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DossierLa communauté de marque au service de la fidélisation

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1 - Enquête - les communautés de marque

En créant des communautés dédiées, les marques recueillent beaucoup de commentaires sur la Toile, tout en maîtrisant la conversation. Valorisation de leurs ambassadeurs, ciblage de la relation client, data enrichie... autant d'atouts pour séduire les annonceurs.

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Harley-Davidson est en quasi-faillite au début des années quatre-vingt. Les nouveaux dirigeants ont l'idée de créer le Harley Owners Group (HOG), en 1983, pour redonner de l'oxygène à l'entreprise grâce à l'argent des adhésions. Les dons des aficionados dépassent les prévisions des repreneurs et Harley-Davidson renaît de ses cendres. HOG serait la première vraie communauté de marque, selon le professeur de marketing Bernard Cova (1). Le club compte, aujourd'hui, 1 million d'adeptes à travers le monde et se décline sur le Web... Une belle illustration d'un marketing communautaire efficace. Les entreprises cherchent, à travers ces sites affinitaires, à fidéliser leurs clients, mais au-delà, à recruter de nouveaux consommateurs grâce au buzz généré. Ces places d'échanges ressemblent à des forums de discussion tirant bénéfice à la fois du CRM, de l'analytics comportemental et de la gamification. Les communautés les plus évoluées sont reliées au CRM de l'entreprise.

Elles génèrent, ainsi, de la connaissance client et permettent de déterminer différents profils d'acheteurs. Même si les marques sont à l'origine de ces plateformes, leur intervention se limite à créer du trafic et atteindre une taille critique. Les techniques d'analytics comportemental venant en appui pour identifier les membres les plus actifs, ces "super users" aux contributions recherchées. Pour les récompenser et les fidéliser, les entreprises utilisent notamment les ressorts de la gamification : plus ces experts sont actifs, plus ils franchissent de paliers, et plus ils bénéficient de droits d'administration de la plateforme. Ainsi, les marques veillent à la bonne santé de la communauté, c'est-à-dire au renouvellement et à la qualité du contenu généré.

Lucas Denjean

Lorsqu'il y a moins de conversations, elles ont recours à des appels à témoignages et des jeux-concours." Il existe deux types de plateformes affinitaires : les unes regroupent les fans de love brands, les autres sont liées à un service créé par la marque ", résume Lucas Denjean, directeur général de l'agence Extrême Sensio. Des enseignes cultes comme Jeep et Ducati rassemblent des passionnés. Leurs adhérents ont développé des rituels, à l'image des fans de Guinness, qui s'amusent avec la mousse de leur pression d'élection. Les autres communautés répondent à un besoin plus quotidien, comme Village Pampers et Planet Verbaudet, qui donnent des conseils aux jeunes parents.

Les réseaux sociaux sont à dissocier de ces espaces de communication. En effet, sur Facebook, les conversations sont souvent une succession de posts sans lien entre eux. Ici, les échanges permettent de suivre une conversation sur un sujet spécifique ou de trouver facilement des réponses dans la base de connaissances (FAQ). Une communauté est un espace propriétaire totalement maîtrisé par la marque et géré via une plateforme logicielle dédiée. Ces avantages ont un coût : il faut compter entre 50 000 et 300 000 euros par an pour une solution adéquate, selon Tim Wirth, p-dg France de Lithium, éditeur de solutions. L'investissement financier dans ces communautés est justifié par la création d'un "actif média", selon Jérôme Doncieux. Le président de Relaxnews a lancé, en début d'année, Curvysation, dédiée aux femmes rondes aux États-Unis. Une plateforme de contenu sert la visibilité de sa marque sur Internet. En effet, chaque commentaire d'un membre génère un référencement naturel unique dans Google et remonte plus haut dans la page des résultats.

" Lorsqu'un internaute cherche un produit de maquillage bien noté, il atterrit sur un post publié sur la communauté Beauty Talk de Sephora ", explique Pierre Morgat, directeur général de l'agence Customer Delight et consultant pour Lithium.

Les communautés de marque permettent également d'augmenter les ventes sur Internet (et en magasin). Car les plateformes sont nativement en lien avec le site e-commerce de la marque, à l'image du libraire Decitre. Les membres postent leurs avis sur l'espace dédié, baptisé Entrée Livre. Les internautes qui lisent de bonnes critiques peuvent, en un clic, acheter l'ouvrage sur le site marchand. Cette communauté, imaginée par l'agence Extrême Sensio, joue sur le fait que 78 % des consommateurs font confiance aux recommandations de leurs pairs (2). " Un "super user" rapporte entre 50 et 25 000 euros par an à une marque ", assure Tim Wirth (Lithium). L'entreprise a évalué cette création de valeur à partir des 450 communautés qu'elle gère dans le monde, lesquelles représentent 1,2 milliard d'utilisateurs.Les entreprises utilisent aussi ces agoras pour écouter leurs clients. Le but ? Améliorer la satisfaction client via des panels de consommateurs visant à tester un nouveau produit ou service.

Les entreprises cherchent, ainsi, à limiter les risques et à peaufiner leurs argumentaires. Par exemple, Sosh a recours à ses top contributeurs pour affiner ses offres et même tester le dernier mobile Samsung. Les marques peuvent également solliciter les idées de leurs membres. Depuis sa création en 2008, My Starbucks Idea a enregistré quelque 160 000 idées et en a mis en oeuvre environ un millier. Autre avantage, la gestion de la relation client (niveau 1) entre membres.

En effet, dans ces forums d'entraide, les adeptes se répondent entre eux. Les meilleures contributions alimentent la base de connaissances du site (wiki). Au final, les entreprises enregistrent une baisse significative des appels entrants dans les centres de contacts. Depuis que HP a mis en place The Next Bench, les membres répondent à 40 millions de questions sur une année. L'entreprise affirme, ainsi, réaliser entre 50 et 80 millions de dollars d'économies par an. À l'heure où les consommateurs accordent beaucoup de crédit aux avis des internautes, les marques ont tout intérêt à mettre en valeur les contributions de leurs fans dans des espaces web qu'elles contrôlent.

Mais, avant de se lancer dans la création d'une communauté, celles-ci doivent mesurer leur popularité : " Nous analysons le bruit qui existe autour de la marque sur les médias sociaux, explique Arnaud de Lacoste, dg de The Social Client, filiale d'Acticall. S'il n'existe pas de conversations, il faut trouver un service qui répond aux attentes de ses clients. " Par exemple, la mise en relation de passionnés ou l'échange de conseils et bons plans. Ensuite, créer et animer ce type d'espace de discussions exige de la patience. Emeric Ernoult, cofondateur et p-dg d'Agora-pulse (3), qui a créé celle de l'enseigne de loisirs créatifs Cultura, prévient : " Souvent, la première version ne fonctionne pas. Il faut un an pour recruter des membres, affiner son contenu et son offre en fonction de la demande des clients. "

(1) Bernard Cova est professeur de marketing à Euromed Marseille et à l'Université Bocconi, à Milan.
(2) Enquête Nielsen, "Truth in advertising report", avril 2012.
(3) Emeric Ernoult a signé le Livre Blanc "Les communautés de marques, quels enjeux, quelles solutions", 2010.

Florence Guernalec

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