisine comprenant une trentaine de recettes, un véritable levier au téléchargement de l'application".

Upcycle valorise les déchets alimentaires avec le compost

Créé en 2011, Upcycle propose une solution de valorisation des déchets auprès des supermarchés, collectivités et restaurations collectifs. À son lancement, la société propose de transformer le marc de café en fertilisant agronomique pour champignons. Six ans plus tard, l'entreprise développe son activité de compostage et propose dorénavant de transformer les déchets alimentaires issus de la grande distribution, des collectivités et restaurants collectifs en compost. Pour ce faire, Upcycle imagine un composteur électro mécanique "permettant de gérer davantage de volumes qu'un composteur classique, explique Maëlle Joulin, directrice marketing et communication. Composter, c'est comme une recette de cuisine : du déchet alimentaire d'un côté et un apport carboné de l'autre [du bois]. Vient ensuite le brassage des matières pour qu'elles s'aèrent et que les bactéries puissent la transformer". Le mécanisme du composteur mécanique d'Upcycle, fabriqué dans l'usine de Mayran (Aveyron) permet d'accélérer le processus de décomposition. "Les déchets se transforment en compost frais sous quinze jours. Il suffit ensuite de le laisser reposer huit semaines avant de l'utiliser, explique Maëlle Joulin. Pour comparer, un compostage classique prend entre 12 et 18 mois".

"Les aliments jetés se composent à 80 % d'eau, les incinérer revient à brûler de l'eau, s'indigne Maëlle Joulin. Notre solution est d'installer les composteurs derrière les magasins, sur un parking ou en sous-sol". Par cette initiative, Upcycle, accompagne les usagers à trier eux-mêmes leurs déchets alimentaires. "Là où le mécanisme d'Upcycle est mis en place, une véritable prise de conscience opère et nous remarquons que le gaspillage alimentaire diminue de 20 %", insiste Maëlle Joulin. Présents sur plusieurs parkings Super U et Intermarché, certaines enseignes mettent le compost à disposition de leurs clients pour un usage domestique. De leur côté, plusieurs collectivités locales font appel aux services d'Upcycle : "La métropole de Bordeaux, Rennes, la communauté d'agglomération de Saint-Germain Boucles de Seine [Yvelines]. Et prochainement les territoires Paris Est Marne et Bois", précise Maëlle Joulin. Au total, l'entreprise compte une centaine de clients en France et se développe en Belgique, en Italie et au Monténégro.

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